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Prolétaire, mon frère !

octobre 1954.

Tout le monde a besoin de Toi, prolétaire : le capitaliste pour ton travail, l’armée pour faire la guerre, les religions pour te domestiquer et t’offrir, châtré, aux deux autres. Veux-tu que nous voyions ensemble ceux qui t’exploitent ?



Le capitalisme parasitaire a accrédité dans ton cerveau qu’il faut des riches pour que les pauvres puissent travailler. C’est un monstrueux escamotage ! La Richesse n’existe que parce qu’il y a le travail : la mise en valeur a toujours précédé la « valeur » elle-même. L’adage du Riche est la justification de son Vol et tu ne peux entériner ce Vol et le parasitisme qui s’en suit. Tu es propriétaire Intégral de toutes les richesses et l’usufruitier partiel de leur mise en valeur. Toute autre acception est une tromperie. Ton mot d’ordre est : À mort le Capitalisme !

À vingt ans, une marâtre, la Patrie, par ses mercenaires, te déguise en soldat. On t’a vanté la supériorité de Français, d’Allemand, d’Anglais, de Russe (suivant le hasard de ta naissance et ton éducation) sur les autres. Tous des sauvages. Chant guerrier à la bouche, bien en rang, au pas derrière des oriflammes, tu pars joyeusement vers les abattoirs. Si tu meurs tu auras des discours hypocrites, des larmes de crocodiles. Si tu reviens, on t’offrira des amulettes, des hochets, accompagnés de roulements de tambours. Si tu es estropié, on commencera à te regarder de travers ; c’est que ta présence-même est une protestation contre la Guerre. Ta Patrie trouve que tu lui coutes cher, Toi qui n’as pas su mourir pour elle ! Contre le sophisme de la Guerre inévitable, contre le Racisme, dresse-toi Prolétaire, mon frère ! À mort le Militarisme !

Dès ton plus jeune âge, des pieuvres ondoyantes, les religions, te guettent. Au berceau elles te font déjà esclave. Pendant ta vie, elles te prêchent la résignation devant la misère : elles essaient de t’amadouer par la promesse d’un paradis auquel leurs thuriféraires se gardent bien de croire eux-mêmes. En réalité par la menace, par la contrainte, par la sophistication, elles te livrent pieds et poings liés aux vautours du coffre-fort et aux soudards. Elles te préparent au sacrifice infâme de ta vie pour vivre dans l’opulence acoquinées aux brutales soldatesques et aux requins de la finance. À mort les Religions !

Et chapeautant ce sinistre trio l’État créé par les politiciens, te saigne à blanc de ta naissance à ta mort. Bien mieux, tes descendants continueront à payer, à trimer et à mourir pour les mêmes causes. Toujours trompé, toujours cocufié, Prolétaire, mon frère, vas-tu encore longtemps te laisser berner par ces aigrefins de la politique, ces flibustiers du Suffrage Universel ? Déjà, passivement il est vrai, par tes abstentions massives, tu manifestes ton mécontentement à tous les forbans. Continue Prolétaire, mon frère, car c’est toi la force, c’est toi qui produit. Prends conscience de ta valeur, viens rejoindre les rangs des anarchistes et avec eux mène le combat, l’implacable lutte qui doit faire de Toi le Maitre dans la Justice, dans la Raison, dans la Liberté ! Que ton cœur généreux qui s’emflamme souvent pour de faux Idéaux, rejetant enfin tous les faux prophètes, s’illumine de la grandeur de l’Idéal humain pour la construction du Bonheur commuin, avec Tous les hommes de bonne volonté !

Paul Mauget