Accueil > Archives > 2003 (nº 1301 à 1341) > 1313s, Le Journal de la ClaaacG8, nº 1 (mars 2003) [marqué 1312s] > [Patriarcat et mondialisation]

Patriarcat et mondialisation

mars 2003.

Dans le monde entier, bien qu’à des échelles différentes et sous des formes très diverses, les femmes vivent une oppression liée au seul fait d’être femme. Une des conséquences elle aussi mondiale de cette situation, c’est que les femmes travaillent gratuitement une grande partie de leur temps sans que cela soit considéré comme une injustice.



Le travail dit domestique — mais qui pour les femmes paysannes englobe toute une série de travaux agricoles non payés — sert au niveau mondial les intérêts des hommes, mais également ceux de l’économie capitaliste qui s’appuie sur l’exploitation domestique des femmes pour mieux imposer ses politiques néo-libérales. Le travail gratuit et sous-payé des femmes permet notamment à l’économie capitaliste de limiter les services publics pour faire reposer ces tâches sur les femmes et de multiplier les emplois précaires aux bas salaires destinés en priorité aux femmes.

Dans les pays du Sud, l’exploitation des femmes est d’une violence particulièrement intense et met directement en jeu leur survie. Elles y sont doublement discriminées, d’une part en tant que femmes, d’autre part en tant que Noires, Indiennes ou Métisses. En s’appuyant ainsi sur le racisme et le sexisme, la mondialisation renforce les rapports Nord-Sud inégalitaires, intensifie l’exploitation et la pollution des pays du Sud, cherchant à créer indéfiniment de nouveaux marchés et de nouveaux profits.


Les femmes sont la moitié de la population
 80 % des pauvres sont des femmes
 Les femmes réalisent les 2/3 des heures de travail
 Elles reçoivent 1/10 du revenu mondial
 Elles possèdent moins de 1/100 de la fortune mondiale
 2/3 du travail effectué par les femmes dans le monde est gratuit


La mondialisation élimine tout droit fondamental à l’alimentation, à l’eau, à la santé, au logement et à l’éducation, en particulier pour les femmes du Sud où il n’existe généralement aucun filet social. Face à la misère, les femmes sont les dernières à manger, à se faire soigner ou à fréquenter l’école.

La mondialisation, qui détruit les services de base, fait reposer sur les épaules des femmes la satisfaction tant bien que mal de ces besoins dans les régions rurales. Par exemple, ce sont les femmes qui doivent aller chercher l’eau ou le bois à des kilomètres, ou trouver dans la nature des substituts d’aliments (racines, herbes sauvages,…) pour que la famille puisse survivre.

La mondialisation réduit les services publics à néant dans les pays du Nord et ce sont les femmes qui assument gratuitement les anciennes responsabilités de l’État, comme le soin aux personnes âgées.

La mondialisation pollue et met en danger la santé des femmes dans les communautés rurales au Sud, car elles sont fréquemment en contact avec l’eau contaminée des rivières pour réaliser les travaux domestiques.

La mondialisation pille les ressources naturelles et s’approprie les savoirs ancestraux des femmes du Sud qui, dans les régions rurales, savent souvent soigner avec des plantes.

La mondialisation précarise l’emploi de manière généralisée au Nord, en attribuant toujours aux femmes les emplois les plus mal payés et les plus astreignants comme le travail sur appel.

La mondialisation détruit les économies locales au Sud et produit la migration forcée des femmes paysannes et leur exploitation dans des travaux particulièrement pénibles et dangereux comme la vente ambulante, la prostitution ou l’esclavage domestique.

La mondialisation permet aux multinationales d’exploiter la main d’œuvre féminine bon marché et corvéable à merci au Sud, notamment dans les maquiladoras qui produisent pour l’exportation (textile, électronique, agro-industrie,…), qui ne remplissent aucun besoin local, détruisent l’environnement et interdisent le syndicalisme.

La mondialisation renforce la violence physique et sexuelle contre les femmes, notamment parce qu’elle justifie de plus amples interventions policières et militaires qui, par leur caractère intrinsèquement sexiste, agressent les femmes en particulier.

Luttons conjointement contre le patriarcat et la mondialisation !

    • Pas de révolution féministe sans justice sociale !
    • Pas d’autogestion sans abolition de l’oppression des femmes !
    • Pas d’égalité sans en finir avec le racisme !

Révolution anarcha-féministe ! [1]


Les logiques du processus de globalisation capitaliste reproduisent et renforcent la domination patriarcale de par le monde. L’analyse critique de ces logiques permet d’en souligner les conséquences dramatiques pour la situation des femmes dans le monde. D’une part, dans les pays industrialisés où les femmes assurent la majorité de « l’intendance » nécessaire au bon fonctionnement et à la production du capital, autant par leur travail salarié que par leur travail domestique qu’elles ont encore très largement à leur charge. D’autre part, les rapports nord/sud et le dispositif mis en place par les politiques du système de Bretton Woods, principalement géré par les institutions internationales ONU, FMI, Banque mondiale ont des répercussions plus que néfastes pour les femmes vivants dans les pays pauvres. En effet, sous couvert de leur « bonne gouvernance » et leur programme de « développement », la prise en charge de ces institutions se révèle catastrophique pour la condition des femmes localement (« tourisme sexuel », contrôle des naissances, endettement des femmes via les microcrédits…).

De plus, l’institutionnalisation des programmes politiques vis-à-vis des femmes (assurée principalement par l’ONU et les ONG) a pour conséquence la dépolitisation du mouvement féministe local et la perte de son autonomie conceptuelle et organisationnelle, ce qui, de fait, anéantit sa radicalité et sa potentialité transformatrice.

Enfin, il est important de mesurer les effets, de la globalisation sur la précarisation massive d’une grande partie de la population mondiale, les femmes, les plus touchées qu’elles vivent dans les pays pauvres ou les pays riches.


[1-*Infokiosk Féministe, c/o Espace autogéré, César-Roux 30, 1005 Lausanne

  • Les Casse-Rôles, CP 275, 1000 Lausanne 17