Accueil > Archives > 2003 (nº 1301 à 1341) > 1310 (6-12 mars 2003) > [Gardois actifs, mais pas radioactifs !]

Gardois actifs, mais pas radioactifs !

Le jeudi 6 mars 2003.

C’est à l’appel du Collectif gardois pour des alternatives au nucléaire qui regroupait pour l’occasion une dizaine d’associations, que des antinucléaires ont défilé à Nîmes le 1er mars. Cette initiative rentrait dans le cadre d’une réaction à l’enquête d’utilité publique qui prenait fin le 8 mars et qui était déclenchée à propos du transfert de production du mox (un combustible, mélange d’uranium appauvri et de plutonium) de Cadarache (Bouches-du-Rhône) vers Marcoule dans le Gard, déjà producteur de mox.

Il faut dire que la nouvelle ne passa pas inaperçu. Dès les premiers jours de l’enquête (le 8 janvier), Greenpeace réagit. Puis c’est le Collectif gardois qui organisa la riposte avec une réunion publique à Nîmes. Le principe d’une journée d’actions fut rapidement adoptée et se mit en place : ce serait le 1er mars, à une semaine de la clôture de l’enquête. Puis Greenpeace bloqua le 19 février à Chalons-sur-Saône un transport routier de plutonium en provenance de La Hague (Manche) et destiné à Cadarache ou Marcoule. L’organisation écologiste avait décidé de mettre l’accent sur l’acheminement routier de plutonium, et les dangers multiples que les populations des localités traversées ignoraient : attaque terroriste, accidents, puis organisa un faux convoi de plutonium qui se rendit à Marcoule le 21 février.

Le même jour, une réunion publique à l’initiative des enquêteurs sur le projet d’accroissement de la production de l’usine Mélox se tenait à Bagnols-sur-Cèze (Gard), avec une forte présence d’opposants divers. Et de partisans du projet, bien entendu. Parmi ces derniers, nous pouvons attribuer le bonnet d’âne à un élu communiste et à un secrétaire départemental de la CFDT qui n’a pas tari d’éloges sur « la création d’emplois dans un bassin économique sinistré et sur la confiance dans la qualité et le professionnalisme des travailleurs de Marcoule » ; c’était très beau et il mérite d’être bien remercié pour servir aussi bien la soupe à ceux qui mettent en danger la vie de centaines de milliers d’autres travailleurs, tout cela pour quelques dizaines d’emplois, dont pas mal sont précarisés.

Quelques centaines de tracts et une conférence de presse plus tard, le 1er mars, la manifestation se déroula à Nîmes, avec la participation de 300 personnes. On brûla des cahiers pouvant servir à l’enquête d’utilité publique, illustrant ainsi le sentiment général de crédulité de cette étape administrative. Ce sont principalement le réseau Sortir du nucléaire et les libertaires (CNT, FA, Scalp) qui ont apportés logistique, dynamique et présence tout au long de la manifestation. C’est d’ailleurs dans ces moments là que l’on s’aperçoit bien que celles qui font le plus parler d’elles ne sont pas toujours les associations les plus fournies en militant(e)s et actives sur le terrain au long de l’année (Verts et Greenpeace). Partie de la préfecture pour se rendre devant une caserne militaire où une intervention rapide eut lieu à propos du rôle du plutonium dans l’arsenal militaire, c’est aux cris de « dans le Gard comme ailleurs, arrêt du nucléaire civil et militaire » que la manifestation finit son parcours à la Maison carrée.

L’objectif essentiel des libertaires dans ce type de mouvement social et écologique doit être de recentrer les luttes écologiques dans la globalité du combat politique : parler de nucléaire sans expliciter les formidables enjeux économiques, militaires et politiques qui le sous-tendent, c’est faire de l’écologie apolitique, juste environnementale. Si nous faisons l’effort de formuler clairement notre discours et de travailler avec d’autres sans a priori (mais sans angélisme) tout en gardant notre cap anticapitaliste et autogestionnaire, nous pourrons être entendus. Nous pourrons alors contester les écologistes de gouvernement sur le terrain des mobilisations, et politiser la lutte antinucléaire qui en a bien besoin.

Lanceleau Dulac