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éditorial du nº 1372

Le jeudi 21 octobre 2004.

Pas une semaine ne pas se sans charrier son flot de nouvelles mortifères pour le monde du travail et celui des précaires, des chômeurs, des sans-droits.

Ainsi, tandis que Chirac jouait les prospecteurs-placiers en Asie, passant par pertes et (peu de) profits soixante ans de dictature en Chine, réclamant la levée de l’embargo sur la vente d’armes, clouant au pilori de son mépris Taïwan, un syndicaliste de Daewoo prenait quelques mois fermes pour avoir fait cramer la tôle. Plutôt que d’être décoré de l’ordre de l’action syndicale bien comprise, il fut au procès enfoncé par un de ses anciens camarades.

De son côté, Raffarin préparait un projet de loi facilitant (encore) les licenciements, pendant qu’une commission parlementaire concoctait une réforme de l’ISF (Impôt de Solidarité sur la Fortune) en forme de pochette-surprise pour les accapareurs, qui n’en demandaient pas tant.

Ajoutons à cela que les maffieux de l’UMP, par le moyen d’un coup d’État, rendaient son trône de parrain polynésien à Gaston Flosse, ami de Chirac, et le tableau d’une actualité qu’on hésite à appeler fraîche, sera complet.

Décidément, pour qui guette une bonne raison d’espérer quelques ruptures radicales, il ne fait pas bon, ces temps-ci, parcourir les journaux. Tout accaparées qu’elles vont être, dans les jours qui viennent, par le duel que se livrent outre-atlantique Kerry-Pepsi et Bush-Coca, les rédactions parisiennes ne se risqueront pas à rendre compte de la sinistrose qui gagne, chaque semaine un peu plus, les habitants de la vieille Europe.

Docteur Prozac se frotte les mains, patrons et politiques aussi : y a t-il plus docile qu’une population déprimée, fatiguée et inquiète ? Les yeux rivés sur le prix du litre à la pompe, craignant l’épouvantail turc qu’on lui agite sous le nez tel un hochet pour gosse, elle en oublie un temps les tenants et les aboutissants de sa propre aliénation.

C’est le monde comme il va, nous dit-on. Ou va t-il ? On ne le sait trop bien. Dormez braves gens, nous dit-on, et profitez-en bien : le réveil risque d’être pénible.