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éditorial du nº 1370

Le jeudi 7 octobre 2004.

Ça y est, la cloche de la rentrée a sonné…

Et avec elle retentit toujours la même rengaine, qui nous cloue au sol, nous prend à la gorge et nous serre le bide : métro, boulot et puis après t’as pas trop le choix, au dodo. En rangs serrés, pour ceux qu’on pu trouver une place, nous y retournons sans trop nous demander comment nous pourrions faire pour y échapper, pour faire autrement. Pour ne plus subir tout ce qui nous éreinte, tout ce qui nous esquinte et nous empêche de vivre : la pollution, la répression, la réaction, la négation… J’en passe, et des pires.

On a comme l’impression, dans ces moments-là, que l’habitude est, comme le dit le proverbe, une seconde nature et qu’il n’y a pas grand chose à y faire. L’imaginaire, individuel ou collectif, est comme passé au rouleau compresseur, complètement ratatiné, hors d’usage. C’est comme ça, et puis voilà, et puis voilà… t’as un boulot c’est déjà ça, si t’étais là ou si t’étais là-bas ce serait encore pire pour toi. Alors hein ! Te plains pas !

Pourtant le pire et tout ce qu’on nous martèle jusqu’à en mourir n’est pas notre seule ligne de mire. Nous avons le droit aussi, il faut le prendre, d’imaginer le meilleur. Plutôt que de se laisser écrabouiller par nos peurs et par un cynisme ambiant, dont nous sortirons à coup sûr perdants, à nous de nous prendre en main et de nous opposer ensemble à une fatalité qu’on essaie de nous imposer.

Le capitalisme n’est pas une donnée immuable avec laquelle on ne pourrait que composer. D’autres chansons sont à créer et certains vieux airs n’attendent que d’être remis au goût du jour. L’utopie n’est pas un délire d’extrémistes en mal de sensations, mais bien plus ce que nous n’avons pas encore réalisé, ce que nous avons oublié ou encore ce que certains, ceux qui s’engraissent sur notre misère, tentent de nous cacher.

Faire la grève, réclamer l’accès gratuit aux transports en commun ou à tous les services publics, détruire des champs d’OGM, s’opposer à l’arsenal répressif qui gangrène notre société… ne sont pas des passe-temps de petits privilégiés qui ont du temps à perdre. Mais ce sont bien des luttes qu’il faut développer afin de reconquérir un peu de notre dignité et de pouvoir imager un monde différent.

Comme le dit Catherine Baker, la seule lutte profondément utile à mener, ce n’est pas contre l’autorité, mais contre la soumission. Là seulement, le pouvoir, quel qu’il soit est perdant.