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À la petite semaine

L’Été en pente douce

Le jeudi 3 septembre 1998.

A Starr (Kenneth) is born. Depuis qu’ils sont le gendarme du monde, les États-Unis n’ont cessé de consteller la carte du globe de taches de sang indélébiles. La morale s’en est accommodée. Aucune, en effet, n’a jamais déstabilisé un président de ce pays. Ce que le crime et l’injustice nécessaires à la bonne santé de Wall Street n’ont pu faire, une coulure spermatique et présidentielle y sera parvenu. La morale, cette fois, ne saurait passer l’éponge.

Ça y est : un Livre noir du capitalisme, réponse hâtive et bâclée à un ouvrage au titre approchant, a vu le jour. En deux tomes, voici désormais le Grand Catalogue des horreurs politiques ainsi établi. Les adorateurs du fouet — qu’il s’agisse de donner les coups ou de les recevoir — encenseront l’un, au choix, pour mieux cracher sur l’autre. Victimes de ces deux galères, laissons-les se vautrer dans leurs saloperies centenaires.

Il arrivait jadis que des tribus africaines se querellent à coups de lances et de javelots. C’était le temps de la sauvagerie. Puis Tintin arriva au Congo. Armant les uns, armant les autres, au mieux de ses intérêts, alimentant les tueries avec du matériel dévastateur dernier cri. Du Rwanda à Kinshasa, c’est ce qu’on appelle la civilisation.

Au large de Perros-Guirec, des enfants vont en bateau. Tous tombent à l’eau. Qu’est-ce qui reste ? Un abbé en liberté, et quatre morts adolescents sur la conscience tranquille de leurs parents.

Une Russie et son rouble qui coulent. Une Chine où la pensée de Mao n’arrête plus la montée des eaux. Une Irlande qui s’éclate pour l’amour de la patrie d’une poignée d’irréductible abrutis…

Ici, en revanche, tout va bien. Pas d’inondations, de voitures piégées, d’ardentes fellations, de monnaie dévaluée. Sur le terrain, dans l’entreprise, dans les sondages, dans les banlieues, fini la crise, adieu l’ANPE. Depuis la mi-juillet, plus de problèmes, tout le monde s’aime. Pasqua-Fodé Sylla, même combat ! Rien que des champions, rien qu’une grande nation. Vous ne trouvez pas que ce monde est bien petit pour contenir un tel pays…

Floréal