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Faits d’hiver

La Mort d’un juste

Le jeudi 29 avril 2010.

Bruno Vayr-Piova, massacré à coups de gourdin dans l’horreur de la nuit ariégeoise. Toi qui avait tout donné, il a fallu qu’un fou prenne ta vie. Cette vie, si riche en péripéties. Toi l’étudiant « situ » de Strasbourg, en cavale dans l’Italie des années sombres. Je t’ai connu à Foix où tu essuyais les plâtres du centre culturel tou neuf, coicé entre la priosn et le cimetière.

Tout de suite on a été potes, on parlait la même langue, on aimait boire ensemble, les mêmes filles nous souriaient. À Foix, ce fut un long combat contre la jalousie et la bêtise. On t’enviait ta générosité, ton gout du partage… Tu n’abusais jamais du pouvoir, tu le donnais à tous, en toute confiance. Grâce à toi, Montfa a eu son minicentre culturel. Un jour, on transforma Montfa en village africain. On fit un rêve : une imprimerie au Sénégal. Mais les magouilleurs de tous poils firent capoter cette belle utopie. Après, ce fut la guerre. Ils t’ont « viré » comme un malpropre, ces politicards à la petite semaine, t’accusant de tous les crimes, toi le juste. On s’est battu avec toi, pour ta peau, pour l’honneur.

E toi, toujours têtu, toujours souriant derrière tes grosses lunettes, tu t’es dévoué pour le « Cerceau ». Ça aussi, on te l’a volé. Les nuisibles ont la vie dure, eux. Et maintenant, tu nous laisses dans l’horreur de cette mort indigne. Je hais ton meurtrier. Pourquoi toi ?

La dernière image de toi ! Un déjeuner d’été, à l’hôtel Gardel, au Mas-d’Azil. On a une fois de plus refait le monde. Le bon vin déliait les langues. Tu parlais du futur, tu le voulais plus calme, preque sage. Tu pars dans la tempête. Ma colère t’accompagne.

Benoist Rey