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articles du ML1212

du 14 au 20 septembre 2000
Le jeudi 14 septembre 2000.

https://web.archive.org/web/20040506183454/http://www.federation-anarchiste.org/ml/numeros/1212/index.html

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Jospin finance le patronat

La hausse des salaires c’est pour quand ?

Imaginons : il n’y a pas eu de rentrée ; ni sociale, ni politique, ni économique. Rien. Personne n’est sorti. Personne n’est rentré. Mieux : tout le monde s’en est allé, aucun n’est revenu. Finie la ritournelle boulot, vacances, boulot, dodo… pour les plus chanceux ; galère, chômage, galère… pour d’autres. Partis sans laisser d’adresse. Nous ne rentrerons plus. L’école est buissonnière, l’usine est fermée, les bureaux vacants. Il n’y a plus d’abonné-e-s à la société que vous nous imposez. Hors circuit.

Terminée l’arnaque : les salaires qui ne dépassent jamais le Smic, les heures supplémentaires non payées, les contrats à durée déterminée… Cet été, ce sont 4 500 postes qui sont restés non pourvus dans l’hôtellerie, en Languedoc-Roussillon, faute de candidats à l’exploitation. Dans d’autres régions, des salarié-e-s ont menacé de tout faire sauter si patrons et services de l’État ne répondaient pas favorablement à leurs revendications.

Cela n’a pas duré, hélas. L’imaginaire est resté en carafe. La rentrée s’est faite, sans même que nous nous soyons égaillés. Le Monde, mercredi 5 juillet, page 17 : «  2000 devrait être une année record pour l’automobile en France »…Plus de 2 millions de bagnoles vendues en une année… « Le moral des chefs d’entreprise est très élevé et les instituts de conjoncture révisent leurs prévisions de croissance à la hausse. » La consommation à fond la caisse. Erika, mon amour, attends moi, j’arrive !

Patrons et syndicats jouent à l’Unedic

Le même quotidien, 2 août, un autre sujet : le feuilleton de l’assurance chômage. Aux avant-postes : l’inénarrable secrétaire général du syndicat Force ouvrière : l’Unedic est un « lieu de collaboration » patrons-syndicats et Blondel insiste « à dessein » sur ce terme. Il avoue plus loin que « L’Unedic a permis à de nombreuses entreprises ­ en particulier les plus importantes ­ […] des dégraissages d’effectifs qui auraient, en d’autres circonstances, provoqué bien des conflits par peur du lendemain. » Heureusement que les syndicats sont là pour permettre aux patrons de licencier tranquille. Merci Notat, Blondel nous a tout expliqué !

Les tractations pour trouver un compromis sur l’Unedic dévoilent bien des attitudes. Et si l’on avait encore pas bien compris, Ernest-Antoine Seillière, le président du Medef, nous offre une explication de texte détaillée gratis : « les chômeurs doivent prendre les emplois, tous les emplois. » À prendre ou à laisser. Les réticents iront pointer, mais attention, sans allocation !

Baisse d’impôts pour les riches

Jeudi 31 août, Laurent Fabius annonçait une baisse des impôts de 60 milliards de francs l’an prochain et de 120 milliards sur la période 2001-2003. Le pétrole étant rare et cher ; il a même décidé de supprimer la vignette automobile. Cette baisse d’impôts, tout le monde en profitera, les riches plus que les pauvres. C’est une « nouveauté » socialiste : « Les hauts revenus, même s’ils ne bénéficieront que d’une baisse symbolique du taux supérieur, profiteront également des allégements dans le bas du barème, et seront donc relativement mieux lotis que les contribuables modestes » (Laurent Mauduit dans Le Monde du 1er septembre 2000, page 6…). Les patrons n’ont pas été oubliés : « La surtaxe de 10 % sur l’impôt sur les sociétés (IS) va être supprimée. » À y regarder de près, Fabius et Jospin font comme Balladur et Chirac en 1987 et 1988, ils baissent les impôts à la veille d’échéances électorales. Une trouvaille !

Blocage des routiers et profits pétroliers

L’événement de ces dernières semaines reste, tout compte fait, l’envolée des prix du baril de pétrole. Les producteurs de brut se sont invités pour les vacances et bouleversé toutes les bonnes idées de Jospin et Fabius. Comme l’État français, sur un litre de super vendu à la pompe 6,25 FF, se prend la modique somme de 4,94 FF (même proportion pour le gazole), on peut apprécier les désagréments occasionnés par les restrictions pétrolières décidées l’OPEP…

La plus belle rentrée du millénaire revient, elle, sans conteste, à Thierry Desmarest, le PDG de TotalFinaElf. Jeudi 6 septembre à Paris, costume gris cravate rouge, il présentait, fier de lui, les résultats de son entreprise : « Pour le premier semestre 2000, le bénéfice net du groupe, hors opérations exceptionnelles, est en hausse de 165 %, avec un quasi-triplement entre le premier semestre 1999 (8,4 milliards de francs) et le premier semestre 2000 (22,3 milliards de francs). Un résultat d’autant plus spectaculaire que la compagnie française dépasse largement les trois autres majors, l’américaine Exxon, et les européennes BP-Amoco et Shell, dont les bénéfices n’ont guère dépassé… un doublement par rapport à 1999 ». (dixit Jean Darriulat, un journaliste du Parisien). Comme quoi, l’État peut se servir sans gêner l’accumulation des profits des compagnies pétrolières. Dans la foulée, Thierry Desmarest annonçait le chiffre de 4 000 suppressions de postes, moitié en France, moitié à l’étranger. La cerise sur le gâteau !

Imaginons. Bordeaux, Paris, Lyon… Pas une voiture. « On dirait un dimanche d’août, le centre-ville est complètement désert » (témoignage réel d’un passant lors du blocus des routiers à Bordeaux, le 8 septembre…). Les gens dans la rue. Ils se parlent. Ils ont viré leurs patrons. Ils sont allés à la plage. Ils ont fait une virée à la campagne, organisé une bouffe à la maison, dans l’appartement avec les voisins, les copains, les copines, les mômes… Jospin démissionne. Chirac se barre en Corrèze s’occuper de ses petits enfants. Chevènement écrit à tous les sans-papiers pour s’excuser et les invite chez lui… Le soleil brille. C’est l’éruption de la fin. Les corbeaux, les vautours disparaissent.

Alain Dervin. — groupe de Montreuil


Pour l’école du peuple

C’est un fait, et magic Jack le sait, l’école a aujourd’hui des allures de bateau ivre. Quand elle ne tangue pas de désarroi, elle dérive au fil de l’eau. Déboussolée. Orpheline de toute perspective. C’est ce qu’on a coutume d’appeler la crise de l’école.

Crise de l’école et école de la crise

Depuis une bonne dizaine d’années maintenant l’école ne cesse d’être mise sur la sellette. Violences exercées à l’encontre d’enseignants et d’élèves, demandes de plus en plus nombreuses d’une présence policière à l’école, psychodrame du voile islamique au grand théâtre pathétique d’une laïcité hésitant entre l’ouverture mais pas trop et la fermeture mais pas davantage, émergence d’un échec scolaire massif là où la crise économique et sociale fait tout imploser, prolifération de ventres creux interdits de cantine pour cause de pauvreté, véritable désastre d’une orientation courant sans fin après un marché du travail chaque jour un peu plus étroit et un peu plus précaire, coups de boutoirs de l’enseignement privé et patronal qui à grands renforts de fonds publics creuse les fondations d’un enseignement à plusieurs vitesses sociales, montée en puissance d’une idéologie ultra libérale soucieuse de toutes sortes de rentabilités à court terme, privatisations rampantes de l’entretien des établissements scolaires et de leurs services de restauration, entrée en force des emplois précaires et sous-payés dans les écoles, les collèges, les lycées et les universités avec les CES et les emplois-jeunes, désarrois multiformes d’enseignants, de parents d’élèves et d’élèves tournant vers le présent et l’avenir des regards de noyés… tous les éléments constitutifs d’une crise de l’école semblent réunis au point que certains n’hésitent pas à dire qu’ils sont les prémisses d’une prochaine guerre civile.

Bref, la crise actuelle de l’école ne serait-elle pas largement imposée d’un « extérieur » social en pleine restructuration ? Ne prendrait-elle pas sa source en dehors de l’école ? Dans la course à toujours plus de profit qui déchire le corps social (celui des classes ouvrières, bien évidement, mais également, et le phénomène est récent, celui des classes moyennes) et qui ne permet plus à l’école de remplir la FONCTION d’ascenseur social qu’elle était censé remplir dans l’imaginaire collectif ? La question vaut d’être posée !

De l’école capitaliste

L’école telle que nous la connaissons aujourd’hui n’a guère plus de cent ans d’existence. Elle est apparue à la fin du XIXe et au début du XXe siècle dans un contexte historique bien particulier. À cette époque, en effet, l’État-nation, qui était de création récente et qui était composé d’une mosaïque de cultures et de parlers différents. avait besoin pour pouvoir s’affirmer dans le « concert des nations » du ciment unificateur d’une langue commune. Le capitalisme qui s’éveillait à la grande aventure de l’industrialisation avait besoin d’une main-d’œuvre maîtrisant les rudiments de la langue et du calcul. Et la bourgeoisie républicaine, dans son grand combat contre l’Église, avait besoin de se rallier les suffrages populaires.

Pour l’heure, avec la mondialisation (c’est-à-dire la délocalisation des outils et espaces de production à fort taux d’exploitation de main-d’œuvre), la robotisation et l’informatisation qui ne cessent de battre des records de productivité… le capitalisme occidental qui s’est affranchi du carcan national et de l’escroquerie marxisto-lénino-stalinienne, n’a plus besoin de l’école de l’époque de Jules Ferry ou des trente glorieuses. Tout juste a-t-il besoin d’une minorité de surqualifiés qu’il trouve dans les grandes écoles de toujours, des établissements privés à sa botte et d’une caste de plus en plus efflanquée de contremaîtres, fonctionnaires et autres Harkis du contrôle social qu’il trouve dans la crème de la crème du système scolaire ordinaire. Et quant à cette foule de pauvres hères qu’il condamne désormais à errer sans fin dans les corridors glacés du chômage chronique et de la précarité permanente, c’est peu dire qu’il aimerait la cantonner dans une école au rabais lui coûtant moins cher que l’école actuelle !

Comme on le voit, si crise de l’école il y a aujourd’hui, c’est moins dans la réalité de toujours d’une école de classe au service du capitalisme et de la bourgeoisie qu’elle se situe que dans le mythe dont elle fut porteuse un moment. Ce fameux mythe du service public d’enseignement tout auréolé d’égalité des chances censé servir de marche-pied à la réussite sociale pour tous.

Désormais, les choses sont claires, on peut être chômeur de longue durée à bac + 2,3,4 ou cinq et quant à ceux qui ne vont pas jusque là, c’est-à-dire les plus nombreux et toujours les mêmes, bonjour l’enfer.

Que faire ?

Il en est du mythe de l’ascenseur social scolaire comme de tous les mythes. Il a la peau dure et se moque largement des faits. Les faits, pourtant, parlent d’eux même. Car, bizarrement, c’est au moment où l’école n’a jamais été aussi « performante » en termes scolaires (le niveau monte), d’enseignement de masse (le nombre d’enfants scolarisés n’a jamais été aussi élevé) et de moyens matériels, financiers et humains mis à son service que sa fonction d’ascenseur social se met a pédaler dans la semoule

Bien évidemment, on peut toujours tenter de résoudre ce paradoxe par l’absurde en s’employant à diminuer le nombre de places de l’ascenseur. C’est ce que le pouvoir, le patronat, la technobureaucratie publique et privée… nous proposent en nous vantant les mérites d’un renforcement de la sélection et d’un système scolaire à l’américaine (des écoles privées payantes et de qualité pour les riches et des écoles garderies publiques gratuites pour les pauvres). Tout cela, bien sûr, sur fond d’enfourchement du cheval borgne de la répression pour mater ces barbares banlieusards qui osent cracher dans une soupe qu’on leur servait naguère avec parcimonie et que désormais on leur refuse.

Mais c’est largement scabreux politiquement et socialement car en diminuant les places de l’ascenseur on prend le risque de le ramener au rang de simple échelle et ce faisant de dynamiter le mythe. Dans le même ordre d’idée (celui de l’absurde) on peut chercher à augmenter le nombre de places dans l’ascenseur en revendiquant davantage de moyens humains et financiers. Mais outre le fait que le pouvoir et le patronat ont peu de chances d’accéder à ce genre de requêtes, il est clair que ça ne résoudrait en rien le problème. Car c’est flagrant, ce n’est pas en augmentant la « production » scolaire qu’on élargira d’un centimètre la surface de l’extérieur économique et du marché du travail qui absorbent cette production.

Serait-ce alors à dire qu’il suffirait d’élargir la surface de cet extérieur économique et du marché du travail pour que l’école retrouve sa fonction mythique d’ascenseur social ? C’est ce que les différentes forces de gauche qui ont fait le choix de gérer le capitalisme sur un mode réformiste aimeraient croire et nous faire croire. Jadis, le capitalisme créait de l’emploi et pouvait se payer le luxe d’un service public d’éducation mythique de type ascenseur social pour tous (90 % des places dans l’ascenseur étant réservées aux classes moyennes et 10 % aux classes ouvrières).

Désormais le capitalisme ne crée plus d’emplois autres que précaires et au lieu de faire 100 voyages par jour l’ascenseur n’en fait plus que 10, et ce, sur la base des mêmes proportions qu’antérieurement pour ce qui concerne l’origine sociale de ceux qui le prennent.

Le problème n’est pas davantage de chercher à réformer le capitalisme pour qu’il accepte de salarier 110 bacheliers au lieu de 100 à 5 000 balles par mois au lieu de 4 500. C’est par trop misère ! Il est d’oser !

D’oser dire que l’école a pour vocation principale d’instruire et d’éduquer les enfants et accessoirement de les préparer au travail. Que si le marché du travail ne permet plus d’accueillir les enfants qui sortent de l’école, il faut changer ou supprimer de marché du travail. Et que si le système social et sociétaire (le capitalisme) ne peut pas changer ou supprime ce marché du travail, il faut changer ou supprimer ce système social et sociétaire.

D’oser, sur ces bases, revendiquer une école pour tous. Une véritable école du peuple ne profitant pas qu’aux seules classes moyennes.

D’oser casser ce rapport mercantile et abject de l’école au travail qui coupe les ailes de la vie, de la spontanéité, du jeu, de la poésie… à tous les enfants de toutes les classes sociales et de tous les pays du monde.

D’oser affirmer que l’instruction est avant tout culture, épanouissement de la personnalité de chacun et de tous, et donc éducation à la liberté, à l’égalité, à l’autogestion, à la coopération et à la citoyenneté !

D’oser repenser et disons le, rêver, un authentique service public ou social d’enseignement et d’éducation, laïque et gratuit, du genre ascenseur culturel pour tous fonctionnant à égalité des chances pour tous et au plaisir d’apprendre pour chacun. Permettant d’apprendre la lecture, l’écriture, le calcul, les réalités d’hier et d’aujourd’hui, les siennes, celles des autres… D’apprendre à apprendre. D’apprendre à s’apprendre. D’apprendre à construire l’égalité, l’autogestion, la coopération, la citoyenneté. par la pratique de la liberté, de l’égalité, de l’autogestion, de la coopération, de la citoyenneté… D’apprendre, mais oui, le bonheur et le plaisir d’être.

Jean-Marc Raynaud


19 septembre : nouveau procès de la solidarité avec les sans-papiers

Depuis mars 1998, des militants se rendent régulièrement dans des gares ou des aéroports pour tenter d’empêcher les expulsions. Depuis janvier 2000, une présence hebdomadaire à Roissy a relancé une campagne spécifique sur les aéroports avec parfois la présence de proches des reconduits. Les militants présents ont observé que les expulsions se poursuivent et s’amplifient dans des conditions souvent très détestables : étrangers nus, mineurs, personnes malades ou affamées, des faits régulièrement annoncés par les différentes organisations qui se sont rendues sur les lieux et confirmés par des témoignages anonymes des employés de l’aéroport. À de multiples reprises, des expulsions ont pu être empêchées ou retardées par la présence de militants et la mobilisation des passagers.

Face à cette présence, les autorités de police n’ont pas tardé à réagir, interpellant les militants sous prétexte de vérification d’identité, les éloignant ainsi. des lieux d’embarquement durant les 4 heures réglementaires.

Le 22 janvier, la vingtaine de personnes présente a pu observer les embarquements successifs d’enfants et d’une femme nue ; des photos ont été prises.

Immédiatement, les photographes ont été neutralisés et c’est dans ce contexte qu’une douzaine de militants a été interpellée et conduite dans le bâtiment central de la PAF (Police aux frontières) de Roissy pour la procédure d’examen d’identité et une audition (sans garde à vue). Ils ont été maintenus comme d’habitude durant 4 heures et relâchés sans suite immédiate.

Les pellicules ont été saisies et les appareils photos dégradés (ce qui a fait l’objet d’une plainte de leurs propriétaires).

La présence à l’aéroport ne s’est pas arrêtée pour autant et chaque semaine des militants poursuivent leur action d’information aux passagers et de contact avec les salariés d’ADP et des compagnies aériennes.

Des reportages de presse écrite, de radio et de télévision ont pu se faire et le harcèlement policier a diminué.

L’enjeu du procès n’est pas de réprimer les quelques personnes citées à comparaître mais de menacer tous ceux qui pourraient (passants ou passagers) se mobiliser au moment des expulsions. Plus globalement, le but est de démoraliser et d’isoler les sans-papiers qui continuent la lutte et tous ceux qui refusent le statut de précaire de plein droit que confère la carte d’un an. C’est bien la solidarité concrète avec la lutte des sans-papiers qui est visée.

Collectif anti-expulsions de Paris

Nantes : Rassemblement le 16 septembre à 14 h 30 devant la préfecture. Action à l’aéroport par la suite.
Paris : 14 septembre réunion publique à 20 heures, CICP, 21 ter Rue Voltaire, 11e.
17 septembre 8 h 45 quai RER B, gare du Nord, direction Roissy, appelé par CAE, FA, OCL, NP…


Fait d’hiver

Notre patrie c’est le monde

N’en déplaise aux bandes maffieuses encagoulées de corsitude, aux chiens de guerre d’une basquitude hideuse d’assassinats à la petite semaine, aux ânes bâtés bretonnants, aux tocards savoyards, aux benêts charentais, aux crétins libertoïdes du oui mais à la vérole des luttes de pseudo libération nationale, aux petits marquis arriérés d’un jacobinisme hexagonal à front bas et blouses grises républicaines, aux ventres mous et aux concombres masqués d’un combat visant à remplacer un État par un autre État, une armée par une autre armée, une police par une autre police, une bourgeoisie par la même et une Église par la même, aux imbéciles heureux qui sont nés quelque part et en tirent fierté, aux abrutis de l’ethnicisme, du racisme, du droit du sang, de la chasse à l’allogène, aux footeux merdeux qui n’ont le Zizou braillard que dans la victoire, aux suppôts d’une mondialisation capitaliste annihilant toute autonomie, à tous ceux et toutes celles qui croient guérir la peur qu’ils ont d’eux-mêmes en la conjuguant à la haine de l’autre… les anarchistes persisteront à dire que leur patrie c’est le monde, que la terre est à ceux qui la travaillent, que le respect des origines n’a de sens que dans le cadre de l’internationalisme et du fédéralisme, que la liberté et l’égalité des êtres humains ne se construira que sur la base de l’abolition des frontières, des États, des armées, des polices, des Églises, des bourgeoisies et des capitalismes.

Il s’agit assurément là d’un combat de longue haleine, mais nul doute qu’il est d’une autre trempe que celui, rabougri, petit, nauséeux, miséreux, mesquin, méchant, sanguinolent, tribal, banal, passéiste, triste, borné, déjanté, stupide, morbide, de tous les imbéciles sans espoir et autre hémiplégiques de l’intelligence politique qui éjaculent en ce moment leur billevesées nationalistes à tous vents

Jean-Marc Raynaud


Avortement-contraception

Les soubresauts de l’été 2000

Le début de l’été a connu une grande agitation politico-médiatique avec une montée en puissance des tenant-e-s de l’ordre moral. Certes, les associations familialistes liées à l’extrême droite et à la droite sont coutumières du fait, mais nous avons vu réapparaître ouvertement le mandarinat médical et le gouvernement, quant à lui, commencer par de belles recualdes. Et rien n’est encore joué !

Premier acte : le Conseil d’État contre le Norlevo

En effet, le Conseil d’État, saisi par des associations familialistes et anti-avortement, casse, le 30 juin, la circulaire de Ségolène Royal, autorisant la distribution de la pilule du lendemain par les infirmières des lycées à l’aide de deux arguments. D’une part, elle serait contraire à la loi Neuwirth de 1967 qui stipule que « les contraceptifs hormonaux et intra-utérins ne peuvent être délivrés que sur prescription médicale » alors que le gouvernement s’appuie sur une directive européenne du 31 mars 1992 qui classe ce contraceptif dans la catégorie des médicaments ne nécessitant pas de prescription. D’autre part, les infirmières ne doivent pas prescrire. Les tenant-e-s de l’ordre moral instrumentalisent avec entrain le terrain juridique. D’ailleurs, le Conseil d’État avait déjà bien engagé son œuvre moralisatrice avec l’annulation du visa d’exploitation du film de Virginie Despentes, Baise-moi, donc son interdiction.

Deuxième acte : « Si elles décident seules, ce sera une hécatombe »

La gauche plurielle avait promis une réforme de la loi Veil, mais les mois passant, les années aussi… c’était pour l’été 2000 ! L’offensive débute avec le Pr Nisand expliquant que l’allongement du délai légal d’avortement entraînerait un risque d’eugénisme avec des avortements de confort, grâce aux progrès dans les techniques d’échographie. Les prises de position de ce dernier retiennent l’attention car il avait été chargé par le gouvernement du rapport sur l’IVG en France publié en mars 1999 et avait travaillé en association avec le Planning familial (MFPF), la CADAC et l’ANCIC. Ce rapport met en évidence l’hypocrisie de tous ceux et toutes celles qui répètent que l’essentiel est acquis : 5 000 femmes sont contraintes à avorter à l’étranger en raison du dépassement du délai légal !

Suite à ces déclarations, le gouvernement, début juillet, ne souhaite pas toucher les lois sur l’IVG et sur la contraception : Aubry serait opposée à l’allongement du délai, Jospin voudrait attendre une évaluation de « l’élément scientifique » avant d’agir.

Troisième acte : une réforme à l’horizon

L’IVG est bien un sujet sensible, mais pas comme l’entend le gouvernement. Suite à ces déclarations de guerre contre les femmes, une première riposte a lieu. L’IVG devient la Une des médias, le gouvernement trahirait le peuple de gauche et notamment les femmes à l’heure de la parité. Les associations féministes se mobilisent et multiplient communiqués et déclarations, y compris les femmes du PS.

Le 27 juillet, le gouvernement reprend l’initiative avec l’annonce d’une discussion, le 5 octobre, à l’Assemblée nationale de la proposition de loi sur la pilule du lendemain dans les lycées, et une révision des lois Veil et Neuwirth présentée en Conseil des ministres au plus tard le 4 octobre. Les déclarations d’intention ne laissent augurer qu’un simple toilettage de la législation. Le délai légal de l’IVG passera de 10 à 12 semaines ce qui permettrait d’éviter 80 % des 5 000 IVG à l’étranger. Pour les mineures, il y aura aménagement de l’autorisation parentale. Lors de l’entretien, le médecin doit encourager la mineure à renouer le dialogue avec ses parents, si elle persiste, la décision sera prise lors du deuxième entretien avec le psychologue mais assisté obligatoirement d’un-e adulte référent-e qu’elle aura choisi. Les mineures ne peuvent toujours pas décider librement de garder ou non leur grossesse. De plus, des dispositions pénales liées à la propagande et à la publicité en faveur de l’IVG seront supprimées.

Quatrième acte : un combat à mener

À la lecture de ces annonces, il est simple de comprendre qu’elles servent avant tout à calmer les choses. L’année 2000 est celle des 25 ans de la loi Veil, dans beaucoup de villes, des collectifs d’associations se sont mobilisés cet hiver et le restent, c’est aussi la Marche mondiale des femmes qui rassemble un grand nombre d’organisations y compris de la gauche plurielle au pouvoir. Cependant, on est loin du compte. Outre le problème des mineures, les femmes étrangères restent les grandes « oubliées », elles doivent justifier de trois mois de séjour et donc avoir des papiers. Il n’est pas question non plus de supprimer l’entretien obligatoire avant une IVG. À cela s’ajoute toujours la nécessité d’une information permanente sur la sexualité, la contraception et l’avortement, des fonds suffisants pour les hôpitaux et du personnel médical, etc. Ce que nous voulons, nous l’aurons en repassant à l’offensive afin de d’imposer au gouvernement, à la droite et aux forces religieuses le libre choix des femmes.

Danielle. — groupe Lucia Saornil


Université d’été euroméditerranéenne des homosexualités

Les idées libertaires ont le vent en poupe

Pour la seconde année consécutive, une partie du mouvement homosexuel s’était donnée rendez-vous à l’université d’été euroméditerranéenne des homosexualités (UEEH), qui eurent lieu dans la région marseillaise du 22 au 29 juillet. Avec plus de cinquante sujets de réflexions ou d’activités proposés et la présence d’une trentaine d’organisations homosexuelles ou bisexuelles, sans compter la participation d’intervenants venus de différents continents, le programme avait de la gueule et de quoi réjouir un auditoire exigeant composé de quelques 500 personnes. D’une manière générale, les débats furent effectivement de très bonne tenue. Les militante-e-s présent-e-s n’ont bien sûr pas manqué de critiquer le PaCS ainsi que la commercialisation de la culture gaie et lesbienne.

Ces rencontres ont été l’occasion notamment de faire le point sur l’état du mouvement. Si des associations de gays se sont montées dernièrement dans des institutions et des milieux qui taisaient l’homosexualité, dans le même temps, les structures revendicatives se transforment. On s’achemine vers une « partenarisation » du mouvement gay. La première association de salariés gays vient de se créer à Canal +, encouragée en cela par la direction car ça fait chic et branché. Et à la dernière Lesbian and gay pride de Paris, l’association des étudiants gays de Science Po a fait sponsorisé son char par une entreprise de l’internet. Comme les gays sont considérés comme des leaders d’opinion pour la promotion de nouveaux produits, on ne peut que craindre un renforcement des liens entre le capitalisme et le mouvement homosexuel. La bourgeoisie a, quant à elle, bien compris ses intérêts de classe puisqu’il y a deux ans l’association « L’autre cercle » s’est créée, à partir de gens issus du SNEG (Syndicat national des entreprises gaies). Elle vise à promouvoir une solidarité entre les cadres et les dirigeants.

En ce qui concerne le rapport à l’État, il faut souligner la prégnance des stratégies qui passe par le lobbying. Puisqu’on ne peut nier les apports de telles pratiques (réunion à l’automne avec Élisabeth Guigou, Jack Lang et Catherine Tasca pour mettre en place des études sur les genres et la sexualité à l’université), le discours anti-étatique et anti-électoralisme a du mal à passer.

Bien que financées par la ville de Marseille, le conseil général des Bouches-du-Rhône et le conseil régional PACA, les UEEH ont donc attiré la mouvance libertaire. Comme de nombreuses personnes avaient manifesté le désir d’en savoir plus sur l’anarchisme, nous avons été amenés, sur le champ, à animer un débat non prévu au programme. Si les gens sont sortis ravis de cette rencontre/discussion, intitulée homosexualités et anarchisme, cela tient au fait que les anarchistes sont en mesure d’articuler les analyses de classe et de sexe et surtout de proposer un projet de société apte à répondre aux attentes des gens. L’un des enjeux à venir consistera certainement à relier la dimension individuelle des luttes politico-sexuelles à un combat plus collectif et plus global.

Christian, groupe Kronstadt et Guillaume, groupe Durruti (Lyon)

Pour un bilan plus détaillé des UEEH, voir sur le net le site web www.ueeh.org


Crise de foi

Il n’est pas gay le pape !

Plus de 200 000 personnes ont défilé, le samedi 8 juillet à Rome, pour la World Pride. Les homosexuels et les lesbiennes ont ainsi fait un sacré pied de nez au Vatican, qui n’apprécie pas ce genre de manifestation, en plein Jubilé, qui plus est… Le pape n’a pas pu s’empêcher de faire une déclaration où il a exprimé son « amertume » face à « l’affront » et « l’offense aux valeurs chrétiennes ». Il a conclu en disant que « les actes homosexuels sont contraires à la loi naturelle », précisant toutefois que les gays et lesbiennes « doivent être accueillis avec respect, compassion et délicatesse ». Quelle hypocrisie !

Il suffit de se rendre en Pologne, terre natale du pape et terre encore très christianisée, pour se rendre compte que tout cela relève du mensonge. Là-bas, il y a actuellement une campagne électorale pour la présidentielle et les candidats de droite catholique (déjà au pouvoir) ne cachent pas leurs pensées sur l’homosexualité. Ainsi, Lech Walesa, un grand ami du pape a ainsi déclaré : « les homosexuels sont des gens malades, il faut les soigner, imaginez que tous les gens empruntent cette voie, nous n’aurions plus de descendants ». À noter que dans ce pays bien catho, 55 % des polonais conservent une attitude négative à l’égard des homos, contre 27 % qui adoptent un regard bienveillant. À quand des camps de rééducation sexuelle en Pologne ? Ou, si ça ne marche pas, des lois homophobes avec la bénédiction de l’Église ?

Régis Boussières. — groupe Kronstadt (Lyon)


L’Ariège génétiquement modifiée

Il était une fois dans la vallée de Foix, quatre quidams, « ignares plein de bon sens » (selon le président de l’INRA) ayant eu l’impudence de remettre en cause les certitudes des scientifiques du CETIOM (Centre d’étude technique interprofessionnel des oléagineux métropolitains), savants pleins de bon sens, affirmant que les graines qu’ils manipulent sont sans risques de pollution génétique… Ces quatre « Martin Guerre » contemporains ne manquent pas de courage et sont parfaitement conscients de leur rôle de soldats à la pointe du combat contre de puissants organismes internationaux tels que Biogemma, Rhône-Poulenc, en Europe et « Plantgenome initiative » aux États-Unis ou bien encore le « Rice genome research » au Japon. En fauchant une parcelle de colza transgénique appartenant à la CETIOM à Gaudies, en Ariège, ils gênent (sans jeu de mot) les plans ultra-libéraux d’un Claude Allègre qui veut arroser avec les deniers de l’État, un groupement d’intérêt privé « génoplante » dont le budget prévisionnel en 1999 était de… 1 milliard et demi de francs. Accusés de « destruction de récolte », nos quatre lascars sont littéralement les otages de politicards menteurs au service du libéralisme que défend avec talent notre gouvernement de la gauche plurielle.

5 septembre : le procès

Leur procès commençait le 5 septembre au tribunal de Foix. Pour une fois, il fait une journée magnifiquement ensoleillée en Ariège. Une foule conséquente arpente les ruelles pavées aboutissant au tribunal, juché au pied des superbes ruines du château des comtes de Foix. Atmosphère pacifique et festive habituelle à ce genre de manifestation.

Rien ne manque sauf, peut-être l’odeur des sempiternelles merguez compensée par les effluves de kif, de temps à autres. Tout y est : musicos en mal d’exotisme tam-tamique, des gens en basket, pieds nus ou en sandales, foule hétéroclite, mélange BC-BG citadins et de sympathiques néo-ruraux. L’ensemble houleux de cette multitude rassemble une forêt de t-shirt aux inscriptions souvent extravagantes. Un passant plus haut que les autres, trimballant une pancarte au-dessus de son dos semble exorciser sa passion pour les palmipèdes lamellirostres en arborant l’inscription « Vive la terrine de canard » ; homme-sandwiche masochiste ou… éleveur de porc déçu ? Foule militante nombreuse, certes, mais bien moins dense qu’à Millau. L’attention de chacun est constamment attirée par des dizaines de stands à chaque coin des petites ruelles tortueuses et montantes. La petite cité fuxéenne s’est transformée en un grand forum où les prises de paroles se sont succédées sans interruption. La halle Saint-Valusien abritant le forum « Désobéissance civile » n’a pas désempli. Bien des associations y ont organisé leurs tables de presse et invitent les passants à prendre la parole au micro central afin de s’y exprimer. Parmi les assoces, les plus représentatives citons « Le Mille-pattes » qui avait invité J.-J. Gandini qui n’est pas apparu. Quant à l’Imprimerie 34 de Toulouse, elle exposait ses incontournables affiches et le dernier numéro de sa fameuse mais capricieuse revue Basta. Débats sur les sans-papiers, « une terre, un toit », le droit syndical, le nucléaire. Tout cela devait immanquablement aboutir à la question de fond : « comment se débarrasser du néo-libéralisme et de son infernale économie de marché. »

Non aux risques d’une technologie totalitaire

Pendant ce temps, là-haut, tout là-haut, ce n’est pas un véritable procès qui se déroule. Ce sont deux conceptions de société qui s’affrontent. En cela, rien qu’en cela, les inculpés sont d’ores et déjà victorieux. Des précisions scientifiques enlisent les discussions et glissent vers des querelles d’experts où les magistrats perdent pied. Le président, très embarrassé, essaie de ramener le débat vers le thème : « qui sera le gagnant avec les OGM ? » À un moment, il saisit une information qui le place sur son terrain juridique et qui risque de lui laisser une élégante porte de sortie. En effet, le CETIOM est un organisme en partie privé et en partie d’État. Comment alors, appliquer en même temps le droit privé et le droit public ? Cette question laisse perplexe aussi bien le président que le procureur. On entend parler aussi de « technologie totalitaire » et de « hold-up sur le vivant au profit des transnationales ». Enfin, le président arrive à se sortir de l’embarras ; il sait trouver le ton ; le mode enjoué. Heureusement car l’auditoire commençait à s’ennuyer fermement sauf… sauf les quatre inculpés. Eux seuls sont sereins et optimistes car ils savent que le procès se passe à l’extérieur… à quelques mètres du prétoire. Par la fenêtre entrouverte, ils aperçoivent la foule qui discute et, ô ironie, ils lisent sur une immense banderole de 25 mètres de longueur un petit slogan bien percutant : « Quand les responsables de nos institutions violent nos droits, il est indispensable de résister sous toutes les formes ». Comment M. le préfet de l’Ariège, lui, le grand inquisiteur et pourfendeur des petits militants colleur d’affiches qu’il poursuit de Saint-Girons à l’île d’Oléron, comment peut-il tolérer une telle provocation ?

La salle d’audience résonne de mots barbares tels que « amplification par PCR du gène promoteur P 355… révélation calorimétrique »… Nos quatre inculpés n’écoutent plus rien tant ils sont convaincus qu’ils ont gagné le procès dans la rue. Le procureur demande 5 000 francs d’amende par personne. Verdict le 3 octobre.

L’Ariège génétiquement modifiée ? Certes oui ! Les montagnards le furent à partir de 1827 qui se déguisèrent en femmes pour combattre les riches maîtres de forges, d’où l’appellation de cette révolte « la Guerre des demoiselles ». Alors, hommes de pouvoir actuels, bouffons au service de l’État, prenez garde de ne pas être responsables de transmissions d’OGM sur la population ariégeoise, surtout si ces gènes sont des gènes de type libertaire.

Gérard Lorne


Chronique anarcha-féministe

L’ange du foyer

Des enfants rentrent « à la maison », Maman est là, sourire, goûter. Une quasi-sylphide, un balai entre deux doigts, derrière elle la cuisine briquée et le salon chaleureux qui va avec. Pour le dessert, bouquet final d’un dîner ciselé, la maîtresse de maison prodigue des joyaux comestibles. Reste que selon le mode de calcul, le travail des femmes effectué « par amour » produirait une augmentation de 30 % à 70 % du PNB. Désigné par l’expression « double journée », ce travail constitue une base de la pérennité du capitalisme. Il génère des services gratuits qui augmentent
significativement la productivité. Les qualités des services augmentent proportionnellement au sacrifice de la personnalité devenue Maman. Maman produit de la culture, intégrée rapidement par sa progéniture.

Un : les femmes s’occupent des enfants pour qu’ils deviennent intéressants (parole, esprit d’initiative, modelage des corps et de la gestuelle).

Deux : parmi les enfants, il y a les garçons et les filles. Ils sont plus nourris, encouragés à être coléreux, impulsif, violent. Elles doivent avoir le regard fixé sur la balance et le sourire tendre, décharger les autres de leurs préoccupations. Ce précepte vaut aussi pour l’âge adulte.

Trois : ne pas confondre le dehors et le dedans. Le dehors réserve ses joies à ceux qui sont naturellement doués pour ça. À noter que ce don naturel se manifeste surtout après que la culture maternelle soit passée par-là. Le dehors est dur, il faut être un loup pour y survivre, on n’y va pas pour s’amuser. Les raisons du dehors gagnent toujours sur celles du dedans. Le dedans ne rapporte rien mais doit apporter tout ce dont ceux du dehors ont besoin (chaleur, soins).

Pour venir à bout de cette instillation quotidienne du patriarcat, politisons le privé.

Ma Dalton


Vite fait… Bien fait

• En spéculant allégrement sur la hausse des prix du pétrole, le groupe TotalElfFina a accru son bénéfice net de 47,8 % pour le premier semestre 2000, soit 22,36 milliards de francs (3,408 milliards d’euros).

• Considéré comme juridiquement non responsable car seulement propriétaire de la cargaison, le groupe TotalElfFina a toutefois insisté pour prendre à sa charge le coût du pompage de l’Erika.
Ceci lui aura coûté un peu plus de 75 millions d’euros … soit 2,2 % des bénéfices réalisés au cours du seul premier semestre 2000. C’est beau la générosité …

• 800 francs par mois. C’est le salaire d’un détenu qui travaille trente heures par semaine dans une prison française. No comment.

• D’après Jean-Paul II, Pie IX ­ le théocrate catholique du milieu du XIXe siècle, qui traitait les juifs de chiens, était doté « d’un remarquable sens de l’humour ». Dans pas longtemps, l’autre secoué de la mitre devrait nous expliquer qu’Hitler était un joyeux drille et Dachau un centre de balnéothérapie.

• Selon le dernier sondage SOFRES, il devrait y avoir 61 % d’abstentionnistes au référendum sur le quinquennat. À ce niveau, on peut se demander si ça vaut encore la peine de faire une campagne pour l’abstention.

• L’avenir de la MNEF (Mutuelle nationale des étudiants de France) qui a été pillée à des fins politiques rappelons-le, semble lourdement hypothéqué. Les salariés en grève occupent depuis lundi 4 septembre le siège de la mutuelle à Paris. Les étudiants qui n’auraient rien à faire ces jours-ci sont chaleureusement invités à aller soutenir les grévistes.

• Si les insultes d’Allègre énervaient franchement, les discours mielleux de Jack Lang peuvent aussi agacer un tantinet car non suivi d’effets. Dans l’Hérault, deux écoles maternelles étaient ainsi occupées le jour de la rentrée par les enseignants et les parents d’élèves pour cause de classes encore et toujours surchargées.

• Une amende de 400 000 FF a été requise contre trois Mac Donald’s de la région parisienne pour des heures de travail effectuées mais non payées. Non content de nous faire bouffer de la merde génétiquement modifiée, la rédaction du Monde libertaire tient à rappeler à ses aimables lecteurs que cette multinationale est aussi un fieffé exploiteur.


Grève des Télécom aux États-Unis : La mobilisation paie

[ article à récupérer ]


Une nouvelle fédération en Amérique du nord

Malgré la résurgence actuelle du militantisme de gauche radicale et de l’intérêt croissant pour la théorie et la pratique anarchistes, aucune organisation ne s’est constituée depuis la disparition, il y a deux ans, de la fédération américano-mexicaine « Love and rage ». Mais depuis quelques mois, un certain nombre de communistes libertaires du nord-est du continent américain sont en contact pour construire un réseau afin de créer une organisation.

C’est ainsi que la Fédération des communistes libertaires du nord-est (NEFAC, Etats-Unis, Canada) a été constituée officiellement au cours d’un congrès, à Boston (Massachussets) les 7, 8 et 9 avril 2000. Durant ces trois jours, des anarchistes se sont réunis pour discuter de la nécessité d’une meilleure cohérence théorique, de l’unité tactique et de la responsabilité collective à l’intérieur du mouvement anarchiste en pleine expansion.

Malgré les limites du temps, les participants purent rédiger et approuver formellement un document intitulé « Objectifs et principes » en 13 points et ainsi donner l’impulsion première pour une structure organisative interne. Afin de terminer les travaux commencés, un autre congrès devait avoir lieu à Morgantown (Virginie occidentale) en août 2000. La structure de base de la fédération sera constituée de collectifs actifs, groupes affinitaires et individus de la région nord-est qui se reconnaissent dans la tradition communiste de l’anarchisme.

L’activité de la fédération se développera dans trois directions : l’étude et la réflexion théorique, l’agitation et la propagande anarchiste, et l’intervention dans la lutte des classes. De façon générale, la fédération n’a pas été conçue comme une organisation de masse, mais comme un outil au service d’une minorité anarchiste militante travaillant à l’intérieur des mouvements sociaux et des luttes populaires dans un effort de radicalisation, et pour impulser une perspective communiste spécifique au sein même du mouvement anarchiste en général.

Pour concrétiser l’effort de s’organiser indépendamment des barrières linguistiques et des frontières nationales, la NEFAC aura une section francophone et anglophone, dans le but d’unir les communistes libertaires du Québec et du nord des États-Unis. C’est ainsi qu’un groupe québécois et un groupe américain se sont vu confier la coordination jusqu’au congrès d’août.

Sabate anarchist group, P.O. box 230685, Boston, MA02123. États-Unis ; Groupe Émile Henry, CP55051, 138 STVallier O, Québec G1K1J10 Canada.

Relations internationales de la Fédération anarchiste


Une maison de la mémoire ouvrière

Il est peu de lieux où la mémoire sociale et ouvrière trouve refuge sans être tronquée, confuse ou à peine évoquée. L’Écomusée de Lochrist ­ Inzinzac, qui regroupe le Musée des Forges et la Maison de l’Eau, à proximité d’Hennebont dans le Morbihan (56), est à ce titre exceptionnel. Il retrace sur un siècle (1860-1966) l’histoire technologique, sociale et syndicale de ce centre sidérurgique qui emploiera jusqu’à 3 000 personnes.

« Exprimer dans ses profondeurs la vérité d’une expérience humaine, celle du passage de l’homme de la terre au monde de l’usine et de la machine », telle est la vocation de ce musée de l’homme et de son milieu. Implanté dans l’ancien laboratoire des forges, installé sur la rive industrielle du Blavet, « il se veut le territoire d’une communauté où s’interpénètrent les paysages et les mœurs de la campagne morbihannaise et ceux de la cité industrielle des Forges d’Hennebont, où vit une population de souche rurale fortement dynamisée par son engagement dans les luttes syndicales et politiques du mouvement ouvrier français, crûment modelée par l’expérience des travaux du fer et du feu dans les nefs de la sidérurgie, graduellement transformée dans ses comportements et sa mentalité par la vie autour de la citadelle du métal » (1).

La visite commence par la projection de trois films-témoignages sur la vie et le travail dans les forges et se poursuit sur différents niveaux. Les salles sont vouées à trois aspects : historique, technologique, social. L’une d’entre elles et entièrement consacrée à la revendication sociale et l’anarcho-syndicalisme y occupe une place de choix.

Ce musée ethnographique, véritable maison de la mémoire ouvrière, mérite le détour. Il ne se contente pas seulement de retracer l’aventure sidérurgique de la Bretagne mais appelle à une extrapolation plus large, obligeant immanquablement le visiteur attentif à établir un parallèle entre la vie de ces gens entièrement rivés à l’usine, leurs terrains de lutte et sa propre attitude envers des faits qui ne font, hélas, que se répéter.

Martine. — liaison Bas-Rhin

Écomusée Lochrist-Inzinzac, Zone industrielle des Forges, 56650 Lochrist-Inzinzac.
(1) Extrait du Cahier trimestriel de l’Écomusée, nº 1, juin 1983.


Dans le fond des poches

Élisée Reclus, par monts et par vaux

Maître d’œuvre d’ouvrages encyclopédiques, tels la Nouvelle Géographie Universelle, L’Homme et la Terre, disponibles actuellement que sous forme de fragments, Élisée Reclus est un prosographe prolixe. Outre une riche correspondance, une multitude d’articles ainsi que de préfaces malheureusement encore éparpillés, le géographe et libertaire, rédigera le remarquable L’Évolution, la révolution et l’idéal anarchique, publié il y a un siècle chez Stock, dans la fameuse collection « Bibliothèque sociologique » où se côtoient Michel Bakounine, Pierre Kropotkine, Jean Grave, Louise Michel, Sébastien Faure sans oublier Max Stirner, Domela Nieuwenhuis, Lucien Descave ou John-Henry Mackay.

Mais, c’est étrangement dans deux ouvrages, aujourd’hui réédités dans leur version intégrale, que nous pourrons retrouver son profond et fraternel humanisme anarchiste. Histoire d’un ruisseau, paru peu avant la Commune ­ dont la répression lui vaudra bagne et bannissement ­ est l’histoire de l’infini…

Dans la même veine Histoire d’une montagne poursuit un hymne impie à la nature, une invitation à l’anarchie. Loin de tout paganisme, c’est en naturaliste qu’il nous est donné de découvrir la faune et la flore au fil de l’eau. Les constructions humaines ne sont point oubliées tant dans leurs grandeurs au service de chaque individu que dans leurs bassesses flattant le grégaire, en un mot, l’autorité.

Au-delà du géographe attentionné, c’est aussi l’artiste, le poète et par là même l’homme qui nous conte l’évolution et la révolution… « c’est aux sources, aux forêts, aux montagnes qu’a l’origine de toute civilisation les hommes ont dû leurs mœurs et leurs lois… »

Appels aux voyages à travers les temps, à travers l’espace, avec la touche particulière qui rejoint l’universel : en Aragon, avares de leurs eaux, c’est un mortier au vin rouge qu’utiliseront les maçons pour sceller les pierres… ailleurs, sur le continent africain, ce sont les ossements de chameaux qui formeront les parois des puits…

Merveilleux conteur, cette langue délicate et savoureuse nous entraîne hors des sentiers battus découvrir tout un monde de fugitifs, de réfractaires : « les plantes groupées librement… rien d’artificiel ni d’imposé comme dans un régiment de soldats… mais le pittoresque, le charme poétique, la liberté d’attitude et d’allure… »

• Élisée Reclus — Histoire d’un ruisseau ­— éditions Actes Sud. Collection Babel nº 166, 220 p, 39 FF

• Élisée Reclus — Histoire d’une montagne ­— éditions Actes Sud. Collection Babel nº 325, ­230 p, ­45 FF

Brèves poche

Hommage à la Catalogne : 1936-1937 ­— George Orwell — éditions 10/18 nº 3147 ­ 294 p , 47 FF
Arrivé en Espagne au cours de l’hiver 36 en vue de rédiger quelques articles, Éric… Blair, alias George Orwell, s’engage aussitôt dans les rangs trotskistes du POUM. Aucune description des collectivités libertaires, mais un récit poignant des milices… avant le retour au bercail, les pigeons de Trafalgar et d’ailleurs…

Guerre d’Espagne ­— Abel Paz — éditions Hazan. Collection lumières nº 3 ­ 200 p, 75 FF
Plus d’une centaine de photographies : la vie quotidienne, batailles dans la rue, miliciens miliciennes, ruines et cadavres.... En préface, une cinquante de pages : l’adolescence de l’auteur qui croise la révolte croissante d’un peuple muselé… la révolution s’étend… un fédéralisme vivant rassemblant les diverses autonomies…

L’Espagnol ­— Bernard Clavel — éditions Pocket,­ 448 p, 35 FF
Printemps 1939, deux fugitifs catalans échouent dans le Jura… derrière eux, là-bas, le cimetière, c’était peut-être tout le village. Toute la Catalogne. Mais la guerre était là, Pablo la sentait sur ses talons…

Le Kiosque à musique ­— Louis Nucera — éditions Le livre de poche nº 6016, 192 p, 20 FF
De Nice à Montmartre, par le chemin des amitiés. Un soir, frappant la porte comme naguère, reviendra l’anarchiste que personne n’attendait… Ailleurs, c’est le portait d’un bouquiniste la peau tannée par les quatre saisons, aux boîtes pleines de souvenirs. Louis ne reviendra pas, fauché cet été par les moisons de la mort. Il est temps d’en finir ; sans biaiser.

Jean-Denis. — Liaison Bas-Rhin

Les ouvrages cités sont disponibles à la librairie du Monde Libertaire


Au pied du mur

Les éditions de l’Insomniaque viennent de jeter un pavé dans la mare pénitentiaire. Les auteurs ne lésinent pas sur les moyens et envoient les couleurs. Le sous-titre : 765 raisons d’en finir avec toutes les prisons. Le livre est carré dans la forme comme sur le fond. La somme de travail qu’il suppose laisse rêveur. Il a fallu rassembler une documentation colossale, venue du monde entier. Le tour de force du collectif qui a concocté cet explosif est d’avoir réussi à le rendre homogène, alors qu’il fait en matière de taules. Le découpage est intéressant, avec l’histoire, la théorie du panoptique de Jeremy Bentham, la description des divers univers concentrationnaires, les écrits des détenus et les utopies, des prisons anarchistes de 1936 à l’abolition pure et simple de tous les enfermements.

Nous y retrouvons, évidemment, Max Stirner, Zo d’Axa, Alexandre Jacob, Serge Livrozet, George Jackson, Sébastien Faure, Pierre Kropotkine, Louise Michel, Charles Fourier et bien d’autres révolutionnaires. Guiomar Rovira nous y raconte comment, le 2 janvier 1994, au lendemain de la prise de San Cristobal, au Mexique, les guerilleros néo-zapatistes ont libéré les prisonnières et les prisonniers. Les repères historiques de 1790 à 2000 nous permettent, entre autres, d’avoir une liste complète des mutineries des trente dernières années, en France. Tous les écrivains passés par ou nés de la prison se retrouvent aux côtés de glorieux inconnus et d’anonymes révoltés. Nous terminons par les adresses et même les téléphones des établissements pénitentiaires à détruire au pays des droits de l’homme. C’est décidément une anthologie qui ne rate pas son coup, ainsi que le souhaitent les « passe-murailles », en guise de conclusion. Elle convainc de l’indispensable disparition des prisons.

Jacques Lesage de La Haye

Au pied du mur, éditions de l’Insomniaque. 100 FF.


Le Brasier des églantines, Gisèle Le Rouzic

Été 1903. L’églantier de Marie Le Guen fleurit rouge sang. Elle cultive dans son jardinet de la cité ouvrière de Lochrist des plantes médicinales pour soulager les maux et les blessures multiples des hommes et des femmes des Forges d’Hennebont, dans le Morbihan, qui emploient en ce début de siècle jusqu’à 2 000 personnes, paysans sans terre, devenus ouvriers et ouvrières sous la pression de la révolution industrielle du XIXe siècle.

Les conditions de travail et de vie y sont particulièrement pénibles. Des hommes meurent dans des coulées de fer en fusion, brûlent leurs yeux et leur peau dans les brasiers ardents des laminoirs, les femmes, usées avant l’âge, esquintent leur santé dans l’étamerie à force de nettoyer le fer dans des bains de chaux et les enfants, embauchés dès l’âge de 12 ans, pataugent dans des graisses nauséabondes, travaillant au même rythme que leurs aînés 12 heures par jour ou par nuit, avec le dimanche comme seul jour de repos.

Juillet et août 1903, quarante jours de grève vont immobiliser l’activité des forges, catalyser la haine et la rancœur de centaines d’exploités, aiguiser les consciences, renforcer la solidarité entre démunis et créer un immense mouvement de soutien à travers la Bretagne, les ouvriers des arsenaux de Lorient et de Brest devenant solidaires de la grève des forgerons. Gisèle Le Rouzic, à travers ce roman, raconte ces quarante journées de grève de revendication sociale, déclenchée par des manœuvres auxquelles se joignent les gaziers puis la population entière. Les armées de répression venues de toute la Bretagne pour mater l’insurrection ouvrière s’entassent autour d’Hennebont.

Anarcho-syndicalistes et syndicalistes révolutionnaires, communistes et socialistes, bourgeois et capitalistes, femmes en quête d’émancipation et bigotes craintives campent les personnages haut en couleur d’une palette sociale très large. Une histoire d’amour impossible, une description de la Bretagne tiraillée entre une ferveur sacrée et la naissance d’une conscience sociale, la nécessité de prendre sa vie en main, de défendre sa liberté dans le combat quotidien et la nécessité du choix, une lecture pareille ne peut qu’encourager à ne jamais s’avouer vaincu. Elle nous aide aussi à ne pas oublier les larmes de rage et de désespoir, le sang versé sur l’autel des profiteurs de tout poil pour leur arracher le droit à la dignité humaine et en ce sens les combats d’hier et d’aujourd’hui se rejoignent pour se confondre.

Martine. — Liaison Bas-Rhin.

Le Brasier des églantines. Gisèle Le Rouzic. Éditions La Digitale


Guyane : assassinat de Michel Kapel

Le 11 juillet 2000 au lieu dit Degrad Edmond sur la commune de Roura en Guyane, était abattu lâchement d’une balle dans le dos le militant anticolonialiste, anti-impérialiste, anti-électoraliste et avant tout le militant (sans aucune compromission avec l’État français) pour la libération de la Guyane du joug colonial français : Michel Kapel dit Shaka Karebu (délaissant ainsi le nom que les esclavagistes avaient imposé à sa famille).

Certains d’entre vous l’ont rencontré en novembre 1997 à Lyon lors du congrès de l’IFA où il était invité et représentait le groupe No Pasaran de l’ASFALTE (Association fédérative autogérée pour la lutte des travailleurs et des exclus).

Michel Kapel œuvrait depuis février, par le biais d’une association qu’il avait crée (l’ASINJEGDIF AM & TT), pour la réinsertion de la jeunesse guyanaise touchée par la drogue, grâce aux arts martiaux (il était 2e dan de Tae Kwon Do) et le travail de la terre.

Né le 28 novembre 1942 à Cayenne, fils d’un enseignant et d’une employée de commerce, il était diplômé de l’école d’ingénieur des travaux publics ESTP d’Eyrolles et d’une maîtrise de mathématique. Après un bref passage au CNES, professeur de Sciences Physiques, sa pédagogie hors norme dans le cadre colonial français lui valut une « placardisation » très rapide.

Dès sa vie estudiantine il se jette dans le militantisme indépendantiste inconditionnel mais lié à un projet de société libertaire qui très tôt également lui vaudra le rejet de ses camarades qui visaient les postes électoraux que le pouvoir français voudrait bien leur déléguer. Plusieurs séjours en Libye dans les années 80 renforceront sa détermination politique et feront de lui, dans l’opinion publique, un fou dangereux, un violent, bref l’homme à abattre, tant au niveau de l’État que des Guyanais assimilés. Ses activités à travers différents groupes, radios et journaux ne dérogeront jamais de sa ligne libertaire et même ses candidatures aux élections étaient pour lui un moyen de « niquer » l’État en profitant de la plate-forme médiatique pour appeler à l’abstention révolutionnaire, allant même (aux dernières cantonales de 1998) à appeler la désobéissance civile et à brûler des cartes électorales dans un bureau de vote. Ça non plus, l’État ne lui aura pas pardonné. Il venait également de porter plainte contre le préfet, les directeurs de la DRIRE et de la DDE dans l’affaire de l’éboulement d’une colline en avril dernier qui a coûté la vie d’une dizaine de personnes.

Un engagement militant sans concession

Depuis les événements de novembre 1996, d’avril 1997 où les jeunes ont fait une démonstration édifiante sur ce que pouvait être l’action et la démocratie directe, Michel Kapel avait redémarré un combat beaucoup plus radical. Il n’hésitait plus à dénoncer en plus de l’État français, ses « cons-patriotes » (sic Michel) néo-colonialistes avant la lettre, considérant qu’ils étaient complices de la situation dégradante dans laquelle sont plongés les jeunes. Il décriait haut et fort leur « larbinisme » envers l’État, les récupérations politiques et électoralistes sur le dos de la jeunesse, les magouilles du syndicat UTG (dont il sera exclu lors du dernier congrès, et pour cause…), les revirements de certains indépendantistes comme le MDES vers l’autonomie. Par son club de Tae Kwon Do ouvert uniquement aux jeunes des cités et gratuit, il partageait quotidiennement avec eux et leur famille toute leur détresse sociale, n’hésitant pas avec le groupe No Pasaran a effectué des interventions assez « musclées » envers les services de l’État et ses collabos locaux pour régler des situations extrêmes : expulsions d’étrangers illégales, pédophilie, racisme, etc.

Bref adoré par les exclus et marginaux, il était haï par les autres qui n’ont pas hésité, sentant l’impact politique qu’il pouvait avoir en leur faisant ainsi ombrage dans leur course aux bulletins de vote, à commencer une campagne de dénigrement et de tentative d’isolement politique et social qui aura permis son assassinat : « Kapel a pété les plombs, c’est un agent de la CIA, lui l’indépendantiste vit avec une blanche, sa compagne est anarchiste elle est venu pour “foutre le bordel” en Guyane, il dénonce l’État mais ne fout rien à son travail et est payé à ne rien faire avec la bénédiction de ses supérieurs, il ne sait même pas s’occuper de ses enfants car il a un fils drogué, etc. »

Si cette campagne a pu prendre dans les classes moyenne et bourgeoise de Guyane, ceux du ghetto eux ne l’ont jamais lâché.

Il fallait donc l’éliminer physiquement.

L’ASFALTE , NO PASARAN, l’ASINJEGDIF AM & TT et le FULAC

suite dans notre prochain numéro