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éditorial du nº 1701

Le jeudi 28 mars 2013.

TOUS CEUX QUI DE PRÈS OU DE LOIN ont eu à travailler pour un patron savent ce qu’est l’Inspection du travail. Issue des vœux du CNL après la Libération, elle remplit de multiples missions profitables aux salariés : Contrôler l’application de la réglementation du travail lors de conflits collectifs, conseiller et informer les employeurs, les salariés et les représentants du personnel sur leurs droits et obligations. La Direction générale du travail (DGT) doit trancher en matière de harcèlement moral, harcèlement sexuel, discrimination, violence au travail, gestion des grèves, sanctions disciplinaires, conflits en matière de représentants du personnel, etc. Vaste programme !

Chaque département est divisé en sections d’inspection du travail déterminées en fonction des effectifs des salariés. Comme le reconnaît lui-même le site de la DGT, « il est difficile pour un salarié ou un employeur de se faire conseiller dans les meilleurs délais par l’Inspection du travail ; en effet celle-ci ne dispose que de 427 inspecteurs du travail et 815 contrôleurs, soit 1 250 agents de contrôle pour 15 millions de salariés du privé… » Comme on le voit, en cette période de délinquance patronale où l’on profite à qui mieux mieux de la fable de la Crise pour délocaliser, fermer ou déménager à la cloche de bois, la DGT a du pain sur la planche.

Mais c’est encore trop et Jean-Denis Combrexelle, son actuel et inamovible directeur, a su persuader notre ministre du Travail de réorganiser cette entreprise de justice sociale obsolète et coûteuse. Son projet est brutal et significatif : supprimer les permanences locales ouvertes au profit de plateformes téléphoniques centrales et déshumanisées, « éclater » les postes des inspecteurs et contrôleurs du travail, insuffler par le haut des « actions prioritaires » et une « politique travail » par le biais des Direccte — usines à gaz centralisées complètement déconnectées des plaintes des salariés. En clair, rogner l’autonomie des inspecteurs, transformer le service en simple guichet au profit des entreprises et vider de son contenu l’un des derniers remparts à la voracité et au cynisme financier des entreprises.

Ça sent le (Michel) sapin pour la DGT. Le Code du travail est dans le collimateur, ils ont juré d’avoir sa peau. Les décideurs ne s’embarrassent plus de titatas et ne prennent même plus la peine d’avancer masqués. Que les politiciens au pouvoir — qu’ils se disent de « droite » ou de « gauche » — soient les valets crevant de trouille des riches, des banques et du Medef est plus que jamais une évidence. Et, plus que jamais, seule la rue peut en contrer le pouvoir.