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Dominique Lestrat

35e jour de lutte

Le jeudi 25 juin 1987.

Au jour de la rédaction de cet article, Dominique Lestrat en est à son 28e jour de grève de la faim (cf. ML précédents). Celle-ci, commencée le 22 mai 1987 pour obtenir sa réintégration à l’hôpital de jour de Laon, suite au troisième licenciement que lui avait octroyé le 13 mai M. Imbert (directeur du CHS de Prémontré, Aisne), continue malgré le boycott total de deux quotidiens locaux sur trois, malgré aussi la répression exercée sous la houlette de M. Dosière, maire socialiste de Laon, sur les activités du comité de soutien.

Une répression généralisée

Les employés municipaux passent leurs journées à décoller les affiches apposées en soutien à l’action de Dominique, la police municipale retire dix fois par jour le panneau se trouvant dans la rue principale de Laon, à la porte de la Maison des associations, où notre camarade de la Fédération anarchiste du groupe d’Anizy-le-Château mène sa grève de la faim.

Mais la collusion des autorités de tutelle (DASS et préfecture), qui couvrent ainsi et cautionnent les abus de pouvoir du sieur Imbert, et des politicards de bas étage qui flétrissent à qui mieux-mieux la notion de socialisme n’a fait à ce jour que renforcer les activités de la lutte.

À peine décollées, les affiches toujours renouvelées fleurissent de nouveau les murs. Il n’y a plus de permanence d’élus qui ne se tienne sans la visite de membres du comité de soutien. Les notables sont-ils invités à une inauguration d’un centre commercial que des membres du comité de soutien y sont déjà, porteurs de panneaux dénonçant le scandale de Prémontré, distribuant des tracts du comité et du groupe local de la FA.

FR3-Picardie est venue de nouveau pour couvrir l’événement. Le journaliste n’a pu rencontrer que le gréviste de la faim et le comité de soutien. Il a essuyé une fin de non-recevoir de la part du préfet et du directeur de l’hôpital psychiatrique de Prémontré. Le médecin hospitalier, réquisitionné par la préfecture et qui suit attentivement l’état de santé de Dominique Lestrat, a été interdit d’antenne par le préfet. C’est dire la volonté de taire « l’affaire » et l’ampleur du soutien que reçoit Imbert.

Complicité des élus locaux

C’est dire, par la même occasion, la nécessité de la lutte entreprise par Dominique pour faire émerger la justice de ce lieu où administration et élus de tous bords se tiennent bien la main pour « casser » du travailleur. Il faut rappeler aussi qu’en 1981 une enquête de l’IGASS. (Inspection générale de l’action sanitaire et sociale) avait mis à jour des pratiques peu orthodoxes dans la gestion du centre hospitalier de Prémontré, que le directeur de l’époque avait même « été admis à faire valoir ses droits à la retraite ».

Ce rapport, même si des passages ont été cités dans Le Canard enchaîné en 1984, n’a jamais été publié et c’est une arme de choix entre les mains de M. Imbert, nommé justement pour remettre de l’ordre après ce pillage du service public qui avait duré quelque trente ans. En effet, si le directeur de l’époque a été viré, l’administration est restée la même, les élus du département de droite et de gauche, qui en grand nombre se sont succédés dans les différents conseils d’administration de l’établissement, sont toujours sur la scène politique et ils ont pour le moins cautionné par leur silence la gestion frauduleuse de l’hôpital.

La publication de ce document en mettrait plus d’un dans une situation critique et les scandales politiques ne sont jamais bienvenus dans ces milieux de politicards corrompus… il vaut donc mieux se taire pour eux et tant pis pour les travail-leurs qui sont livrés à l’iniquité de ce nouveau despote.

Pour la dignité…

À l’hôpital de Prémontré, les salariés n’ont plus qu’à marcher la tête baissée dans l’attente espérée du départ de ce triste sire. Les syndicats font le mort et attendent des temps meilleurs, des temps où les agents hospitaliers pourront retrouver leur dignité de travailleurs. Les lecteurs comprendront dans ce contexte les enjeux de la lutte de Dominique Lestrat. C’est la lutte du pot de fer contre le pot de terre. Mais c’est aussi la lutte de la justice contre l’injustice, de la lumière contre les ténèbres, de la vérité contre le mensonge, et dans cette lutte les militants anarchistes comme Dominique sont et seront toujours présents.

Gr. Anizy-le-Château