Le 18 juin 1996 les jeunesses des Verts et du Parti socialiste appelaient à un rassemblement, avec le C.l.R.C. (Collectif dinformations et de recherches cannabiques) sur la légalisation du cannabis. Des militants de la Fédération anarchiste (Cf M.L. du 20 juin 1996) étaient intervenus contre cette présence en distribuant entre autre un tract. Si la gauche tentait de récupérer une certaine sympathie existant dans la jeunesse autour de la dépénalisation du cannabis, nous les rappelions " aux bons souvenirs ": " Que les socialistes ne se fassent pas dillusions. Les deux cent mille personnes enfermées durant des mois dans les geôles françaises, les millions dusagers maintenus dans la clandestinité en fumant des produits dégueulasses ne peuvent oublier les dix ans de politique socialiste en matière de drogues ". Certains, dans lespoir de construire une opposition plurielle, souhaitaient, sans trop de succès, nous voir ailleurs : " Vous, les anars, comme d'habitude toujours critiques ". Toujours critiques, mais dune critique lucide qui sappuie sur une analyse du pouvoir et dune société capitaliste et que l'histoire malheureusement confirme. Mais à cette époque, la gauche, avec un pied ferme dans lopposition, ne pensait pas accéder un an plus tard au pouvoir.
Depuis des eaux de répression ont coulé En février 1997, le C.I.R.C. recevait de lourdes condamnations pour lorganisation du 18 juin 1995. En avril 1997 des livres des éditions du Lézard furent saisis par la police (Fumée clandestine, Nouvelles du Front de Jean-Pierre Galland et Les très riches Heures du Cannabis de Phix). Le rassemblement de juin 1997 fut très mouvementé, et le changement de majorité na en rien changé la donne : arrestation de plusieurs militants C.I.R.C. pendant la préparation, interdiction du rassemblement par la préfecture de Paris. Le C.l.R.C. par naïveté et provocation (les deux états desprits y co-existent) s'étonnait au travers dun communiqué de la décision du préfet, prise avec laccord explicite de Jean Pierre Chevènement.
De même, les propos de nos ministres socio-démocrates sont à plus dun titre intéressants et très pédagogiques. Dans le courant du mois de septembre 1997, Mme Voynet déclare dans Charlie hebdo avoir fumé des joints et être favorable à une légalisation de certaines drogues. Mme Guigou, ministre de la Justice, dans une " envolée révolutionnaire notoire " emboîte le pas dès le lendemain : " Toutes les drogues ne sont pas identiques ". Une semaine plus tard, le rouleau compresseur du réalisme socio-démocrate est passé par là. L'électron libre Voynet, après s'être fait rappeler à lordre, ne s'épanche plus sur le sujet. Quant à Mme Guigou, elle sest ravisée et a déclaré officiellement : " La législation actuelle sur les stupéfiants ne sera pas modifiée. ". Le débat, à peine lancé en catimini, est clos ! Cette courte histoire pourrait se raconter comme une fable de La Fontaine où lon rigolerait des éternels revirements des gouvernements de gauche au nom du sacro-saint réalisme.
Mais le rire nest pas de mise. Le mouvement des usagers nest pas en très bonne santé : la politique de répression vis-à-vis du C.l.R.C. porte ses fruits, et lA.S.U.D. (Association dauto-support défendant une reconnaissance des usagers et sattaquant à une politique de prévention) a par moment tendance à sessouffler. De plus les chiffres restent accablants. La France détient le record dEurope de porteurs du V.I.H. avec au moins deux cent mille séropositifs. En 1995, les services de police ont interpellé soixante-neuf mille personnes (une hausse de seize pour cent) dont cinquante mille usagers simples (dont quarante et un mille pour cannabis) mais par contre, comme par hasard, aucun gros bonnet.
Comme nous le rappelions dans le tract cité en début darticle " seule la coordination et lauto-organisation de nos luttes peuvent nous permettre den maîtriser le déroulement et les finalités, que ce soit contre les lois liberticides ou dans la lutte pour la légalisation ". Et ce ne sont pas les propos récents de Madelin (Libération du 17/02/97) qui nous démentiront. Une fois dans lopposition, ce demier prône une légalisation sous prétexte que ces milliers darrestations entraînent des lourdeurs administratives et que des masses financières importantes échappent à l'État et aux capitalistes les plus respectueux du droit. Les propos de Madelin justifient en eux-mêmes linsuffisance de la revendication autour de la dépénalisation. Nous ne voulons pas dune légalisation qui rendrait la drogue à l'état dun simple produit commercial engendrant une plus-value importante. Au contraire nous défendons, au nom des usagers que nous sommes parfois, un système coopératif, seul système pouvant allier qualité des produits et une réelle politique de prévention.
Pour toute info :
Pour toutes infos sur les actions de la F.A. autour du sujet : Groupe F.A. de Nantes, 16, rue Sanlecques, 44000 Nantes.