Martine Aubry veut-elle ajouter un nouvel article au code pénal en créant le délit de chômage ? " Les occupations des A.S.S.E.D.I.C. par les chômeurs sont illégales " a-t-elle déclaré dans sa conférence de presse. Autrement dit : messieurs les C.R.S., à vos matraques !
Va-t-on nous expulser de nos lieux doccupation pour nous faire passer en jugement ? Est-ce donc un délit de revendiquer le droit à la vie par le partage des richesses ?
On attendait dAubry des mesures concrètes pour répondre au mouvement des chômeurs. Elle sest en fait livrée à une agression contre ceux quelle qualifie de délinquants.
Certes madame Aubry a annoncé quelle lâchait 500 millions de francs pour la revalorisation de lAllocation formation reclassement (A.F.R.). Mais à y regarder de plus près, on saperçoit quelle se moque du monde. Ces 500 millions viennent en fait des 2 milliards et demi que Juppé, avec la complicité de Notat, avait sucré sur les fonds de lA.F.R. il y a un an. Mais où sont donc passés les 2 milliards restants ? Par dessus le marché, la restitution de ces 500 millions aux chômeurs (grâce à leur lutte), Aubry lavait déjà annoncé il y a deux mois. Idem pour la revalorisation de lA.S.S. (Allocation spécifique de solidarité), concernant les chômeurs de plus de 55 ans. Ce quAubry présente comme une grande avancée était déjà un projet de Juppé.
Et on remarquera que la ministre sest bien gardée de donner le nombre de bénéficiaire. Rien d'étonnant : compte tenu des critères drastiques quelle impose (40 annuités de cotisations sans périodes de chômage ni de maladie) la mesure ne profitera qu'à 20 000 personnes, soit nettement moins de 1 %. Pour plus de 99 % des chômeurs, la misère restera quotidienne et continuera en particulier de frapper les jeunes interdits de R.M.I. pour qui la survie passe par le S.A.M.U. social, la délinquance, voire même la prison.
Pour qui nous prend-t-elle ? Est-ce avec ces mesures, qui ne sont que des leurres, que le gouvernement espère réduire la fracture sociale si chère à Chirac ? Ce nest pas la première fois quAubry manifeste son mépris envers les chômeurs. Il y a 15 ans déjà, elle avait supprimé lallocation dinsertion alors versée aux jeunes en quête dun premier emploi. Elle prétextait que cela les incitait à la paresse.
Aujourd'hui cest le R.M.I. quelle a dans le collimateur. Son objectif principal est en effet de réduire le nombre de RMIstes en les obligeant à signer des contrats dinsertion. Les RMIstes se verront contraints daccepter nimporte quel petit boulot minable (type C.E.S.) sous peine de se voir radié du R.M.I. Le gouvernement de la gauche plurielle a repris à son compte la vieille manuvre bien connue des gouvernements de droite qui consiste à évacuer à tout prix le maximum de personnes des statistiques du chômage, en les dirigeant, non sur de vrais emplois mais sur nimporte quel boulot sous-payé. Quel peut être lavenir dun " agent dambiance ", dun " médiateur de rue ", dun larbin de policier ou autres emplois-jeunes inventés par Aubry ?
Nous nous battons également pour les salariés, pour tous ceux sur lesquels pèse la menace du chômage ; ce droit acquis le sera pour tous : le chantage aux licenciements ne pourra plus être pratiqué avec la même efficacité quaujourd'hui.
Nous exigeons une prime de fin dannée pour tous et non au cas par cas, ainsi que la création dun guichet unique dans chaque département pour lattribution de cette aide durgence. Aubry tente dopposer les chômeurs en lutte, minoritaires selon elle et dont il conviendrait de " relativiser " le mouvement, à la majorité des chômeurs et des précaires. Nous la prenons au mot et la mettons au défi dinviter les préfets à ouvrir ces guichets. Elle pourra alors se rendre compte par elle-même que la prime de fin dannée répond à une demande réelle et massive.
Nous nous attendons, dans les heures ou les jours qui viennent, à une intervention des forces de lordre dans lensemble des lieux quoccupent les chômeurs.
Nous savons que de nouvelles occupations se préparent, nous savons que la répression restera vaine.
Nous appelons la population à ne pas être dupe des effets dannonce du gouvernement. Nous appelons chômeurs, précaires, salariés à rejoindre et à soutenir les mouvements en cours, à occuper C.A.S., A.S.S.E.D.I.C., A.N.P.E., et autres institutions gestionnaires du chômage, de la précarité et de la misère.