Chaque soir à 21 h 03 part de la gare de Lyon un train à destination de Marseille. Chaque soir il emporte des expulsés qui prendront le bateau à destination des pays du Maghreb, principalement de lAlgérie. Après les actions menées avec succès dans les aéroport parisiens et qui continuent journellement, le Collectif anti-expulsion, créé notamment à linitiative de militants de la C.N.T., intervient depuis plusieurs semaines gare de Lyon pour empêcher le départ du train de la honte. Il a été possible, au début, de bloquer les voies devant le train comme le 23 avril (ou la locomotive ornée dautocollants F.A. et dun superbe drapeau noir témoignait de la présence libertaire) en occasionnant ainsi un retard de 1 h 30. Ce jour là les expulsés étaient au nombre de sept, dont certains isolés dans un compartiment plongé dans lobscurité. Au départ du train lun dentre eux a pu, par la vitre entre-baissée, nous adresser un signe de reconnaissance salué par un long cri témoignant de la solidarité de tous. Mais le renforcement considérable des forces de police nous empêche maintenant doccuper la voie à ce niveau. La répression est dautant plus forte que le nombre de militants du collectif présents sur le terrain est faible; dans ces conditions défavorables des compagnes et compagnons ont été matraqués.
Cest pourquoi les dernières actions ont vu notre nombre croître sensiblement; au soir du 1er Mai, le bruit dun rassemblement à la gare de Lyon ayant circulé tout au long de cette journée, beaucoup de jeunes sy sont joints, et si les quelque 200 personnes présentes nont pu retarder le train, du fait de limportance du dispositif policier au bout de la voie 13, une manif virulente a eu lieu spontanément sur le quai, puis dans toute la gare, avec des slogans sonnant haut et fort comme " étrangers expulsés, étrangers assassinés ", " abrogation des lois racistes, quelles soient de droite ou socialistes ". Lors de la dispersion, quelques distributeurs de billets S.N.C.F. et composteurs ont quelque peu souffert au passage tandis que s'élevait le cri de " S.N.C.F., collabo ".
Le mardi 5 mai, de nouveau, nous étions près de 300 dont une vingtaine de cheminots de S.U.D.-Rail à nous retrouver pour tenter de bloquer les flics escortant les expulsés; là aussi, si nous navons pu atteindre notre objectif, notre forte présence a permis dentraver pendant près dune heure laccès de plusieurs quais, face aux flics, passablement excités qui se sont défoulés à plusieurs reprises matraquant au hasard, bousculant sans discernement manifestants et voyageurs. Mais le nombre et la détermination des manifestants ont fait que ces derniers sont restés maîtres du terrain.
" Gayssot, collabo " a jailli de partout, dans toute la gare, pendant que le train partait avec trente minutes de retard (on apprenait plus tard que plus de la moitié des voyageurs prévus navaient pu monter) et que les syndicalistes de S.U.D.-Rail faisaient savoir que leur action sarrêtait avec ce départ. Cela na eu aucun effet sur lensemble des manifestants et nous sommes restés encore une demi heure lançant des slogans principalement hostiles à la complicité de la S.N.C.F et au camarade-ministre qui en a la tutelle. La dispersion sest faite après un parcours jusque dans le hall principal de la gare. Pendant ce temps le train stoppait quelques kilomètres plus loin, à Melun, attendant un autre train emmenant le reste des voyageurs restés à quai. Il était de nouveau stoppé en gare de Lyon-Perrache vers 2 h 30 du matin par des militants du collectif, et il est arrivé à Marseille avec un retard de 2 h 10 ; auparavant il avait fait un arrêt imprévu à la gare de lEstaque pour débarquer les expulsés afin de les placer au centre de rétention dArenc, la flicaille redoutant laction dautres manifestants présents en gare de Marseille Saint-Charles.
Pour terminer, je reprendrai volontiers ce vieux slogan entendu plusieurs fois gare de Lyon (et ailleurs ) : " Ce nest quun début, continuons le combat ! "