Cela fait maintenant une quinzaine de jours que plusieurs lycéens de la région Languedoc-Roussillon ont cessé les cours et se retrouvent pour manifester leur mécontentement à Montpellier. Leurs principales revendications concernent en premier lieu des manques de moyens engendrant des conditions de travail précaires : classes surchargées, insuffisance de profs, de matériel pédagogique, de locaux. La semaine dernière, 3000 lycéens, rejoints par des enseignants et des parents d'élèves, ont manifesté dans la capitale régionale.
Face aux questions posées, le recteur dacadémie de Montpellier ne répond pas grand-chose. Il propose seulement de répondre à lurgence des revendications par une visite des différents établissements pour recueillir les demandes des élèves, histoire de calmer le jeu.
Seulement
les choses ne se déroulent pas comme il le souhaiterait, la mobilisation reste intacte et
s'étend même de jour en jour. De nouvelles revendications émergent, remettant en
question la présence du F.N. dans les conseils d'établissements et demandant une prise
de position du recteur.
La tension monte et vendredi 9 octobre, certains établissements (Mas de Tesse, Joffre, Clemenceau, Mermoz) ont vu quelques incidents (vitres brisées, dégradation dune cafétéria, etc.). La réaction du recteur ne sest pas fait attendre : il décide de fermer les établissements de Montpellier, Castelnau-le-lez et Lattes jusquau mardi 13 octobre et va même jusqu'à passer des accords avec la préfecture pour autoriser les forces de lordre à intervenir dans les lycées. La démesure des décisions prises par le rectorat et la préfecture pour des incidents somme toute minimes sinscrit clairement dans une stratégie de briser le mouvement des lycéens. Pas de grande surprise, puisque la tactique du gouvernement semble être, comme la rappelé Jospin, de ramener lordre, dexercer un contrôle social toujours plus fort et donc d'étouffer toute forme de contestation, quil sagisse des lycéens, des sans-papiers ou des chômeurs.
Ainsi, face aux revendications, essentiellement dordre matériel, la gauche plurielle préfère le déploiement de force et la répression. En effet, une importante mobilisation de CRS a lieu chaque jour de manifestation à Montpellier, trois mineurs ont été interpellés, des lycéens ont été empêchés par la police de prendre le train pour rejoindre une manif et un sit-in a été chargé par des forces de lordre à moto. À cela sajoute le discours bien connu des médias, déjà trop entendu lors des événements anti-CIP et en novembre-décembre 95, qui veut que les " casseurs " soient des éléments étrangers à la mobilisation lycéenne, qui favorise en cela la division du mouvement et justifie les interventions musclées de la police, pour la plus grande satisfaction du recteur.
Claude Allègre a beau affirmer que cette rentrée 98 sest déroulée sans problème, ses déclarations ne suffisent pas à couvrir la réalité des situations. Aujourd'hui, la mobilisation lycéenne commence à s'étendre à dautres villes dénonçant à leur tour, de manière implicite, les contradictions de l'Éducation nationale (manque de profs mais des enseignants stagiaires et des maîtres-auxiliaires sans affectation, etc.). À nous de dépasser le cadre des revendications matérielles pour reposer la question plus globale de lenseignement et de l'éducation que nous voulons.