Plan bidon pour les lycées

Manifestation lycéenneClaude Allègre est nul en pédagogie mais recordman en démagogie. Champion du monde ! Pour l’esbroufe il ne craint personne, comme l’a montré a souhait la présentation de son " plan d’urgence pour les lycées ", mercredi 21 octobre devant les députés. Même les plus conciliants des lycéens, prêts d’avance à se réjouir des annonces de reforme du papa gâteau Claude, se sentent flouées devant la nullité des propositions du ministre Allègre. Chez ceux, plus militants, qui exigent de véritables changements, la colère s’ajoute maintenant à une détermination toujours présente malgré les discours lénifiants des médias sur l’essoufflement du mouvement et l’arrivée des vacances de la Toussaint, Derrière les grands mots, aucun moyen, aucune idée novatrice, si ce n’est dans le sens d’une précarisation de plus en plus voyante des personnels de l'éducation nationale.

Cause toujours

Avant le plan Allègre, le mot d’ordre dans les lycées était " ferme ta gueule ", maintenant ce sera " causes toujours ". Le ministre appelle cela un progrès de la démocratie lycéenne et annonce avec un aplomb qui tient de l’insulte : " il s’agit d’une victoire pour les lycéens ". Superbe victoire en effet ! Le montant du fond de la vie lycéenne passe de 140 millions à 280 millions… dans un budget qui avoisine les 250 milliard de francs. Dans la même veine, Allègre crée un organisme bidon (purement consultatif bien sûr) : le Conseil de la Vie Lycéenne. Cela va permettre de trouver une occupations aux lycéens trop remuants qui pourrons s'époumoner dans une structure sans pouvoir de décision. De temps à autre quelques miettes devraient même en tomber, concernant les emplois du temps par exemple. Toujours plus fort, une charte des droits et libertés reconnus aux lycéens doit être distribuée à tout élève entrant au lycée. La solennité avec laquelle Allègre a annoncé ces promesses est à la mesure de leur vacuité. Quelle peut bien être, par exemple, la mesure d’importance qui nécessite " qu’un décret en Conseil d'État [fasse] obligation aux lycées de s’y conformer dans un délais de deux mois. " C’est le mandat des représentants élus (et faut-il le rappeler, sans pouvoir aucun) des lycéens qui est porté à deux ans. Étonnant non ?

Précarisation

Il y a cependant plus grave que tout ce vent. En effet, Allègre a profité de l’agitation lycéenne pour faire passer un train de mesures concrètes qui vont sans ambiguïté dans le sens de la précarisation des conditions de travail dans les lycées. Les élèves demandaient plus de profs. Ceux-ci étant fonctionnaires et donc recrutés par concours, la seule solution consiste à augmenter le nombre de postes ouverts au concours. Or depuis plusieurs années c’est le contraire qui se produit. Plutôt que de profiter de la baisse (légère) du nombre d'élèves dans les lycées pour diminuer le nombre d'élèves par classe, les gouvernements successifs ont préférer diminuer le nombre des nouveaux profs. Résultat : les classes sont surchargées et certaines n’ont même pas d’enseignant. La solution d’Allègre consiste à embaucher des précaires en contrat à durée déterminée pour boucher les trous. Ce qui vaut pour les profs vaut aussi pour les autres catégories de personnel. Qu’on en juge simplement par la composition des 14000 " adultes supplémentaires " du plan Allègre : 3 000 surveillants (à mi-temps), 10 000 emplois-jeunes et 1000 appelés du contingent.

Effets d’annonce

Un certain nombre des pseudo-mesures du ministre ne sont en fait que la constatation des faits. Par exemple, Allègre annonce qu’aucune classe de Bac ne dépassera " en règle générale " 35 élèves. C’est beaucoup trop et c’est précisément la situation actuelle dénoncée par les grévistes. Il y a en effet presque toujours 35 élèves par classe. C'était encore il y a quelques jours un scandale, ce sera demain un progrès de la réforme. Les effectifs maximum devraient être de 25 élèves par classe, comme l’avait admis pour le collège la réforme Habby de 1977 (on est revenu depuis sur ce plafond de 25 élèves par classe au collège). Dans la même veine, les 4 milliards de francs " accordés " pour la rénovation des lycées ne sont qu’un prêt aux régions. Les présidents de région, souvent de droite, ont ainsi eu beau jeu de rappeler au ministre que l'État aurait mieux fait de rembourser les 5,5 milliards de francs qu’il leur doit. Finalement, il n’y a absolument rien de positif dans les réformes promises par Allègre et rien non plus qui puisse satisfaire les revendications, pourtant particulièrement légitimes, des lycéens. La seule chose notable c’est la méthode d’Allègre que résume le commentaire de son prédécesseur au ministère, François Bayrou : " Les lycéens dirons si ce dispositif leur suffit. Peut-être avez-vous choisi de laisser s’essouffler le mouvement suffisamment longtemps pour que la réponse soit positive ? ". C’est fou ce que l’opposition rend intelligent.

Franck Gombaud