Depuis maintenant près dun mois, des lycéens descendent dans la rue pour de légitimes revendications. Cette mobilisation croissante a montré que laction collective était efficace pour quon sintéresse de plus près aux problèmes de lenseignement secondaire et ainsi mettre Claude Allègre dans lembarras. Dautres générations de lycéens en ont fait autant avant, preuve que le malaise nest pas nouveau et quAllègre et ses collègues précédents (Bayrou, Jospin, etc.) nont pas accompli leur " travail ". En 1995, 1990, les lycéens manifestaient pour travailler dans de meilleures conditions, en 1994, contre le CIP, en 1986 contre le projet Devaquet, etc. Pourtant les voilà de nouveau dans la rue, les stages bidons et CES prospèrent La sélection scolaire favorise toujours les enfants des milieux aisés et défavorise ceux issus des classes plus modestes. Nous pouvons affirmer que tous les ministres de l'Éducation méritent un zéro éliminatoire, mais surtout quils ne règlent pas ces problèmes, car ils ne sont pas là pour ça mais pour nous persuader quils essayent, bref de gérer tout mécontentement.
Alors ? Le problème est social et politique. Social, car le lycée nest pas un lieu isolé mais un espace et une époque transitoire pour les jeunes avant le monde du travail (salarié et exploité le plus souvent), du chômage ou étudiant. Dans tous les domaines sociaux, lon constate des problèmes : chômage, pauvreté, racisme, pollution, sexisme, etc., et un mal de vivre qui se traduisent par des actions désespérées souvent violentes commises seul ou en groupe. Cest dire que lorsque des " casseurs " se déchaînent, le gouvernement en profite pour diviser le mouvement lycéen, en cela bien servi par les médias. Il ne sagit pas ici dexcuser des actes de vandalisme et dagression, bien au contraire, mais il semble trop simple de condamner, réprimer, diviser sans comprendre la signification, les origines de tels actes. Pourquoi des jeunes cassent ? Non, ce nest pas comme le précisent certains, à cause de la disparition de lautorité. Mais cest lexpression dune révolte irrationnelle causée par un système de domination, dexclusion et dexploitation.
L'école, voilée par lidéologie traditionnelle de l'égalité des chances, tend à faire admettre quelle vient précisément restituer aux étudiants une stricte égalité de conditions et naccorder les succès quaux seuls mérites, mais exclut les classes dominées et renforce la légitimité des inégalités sociales en les convertissant en résultat dune concurrence équitable, se fait reconnaître comme instance légitime dimposition, légitime la hiérarchie des cultures propres à chaque catégorie sociale, exerce une violence symbolique, psychique, et participe à la domination sans violence apparente. Ainsi les enfants des classes favorisées parviennent à l'école en détenant une compétence linguistique, plus proche de la langue scolaire que celle des enfants dorigine populaire. L'élimination scolaire frappe alors fortement ces enfants, ce qui légitime la sélection des enfants des classes privilégiées.
Organisons-nous afin de créer de véritables lieux dapprentissage et de solidarité et non plus de pseudo-savoirs et de compétition légitimant la compétition et la hiérarchie sociale.