Dans le film de Danièle Dubroux « Les Amants », une fille aimante dit à un homme « mais vous navez rencontré que des salopes ! » De la même manière on pourrait penser que Robert sur lequel il ny a rien à dire (« avez-vous un livre sur Robert Desnos ? Il ny a rien ») quil est tombé sur des folles, des mythomanes, des désaxées, en tous cas, quil nest pas gâté de ce côté là. Le seul enjeu intéressant du film semble être le langage. Dans le langage ce sont les filles qui vont loin. Elles sont directes et fort pornographiques. Mais ce déballement, défoulement au niveau du langage très sexualisé où le mot amour nest utilisé que pour mieux couillonner lautre, ne dévoile rien. Il ne fait que jeter un voile très superficiel sur le vide de son entreprise. Pascal Bonitzer est lui-même un intellectuel avec qui il est plaisant de converser, même quand il se cache, mal dailleurs, derrière le cynisme quil affiche. Son alter ego du film nest pas plaisant, même sil est très bien interprété par Fabrice Luchini. Pour quelles obscures raisons cet homme a-t-il besoin de se montrer à ce point indécis, repoussant même, travaillé par la haine de soi ? Effet pervers car son terrain de prédilection, à savoir le langage, en pâtit aussi. Il nest que vaguement amusant de bâtir son histoire sur lincident vrai dun certain Finkelkraut qui avait descendu le film de Kusturica sans lavoir vu.
Ce dont saccuse ici donc Didier Temple (Fabrice Luchini). Cette donnée est utilisée comme malédiction absurde qui sabattrait sur cet homme, si bien quil en oublie le jugement et lentendement. Et surtout elle fait tout le film ! Il nest plus que agitation stérile dans un monde, où personne ne lécoute, car en fait, il na RIEN à dire, car il est discrédité. Même quand il dit des choses vraies et vécues (« mais maman, ca fait quarante ans que tu sais que je ne dois pas manger du sucre ! »), on sen fout. Car il na pas réussi à nous émouvoir. Et on pourrait facilement imaginer que lui, Bonitzer, ricane dans un coin, à moins quil ne pleure de rage que ces cons-là écrivent en plus des merveilles sur son film. Ne serait-il pas en train de courir désespérément derrière le « rien » de Nathalie Sarraute ? Celui qui ne sattrape pas par la queue ?