Italie

Fécondation assistée

Où la loi arrive, s’arrête la liberté de l’individu

Le projet de loi sur la procréation assistée est en ce moment en discussion à la chambre des députés. Ce projet présenté par Marida Bolognesi (D.S.) avait déjà été revu à la baisse, avant d'être présenté à Montecitorio, pour chercher un accord avec la droite : il avait déjà éliminé les femmes qui vivent seules la possibilité d’accès à la seule banque de sperme, il avait exclu aussi les couples homosexuels et les couples formés depuis moins de deux ans. Mais tout ceci n’a pas été suffisant.

Mais le principal scandale a été l’approbation d’un amendement, proposé par la Ligue, mais Alleanza nazionale en avait présenté un identique, qui prévoit la défense des droits de l’embryon, mettant ainsi à bas le pivot idéologique de la loi 194 sur l’interruption de grossesse qui privilégiait le choix de la femme. C’est-à-dire que ce n’est plus la femme qui décide de son propre corps, elle devra apprendre, pour citer les mots de ces nouveaux prêtres " à accepter la vie " c’est-à-dire à subordonner ses propres choix non seulement au mari mais aussi à l’enfant non encore né.Le mouvement pour la vie lui-même n’y était pas encore parvenu ! Si ce projet venait à être approuvé, il y aurait donc deux lois (celle-ci et la loi 194 sur l’avortement) ouvertement en contradiction. De là à proposer l’abolition de la loi 194, il n’y a qu’un pas.

L’accord sur les différents articles de cette loi s’est opéré transversalement aux différentes forces des partis, démontrant encore une fois, si besoin était, que droite et gauche sont des mots sans valeur, démontrant aussi que l’esprit clérical et fasciste est encore très fort.

Aucun combat de liberté ne pourra jamais trouver place au Parlement. Cette loi n’est pas autre chose qu’un contrôle du comportement social, une autre attaque des possibilités pour la femme de décider par elle-même si, quand et avec qui avoir des enfants.

Et qu’on ne vienne pas dire qu’ils veulent nous protéger des excès de la technologie ou du sombre " marché libre ". Les cliniques privées depuis toujours font du profit sur le corps des femmes et des hommes en amplifiant et souvent carrément en inventant des problèmes de santé.

Une alliance droite-gauche

N’oublions pas que le problème de la stérilité a souvent été associé par les médias et par les " études médicales qui font autorité " au mode de vie choisi par les femmes, imputant au fur et à mesure les causes au stress du travail (mais pourquoi ne retournez-vous pas à la maison si vous voulez des enfants ?), aux vêtements trop étroits… N’oublions pas non plus que, d’après des enquêtes effectuées en Grande-Bretagne sur plus de 17 000 femmes, il apparaît que 91 % des femmes sont enceintes après 96 mois d’attente. Mais la stérilité continue à être souvent utilisée comme un autre moyen pour " médicaliser " les femmes.

Cette loi exprime une nouvelle fois la peur qu’a le pouvoir de la force procréatrice de la femme. Le sexe est considéré comme une arme dangereuse, ruine pour la famille, instrument de Satan. Et l’on sait depuis longtemps que les femmes sont des alliées de Satan.

Donc si la procréation devait être une possibilité réservée aux femmes mariées ni trop jeunes ni trop âgées, naturellement rigoureusement hétérosexuelles, elle serait sous le contrôle du mari et de l'État.

Très significative aussi, l'élimination du projet de loi de l’insémination hétérologue (c’est-à-dire avec du sperme donné par un étranger). L’enfant qui naîtra appartiendra au père : donc le père biologique doit être aussi le père légal. L’enfant n’a pas besoin de gens qui l’aiment mais d’appartenir à un père et à une mère " certifiés ".

Une nouvelle fois, par cette loi, l'État veut fixer ce que les hommes et surtout les femmes peuvent faire, ils veulent fixer ce qui est meilleur pour l’enfant à naître, imposer discrimination et contrôle.

Entendre les hommes politiques d’Alleanza nazionale et de la Ligue parler de " nécessité d'éthique " serait ridicule si les conséquences n’en étaient pas ensuite tragiques. Que savent-ils de l'éthique, de la responsabilité ? Ils parlent de respect pour l’enfance, de valorisation de l’embryon et puis ils tolèrent que des milliers d’enfants vivent dans des conditions inhumaines. Ils ne permettent pas aux femmes seules d’avoir " par choix " un enfant d’un donneur inconnu, et ce sont les mêmes qui préconisent que la femme poursuive sa grossesse même si celle-ci est le résultat d’un viol.

Ils parlent de vie en commun comme de situation " d’instabilité ", ils s'étonnent du fait que des milliers de femmes ne veulent pas se marier… L'État ne peut légitimer le fait que l’amour soit un acte libre, aussi parlent-ils de la nécessité pour l’embryon d’un père certifié et d’une mère mariée : l’amour pour eux a besoin d’un tampon officiel.

Cette loi sera certainement approuvée avec ces amendements proposés par la droite car pour l'État, il est hors de question qu’une loi vienne sanctionner la suprématie de la fertilité des femmes. Une loi qui permette à la femme de procréer indépendamment de la présence ou de la fertilité d’un homme à ses côtés. Il ne pourra jamais permettre et légaliser la possibilité de devenir mère de son seul choix conscient.

Encore une fois, c’est seulement avec une large mobilisation des femmes que pourra se construire un mouvement qui rassemble autour de lui tous ceux qui, même de sensibilités différentes, pensent que c’est l’individu qui doit décider de lui et de son destin et qu’aucun Dieu ne puisse décider à notre place.

Parce que l'État italien sera toujours fondé sur la famille catholique mais nous non.

Rosaria
extrait d'Umanità nova