Adaptation
dun livre autobiographique de Brahim Benaicha (éd. Desclées de Brower), le film
Vivre au paradis trouve sa dynamique propre. Il situe son récit dans le bidonville de
Nanterre, raconte simplement les dures journées des manifestations doctobre 1961
où les Algériens manifestaient pacifiquement et silencieusement contre la guerre
dAlgérie et le couvre feu qui leur était imposé. Le lendemain du 17 octobre des
cadavres des Algériens flottaient sur la Seine. Des centaines dAlgériens étaient
emprisonnés et beaucoup de familles cherchent encore les traces de leurs disparus. Ces
événements historiques ne sont pas au centre du film. Boualem Gerdjou sattache a
un personnage, Lakhdar, littéralement habité par Roschdy Zem, à son histoire. Lakhdar
veut faire venir sa famille, trouver un logement décent. Alors quil patauge dans la
boue et habite une baraque sommaire, il croit pouvoir résoudre son problème tout seul.
En contrepoint il y a le portrait de sa femme, venue dAlgérie avec les deux
enfants, dabord déçue et terrorisée gui va finir par sauver tout le monde du
désastre.
Fadila Belkebla joue cette femme blessée et courageuse avec finesse et beauté. Le film met côte à côte des solidarités et des engagements. Il ne juge pas et laisse venir les choix, après avoir traversé les épreuves. Seul le film de Okacha Touita Les sacrifiés avait parlé avec force de ces années noires. Okacha racontait l'histoire de son frère. Dans Vivre au paradis on entre dans lunivers des " frères ". Cest un univers pas toujours fraternel. Lapport du film, basé sur le vécu de milliers de personnes restées anonymes est radicalement contemporain. Ainsi le film apprend aux Français et aux Algériens un pan d'histoire refoulée parce que trop douloureuse.