Un choix qui ne s’est pourtant pas fait
au hasard : depuis le début des années 90 existe à
Spezzano Albanese, 6000 habitants, une expérience communaliste autogestionnaire,
qui aujourd’hui regroupe plus d’une bonne centaine de personnes dans la
Fédération Municipale de Base (FMB), structure qui prit en
charge l’accueil de la foire.
Le débat intitulé «
pour une économie autogérée » se déroula
le vendredi, deuxième jour de la foire, après que de nombreux
groupes de travail destinés à proposer des outils de coordination
des luttes abordées se soient réunis. Animé par des
membres de communautés agricoles autogérées, occupant
parfois des terres laissées à l’abandon spéculatif,
il porta essentiellement sur la problématique agricole et les échanges
non commerciaux de leurs productions respectives.
Le samedi, qui fut le point d’orgue de
la foire, comprenait deux débats, l’un intitulé « Ni
d’église, ni d’État, pour une école publique non étatique
» ; et l’autre portant sur le « Municipalisme : l’autogestion
comme pratique communaliste en dehors et contre la logique étatiste
». Animé notamment par Domenico Liguori, un des militants
à l’origine de la FMB de Spezzano Albanese, il fut d’un intérêt
exceptionnel à plus d’un titre pour tous les militants présents.
Enfin le dimanche matin s’est tenue l’assemblée générale
de la « Fiera », moment décisionnel durant lequel furent
adoptés différents outils destinés à la coordination
de « l’archipel de l’autogestion » (bulletin, serveur Internet).
A noter la sortie, fruit de ce travail, d’un « catalogue de l’autogestion
», petit bottin des différentes expériences autogérées,
comprenant leur curriculum vitae et les services offerts et demandés
par chacune d’entre elles, et qui ne demande qu’à s’enrichir par
delà les frontières. Et comme toute foire qui se respecte,
le reste du temps fut joyeusement occupé au son des concerts, des
verres qui s’entrechoquent, de la corvée de patates ou des chants
qui retentissent aux heures tardives de la nuit.
Alors que de plus en plus, dans l’Europe capitaliste en construction, les « acquis sociaux » dans l’éducation, la santé, les transports, la retraite. sont l’objet d’attaques qui risquent d’en supprimer purement et simplement l’accès à ceux qui ne pourront plus se les payer, toutes les gauches « combatives » des pays de l’Union se contentent de défendre les services publics d’État. Le discours anarchiste ne se borne pas quant à lui à vouloir préserver un statu quo déjà inégalitaire, mais vise à opposer à leur démantèlement une appropriation collective des usagers et des travailleurs de ces services, au moyen de l’autogestion et du fédéralisme, c’est-à-dire sans délégation ni intermédiaires. Les longues années de travail effectuées autour des « foires de l’autogestion » ont cette année à Spezzano Albanese abouti à donner des moyens supplémentaires à la coordination concrète de différentes réalités autogérées de l’Italie, mettant ainsi en actes un embryon de société autogérée. Parce que l’autogestion ça s’apprend, et parce que nous n’avons jamais été des adeptes du « matin du grand soir où ». Un travail qui doit aussi avoir force d’exemple.