Radio libertaire : Quel était
l’objectif de votre action ?
Un militant de la CP : L’action du 12
août contre le Mac-Do de Millau a été élaborée
afin de protester contre un dictât des États-Unis. En effet,
l’Union européenne a décidé de suspendre l’importation
du maïs transgénique, en partie, grâce à la campagne
que nous avons mené. Les États-Unis, ont décidé
(par mesures de rétorsion contre la non-importation de bœuf aux
hormones américain) de taxer à 100 % certains produits dont
le Roquefort. Il faut savoir que ce fromage fait vivre toute la région:
les paysans, mais aussi les salariés des caves coopératives.
De plus, nous avons réussi à ce que ce fromage soit vierge
de tout lait produit avec des brebis ayant mangé des végétaux
génétiquement modifiés.
Nous avons démonté
et non pas détruit un Mac-Do en construction de notre région.
Mais nous voulions aussi aller plus loin, c’est-à-dire porter sur
la place publique le débat sur la qualité des aliments que
les gouvernements et les industriels agricoles veulent nous imposer (paysans,
salariés et consommateurs). Depuis quelques années, les scandales
se succèdent : vaches folles, pollution de l’eau en Bretagne, poulets
nourris avec des boues industrielles, etc. Pour nous ce n’est pas dû
au hasard ou à la malchance, mais au système productiviste.
C’était une action « citoyenne » et non corporatiste
comme le fait la FNSEA.
R.L. : Pourquoi ?
À la Confédération
paysanne, nous pensons que nous ne pouvons pas isoler ce qui se passe dans
notre secteur (l’agriculture) du monde extérieur, les problèmes
sont liés et ont la même origine. La « mal-bouffe »
ou les licenciements dans une usine ont une origine commune : la mondialisation.
Quelle agriculture voulons-nous pour demain ? Quelle nourriture voulons-nous
demain ? Ce débat n’appartient pas qu’aux paysans. Ce sont tous
les citoyens qui doivent décider.
R.L. : Cette guerre économique
ne fait que commencer ?
Une réunion planétaire pour
l’organisation du commerce mondial à lieu à Seattle (États-Unis)
au mois de novembre. C’est donc maintenant qu’il faut mettre la pression,
car bien évidemment ni les gouvernements, ni les multinationales
ne nous demanderont notre avis. Il est nécessaire que salariés,
paysans-producteurs et consommateurs s’allient pour combattre ce processus
dont le seul but est de faire de l’argent ! Par exemple, nous sommes contre
la concentration des terres. Nous préférons quatre fermes
moyennes qu’une seule immense. Nous refusons de produire de la «
merde » (dangereuse pour la santé) pour le plus grand nombre
de nos co-citoyens et des « produits bios et chers » pour une
élite. Nous sommes pour une agriculture paysanne où les paysans
seraient fiers de ce qu’ils produisent.
Les directives, les normes européennes
que nous subissons sont toutes faites pour nous faire disparaître.
Les investissements qu’elles nous imposent sont trop lourds pour des exploitations
moyennes, familiales qui travaillent sur la qualité des produits.
Sur l’élevage, aucune contrainte, ce qui favorise ceux qui donnent
n’importe quoi à manger aux brebis (les farines industrielles).
Par contre sur la transformation du lait en fromage, on nous fait comprendre
qu’il serait plus simple d’utiliser l’eau distribuée par la Lyonnaise
ou CGE déjà aux normes, plutôt que de l’eau source
avec à la clé de multiples contrôles sanitaires à
nos frais. Les normes ne sont pas très efficaces, puisque la plupart
des bavures sont arrivées chez des marques qui les respectent.
R.L. : Vos arrestations remettent
en cause l’action syndicale
C’est aussi une évidence, si après
chaque manifestation ou défilé, l’État arrête
des manifestants et leur demande une caution de 100 000 F, toute revendication
est impossible. Ce d’autant plus, qu’il y a en la matière, deux
poids et deux mesures. Quand le bureau de Mme Voynet est complètement
détruit par un commando de paysans de la Beauce dont on connaît
les revenus, personne n’est arrêté, ni inquiété.
Il faut dire que ceux-ci ne remettent pas en cause le fondement de ce système,
mieux ils le cogèrent, la FNSEA est aux commandes de tous les lobbies
qui sévissent dans le monde agricole.
R.L. : Vous avez reçu des
soutiens de partout…
Oui, cela prouve que nous avons réussi
à mobiliser autour de ce thème en France comme à l’étranger.
Mais nous refusons toute récupération politicienne, malgré
les efforts de certaines organisations d’extrême gauche pour se faire
mousser. À la Confédération paysanne, les responsables
n’ont pas le droit d’avoir de « postes » dans un parti politique
au niveau national et départemental.