Mondialisation des marchés
Nike : la pompe à fric
La petite histoire raconte que Phil Knight
crée sa société en 1962 en important 1300 paires de
tennis du Japon. Dès sa création, la stratégie adoptée
par Nike a été de vendre au prix fort des produits fabriqués
dans les pays à faible coût de main-d’œuvre et en étant
constamment à l’affût de nouveaux lieux de production plus
profitables. En 1980, Nike quitte la Grande-Bretagne pour tout miser sur
la Corée du Sud et Taiwan. Au début des années 1990,
le fabricant lorgne vers la Chine et l’Indonésie où la main-d'œuvre
est huit fois moins chère qu’en Corée.
Esclavagisme moderne en Indonésie
À présent, Nike profite du Salvador,
nouvel eldorado aux portes des États-Unis. L’entreprise fait jouer
sans pitié la concurrence veillant à ce que ses sous-traitants
soient toujours sur le fil du rasoir. Jusqu’à 610 sbires ont été
salariés par Nike en Asie pour délivrer des licences de misère
(acquises mois par mois). Cela en dit assez long sur l’extrême dureté
des conditions de travail et la misère des salaire des ouvriers.
Phil Knight ne fait qu’appliquer les grandes lois du libéralisme
: « Nike n’est pas un fabricant de chaussures. Nous sommes des commerciaux
et des stylistes. En fonction du coût de la main-d'œuvre, nous aidons
nos partenaires à s’adapter dans le pays le plus intéressant
». Dans une lettre adressée en 1996 au New York Times le PDG
de Nike déclarait : « Si nous ne faisions pas assurer notre
production dans les mêmes sociétés à faible
revenu que nos concurrents, nous serions en cessation d’activité
et les 10 000 personnes que nous employons aux États-Unis seraient
au chômage ». Or 3 % du budget marketing de Nike suffiraient
à doubler le salaire des 400 000 ouvriers asiatiques. Cyniques,
ces mêmes apôtres nous ont aussi chanté la chanson des
« cercles vertueux de la croissance » qui allaient enfin permettre
à « ces pauvres habitants du tiers monde » de connaître
les bonheurs des sociétés de consommation occidentales grâce
aux investissements des multinationales. Le dictateur d’Indonésie
a suggéré à la population, au plus haut du marasme
social de la crise de l’année dernière, de jeûner deux
jours par semaine, pour affirmer leur dévotion religieuse et économiser
les réserves de riz. Sans commentaires.
Apologie du sport et de la légion étrangère
Et c’est ce trésor de guerre, cette
marge brut de 40 % acquise sur le dos des coolies, qui permet à
la marque d’investir des sommes colossales dans la promotion de ses produits
via des contrats avec des vedettes. Le premier champion Nike est Ilie Nastase
qui gagne l’US Open en 1972. Au début des années 80, Carl
Lewis neuf fois champion olympique permet à la marque de se développer.
En 1992, Nike s’impose à Barcelone comme la société
de sport. Après les jeux d’Atlanta en 1996, le chiffre d’affaires
de la marque connaît une augmentation de plus de 20 % pour atteindre
33 milliards de francs soit plus que ses principaux concurrents réunis.
Si un patron peut gagner 570 000 fois le salaire de son ouvrière,
un joueur de tennis peut signer des contrats faramineux : André
Agassi en 1996 pour prêter son nom à Nike pendant 10 ans a
touché 100 millions de dollars, somme plus élevée
que ce que gagneront les 12 000 salariés de l’usine Nikomas, en
Indonésie en travaillant 60 heures par semaine. En 1997, dans une
campagne publicitaire destinée au marché français,
Nike fait l’apologie de la légion étrangère. Le spot
met en scène Cantona dans les vestiaires après le match.
Celui-ci, à moitié nu, déclame quelques uns des engagements
relevés dans le code d’honneur du légionnaire. L’entreprise
estime que les valeurs du soldat (accomplir sa mission à tout prix)
font l’écho à sa propre marque.
Pour des millions de jeunes à travers
le monde, Nike s’impose de plus en plus comme le Coca-Cola des équipements
sportifs. Le discours libéral de Nike sur le sport s’appuie sur
l’illusion du fric facile générée chez les jeunes
par quelques stars issues des classes pauvres. Face à un manque
de perspectives sociales émancipatrices, ce type de discours minimalistes
détournent les regards vers des substituts consommables. Dans la
cour de récréation, pas de virgule (logo de Nike), et c’est
la honte… Pour la Mercurial R9 (pour Ronaldo et son numéro 9 commercialisée
par Nike à 649 F la paire) des campagnes publicitaires de plusieurs
millions de francs sont réalisées en direction des jeunes
afin de créer chez eux le bon réflexe d’achat : « Just
do it » !
Bernard S.
Il existe un site Internet « anti-nike
» : http://www.multimania.com/nikles