Circulaire Chevènement

Rafles le retour


Le bras armé du racisme gouvernemental a encore frappé. Le ministre de l’intérieur ne semble pas se satisfaire du caractère systématique et européen de la politique des expulsions. Il se distingue une fois de plus par l’insanité de ses décisions et de ses propos. Dans une circulaire datée du 11 octobre, il exhorte les préfets à plus de rigueur dans les procédures de reconduite à la frontière, selon lui : « près de la moitié des personnes qui n’ont pas été régularisées en 1997 et en 1998 n’ont été l’objet d’aucun arrêté de reconduite, ce qui risque de renforcer l’immigration irrégulière ». Pourtant, et le Monde libertaire s’en est souvent fait l’écho, nombreuses sont les situations inhumaines vécues par les sans-papiers victimes de lois ineptes et du zèle de ceux qui aux frontières ou dans les préfectures les font appliquer au mépris de toute humanité.
 

Circulaire y a rien à voir

Stigmatisant une baisse de 28 % à 20 % du taux effectif de reconduites à la frontière depuis 1997, Chevènement veut faire du chiffre avant de présenter son bilan au parlement, ainsi les derniers mois de 1999 doivent connaître « une augmentation significative du nombre d’éloignements ». Mais là il s’agit d’individus et non de stocks de marchandises. Les flics qui n’en attendaient pas tant auront carte blanche pour multiplier les contrôles au faciès : « vous devez motiver et mobiliser les services de police compétents pour procéder aux interpellations, actuellement en nombre insuffisant ». Quant aux policiers ayant des états d’âme il précise : « les droits (des étrangers) étant mieux assurés, vous devez lever les hésitations qui peuvent accompagner la notification d’une décision de reconduite » Voilà une fois de plus les plates bandes du FN largement parcourues par la gauche au pouvoir. Mais les motivations électorales ne sont pas seules en cause. Les organisations de sans-papiers ont fait remarquer à juste titre, la relative discrétion de la parution de cette circulaire. Sans doute n’était il pas urgent pour le gouvernement de frapper les immigrés, vu la croissance, l’affaiblissement de la droite…

Force est de constater que les mécanismes mis en place, la synchronisation des procédures des différents états impliqués dans la lutte contre l’immigration( les quotas de places pour expulsés dans les transports aériens, la rentabilisation par l’organisation de charters européens qui permettent de rassembler dans un même appareil les expulsés à destination d’un seul pays), toute cette machinerie infernale, doivent pour continuer à fonctionner, bafouer écraser la liberté de milliers de personnes. Plus la machine se structure, plus elle devient indéboulonable.
 

Logiques de guerre

Quand au Kosovo, les victimes d’une guerre ignoble que les racistes de tout poil avaient su préparer, se retrouvent à la rue, on leur envoie Kouchner. Quand en région parisienne des roumains squattent un appart vide on leur envoie des miliciens à la solde des proprios. C’est pourtant bien la misère, produite par les guerres économiques et militaires, qui fait fuir les populations. Souvent la volonté de survivre est telle qu’ils partent au mépris de tout danger. Ceux qui initient cette misère, comme en Afrique où Elf-Aquitaine s’est illustré par son soutien aux pires dictatures, qui accueillent le boucher chinois en grande pompe, sont les mêmes qui assurent le suivi de la répression sur ceux qui veulent fuir leurs bourreaux. Chevènement a donc sans difficulté troqué son uniforme de ministre de la Défense pour celui de l’Intérieur. Après avoir chassé l’étranger de chez lui, il chasse l’étranger en France au nom de la république.


Face à cette situation, les sans-papiers plongés dans des imbroglios juridiques indénouables, ou simplement chassés par une procédure de plus en plus expéditive, ont su réagir et se mobiliser pour défendre leurs droits. Ces luttes ont souvent pris un caractère très déterminé, à la mesure de la détresse des sans-papiers. Aujourd’hui pour que ces luttes prennent un nouveau souffle, un mouvement solidaire et important peut encore faire reculer les États. C’est d’autant plus nécessaire que le gouvernement, discrédité par l’affaire Strauss-Khan, mais surtout par une politique qui ne peut provoquer que le mécontentement, va devoir réagir. Or, on sait qu’un coup d’accélérateur au politiques sécuritaires reste une solution de facilité dont les dirigeants politiques ne savent plus se passer...

Jean. ­ groupe Kronstadt (Lyon)