éditorial
Les alléchants profits financiers que
permettent les performances actuelles de la Bourse ont de quoi faire rêver
le salarié moyen, peu habitué à tant de faste. On
en oublierait presque que ce sont surtout sur les gros capitaux que les
forts pourcentages de hausse agissent. L’une des lois inexorable de la
Bourse, c’est que plus tu possèdes plus tu gagnes. On en oublierait
aussi les cracks boursiers et leur lot de petits actionnaires à
la dérive, ceux-ci sont généralement les moins bien
placés pour récupérer leurs billes avant la tempête.
Une autre loi inexorable de la Bourse c’est que moins tu possèdes
plus tu perds en cas de coup dur.
Et lorsqu’on rend accessible les stocks options
aux salariés, du même coup on apprend qu’elles deviennent
imposables. Et ne nous faisons pas de souci pour les cadres dirigeants
qui s’enrichissaient grâce à de ces placements en or. Ils
ont déjà délaissés ces produits taxés
au profit de « sociétés d’investissement ». Créés
par les entreprises pour être cotées en Bourse, elles ont
pour seule activité un service de placements. Leur destin se confond
donc avec celui de l’ensemble des marchés boursiers et permet actuellement
des profits juteux. Mais Pour le prochain crack on ne pourra pas accuser
les ordinateurs d’être responsable de l’effet de chaîne ! Quant
à la taxation des mouvements financiers internationaux qui affecterait
les États et les grands groupes financiers, elle n’est toujours
pas d’actualité. Petits actionnaires, bienvenus dans un monde de
loups !
Sous couvert de « démocratisation
» de la Bourse, c’est une grosse partie des revenus du travail qui
est censée passer entre les mains des investisseurs. Si la classe
dirigeante (droite et gauche confondues) fait ses choux gras du développement
du petit actionnariat, c’est que plus indolore que les habituelles restrictions
salariales, il permet de rendre disponible aux spéculateurs l’ensemble
de l’épargne salariale. Parallèlement le nombre des entreprises
cotées en bourse augmente régulièrement et rend nécessaire
de nouveaux apports en capitaux. L’enjeu est donc de taille et les petits
actionnaires font les gros profits capitalistes.
D’un point de vue idéologique la promotion
du petit actionnariat est encore plus pernicieuse, car elle vise à
la connivence des classes sociales. Les salariés devraient désormais
confondre leurs intérêts avec ceux de leurs patrons et suivre
heure par heure les cours de la Bourse. Ne faudrait-il pas aussi qu’ils
déplorent pour le rayonnement national, l’absence de fonds de pension
français pour concurrencer ceux des anglais, des américains
ou des japonais. Et pour cela ne faut-il pas un système de retraite
par capitalisation… la boucle est bouclée.
Là où le bât blesse, c’est
qu’au nom de la rentabilité, les salariés associés
au bénéfice de l’entreprise devront assumer des plans de
licenciement et de nouvelles restrictions salariales. Tout ça pour
que leur entreprise ne figure pas sur la fameuse liste noire des fonds
de pension. Ceux qu’on met à la porte ont déjà montré
que cela ne les a pas empêchés de se battre. Chassez la lutte
des classes par la porte elle rentrera par la fenêtre.