Congrès d’un syndicat oppositionnel
CFDT
Le
30 septembre dernier, s’est tenu à la Bourse du Travail de Lyon,
le congrès du Syndicat Commerce et Services du Rhône, le précédant
remontant à 1995. Les commerces et les services, qui représentent
actuellement plus de 4,5 millions de salariés en France, sont un
secteur en développement, avec de gros champs professionnels qui
emploient de nombreux salariés à bas revenus (hôtellerie-restauration
et grandes surfaces par exemple).
Les conventions collectives sont souvent en
retard (43 heures au lieu de 39 dans la restauration) et les conditions
de travail difficiles ajoutées aux faibles salaires induisent un
turn-over important, facilité par toutes sortes de contrats précaires.
Cerise sur le gâteau : il n’y a pas de tradition d’implantation syndicale.
Un bilan positif
Face à cette situation, le bilan de
ces quatre dernières années d’activité du syndicat
du Rhône sont positives. Le syndicat a connu un développement
continu du nombre de ses adhérents (environ 700 en 1995, plus de
1 300 en 1998). Ce développement se traduit aussi par un nombre
important de sections syndicales d’entreprises (une soixantaine), ce qui
fait du syndicat du Rhône le cinquième de la Fédération
des Services CFDT, mais le premier syndicat regroupant les douze branches
professionnelles. En trois ans, de 1997 à 1999, 23 sessions de formation
(de base, CE, CHS-CT) ont été assurées par des militants
du syndicat, suivies par 233 stagiaires sur 740 jours de formation.
Une trentaine d’entreprises se sont mises
en grève (pour certaines plusieurs fois), avec l’appui des sections
syndicales et du Syndicat. Ces grèves ont été souvent
dures, notamment à MacDo Lyon où le délégué
syndical a dû subir une répression patronale féroce,
avec mises en examen et perquisitions. Des conflits ont été
exemplaires, comme aux restaurants de l’aéroport de Satolas où
trois semaines de grève au début de cette année ont
fait plier la direction.
Durant les cinq dernières années,
le Syndicat a géré lui-même tous les dossiers juridiques,
notamment aux prud’hommes : soit 120 dossiers confiés à 3
avocats proches et plus de 200 dossiers suivis par des défenseurs
syndicaux. Le Syndicat a fonctionné et les salaires du secrétaire
et de la secrétaire administrative ont pu être payés
grâce aux ressources générées par les formations,
des 26 % de cotisations des adhérents qui restent au Syndicat et,
pour 13 % du budget, par une contribution de l’Union Départementale
et l’Union Régionale.
Depuis septembre 1996, le Syndicat est ouvert
pratiquement sans interruption de 7h à 19heures du lundi au vendredi.
Le Bureau du Syndicat, composé
de 10 membres élus issus de sections d’entreprises, s’est réuni
deux fois par mois et le Conseil, composé de toutes les sections,
s’est réuni en moyenne quatre fois par an.
Un syndicat oppositionnel
Le Syndicat a participé à tous
les congrès des différentes structures de la CFDT, par des
interventions, des amendements et des contributions. La plus intéressante,
est sans conteste celle préparée pour le congrès de
la Fédération des Services à Toulouse en juin dernier.
Reprise sous la forme d’une brochure, elle met à plat les pratiques
et les dérives de l’équipe fédérale sortante.
Du côté des ressources financières de la Fédération,
il ressort que 28 permanents sur 54 sont payés de manière
occulte par de grosses boîtes du secteur professionnel (Casino, Accor,
Carrefour, Auchan) et plus de 40 % des recettes proviennent du sponsoring
patronal (voir l’exemple de Giraudy dans le Canard Enchaîné
du 2 novembre 1998). Cette collusion de l’équipe fédérale
avec le patronat ne date pas d’hier puisqu’en 1995 elle a créé
la société Chorus (insertion par l’intérim, capital
1 894 000 FF) avec les groupes Accor, Adecco et Messidor ! Pour toute réponse
aux demandes d’explications sur ses comptes, la Fédération
a eu le cynisme de venir contrôler les comptes du Syndicat du Rhône
un mois plus tard…
Les syndicats oppositionnels (Hérault,
Paris, Lyon) se sont vus supprimer les moyens financiers pour leur fonctionnement
et leur développement en provenance de la Fédération.
Avec la complicité de certains délégués centraux
ou nationaux, les côtisations des adhérents des entreprises
nationales sont rapatriés sur les syndicats réputés
être dans le giron de la Fédération des Services.
Bien entendu, c’est dans les entreprises
que la politique de collaboration de la Fédération va faire
le plus de ravages. Ainsi, dans le combat que mène le Syndicat du
Rhône et la section syndicale contre MacDo-Lyon depuis 1992, la Fédé
n’aura de cesse de casser la lutte, en exerçant des pressions et
en essayant de négocier par en haut. Ce fut un échec. Par
contre, l’attitude de délégués centraux dans d’autres
conflits (Ibis, Ikea, Saint Maclou) conduit les sections à se battre
contre les patrons et la Fédé !
Orientations du syndicat
Avec les 35 heures, les sections syndicales
de plusieurs secteurs (informatique, alimentation) se font poignarder dans
le dos par des accords signés au détriment de l’intérêt
des salariés. A la veille du congrès du Syndicat du Rhône,
les informaticiens ont préféré créer un syndicat
Sud-Commerce et Services, rejoint, semble-t-il prochainement par quelques
sections d’autres secteurs. Les sections lors du congrès ont majoritairement
voté pour les orientations proposées par l’équipe
sortante. Pour un syndicalisme en phase avec la réalité des
entreprises de nos secteurs, où les salariés subissent quotidiennement
la précarité, la flexibilité, synonymes de contrats
de travail à temps partiel, de bas salaires et d’horaires en perpétuels
changements. Cette violence quotidienne met en danger la vie familiale
et personnelle et aboutit, dans de nombreux cas, à des arrêts
maladies et à des dépressions nerveuses.
Face à l’augmentation de la répression
syndicale et des pressions diverses, les réponses qui doivent être
apportées sont concrètes et passent par un syndicalisme de
proximité et de disponibilité (maintien des permanences journalières,
des interventions dans les entreprises, l’augmentation de la syndicalisation
et la structuration des sections). Les dossiers de la réforme des
retraites, de la réduction du temps de travail, de la protection
sociale et de la recomposition syndicale vont chambouler le syndicalisme
et le paritarisme en France. Notre action doit être guidée
par la justice sociale, par la solidarité, par la répartition
des richesses et l’efficacité syndicale.
Ricardo. — groupe Kronstadt (Lyon)