Manifestation des mineurs lorrains

De la casse pour des miettes


Le conflit salarial qui a commencé mi-novembre aux Houillères du Bassin de Lorraine, porte sur les augmentations de salaire. En effet, les mineurs se sont toujours mobilisés pour les revendications salariales. Aucune augmentation pour l’année 1999. Si les négociations sur les salaires, bloqués depuis 1998, capotaient, ils passeraient à l’action. L’appel de l’intersyndicale FO-CFDT-CFTC-CGT-CFE/CGC- SA/HBL à la grève générale a mobilisé un millier de mineurs le mardi 30 novembre.
Une première action est menée dès 6 h 30 à la direction des Houillères pour le paiement des journées de grève. Les militants forcent l’entrée de la direction générale mais se heurtent aux grilles qui mènent aux étages. Par les fenêtres du rez-de-chaussée qui volent en éclats, ils parviennent au bureau du directeur des ressources humaines qu’ils vident sans ménagement. Ils regagnent ensuite les 17 bus affrétés par l’intersyndicale pour se rendre à la préfecture de Metz vers 8 h 15. Un barrage de CRS les attend sur le pont. Une délégation intersyndicale est reçue par le chef de cabinet Jean-Pierre Masseret, secrétaire d’État aux anciens combattants et deux députés socialistes du Bassin Houiller.
 

Face à face

Les abords de la préfecture sont barrés par trois voitures de police. Les premiers pneus flambent et une épaisse fumée noire marque le début des affrontements. Les flammes se propagent aux voitures de police utilisées comme barricades. Échange de pavés descellés de la chaussée et de grenades lacrymogènes entre manifestants et policiers. Le face à face dure une quarantaine de minutes. Les masques de chirurgien ne suffisent plus à protéger du gaz irritant. Les mineurs se replient vers la gare SNCF.


Sur le trajet, ils forcent sans en venir à bout la porte de l’hôtel des impôts, puis s’attaquent un peu plus loin à deux bureaux de la Trésorerie générale. Les vitres volent en éclats, des documents sont éparpillés, la porte forcée, les guichets sont mis à sac. À la gare, sur les quais déserts, les grévistes balancent des chariots sur les voies. La SNCF avait pris soin d’arrêter le trafic.
 

Retour dans le bassin houiller

Les syndicats organisent le retour. La direction des Houillères ayant fait évacuer le bâtiment, les mineurs repartent vers Forbach et sa sous-préfecture. Les policiers, dans un premier temps, balancent des grenades légères d’intervention par les fenêtres pour disperser les mineurs. Deux compagnies de CRS venues de Metz rappliquent et avancent en rangs serrés pour verrouiller le quartier. Nouveau face à face, pavés contre lacrymogènes. Le bruit sourd des grenades offensives, la fumée des gaz perturbent sérieusement la sortie des écoles au bout de la rue. Les mineurs battent en retraite vers l’hôtel des impôts où une grande partie des bureaux sont dévastés : ordinateurs, dossiers, armoires, tout y passe. Un véhicule d’un inspecteur de la DRIRE est incendié, des pneus enflammés sont jetés dans le hall d’entrée, le feu prend par une entrée latérale. L’hôtel des impôts est en proie à un début d’incendie. À l’extérieur, le carrefour semble en état de siège : cerné par les feux, bloqué par 200 CRS qui avancent vers l’hôtel des impôts.


12 h 50 : « On en a fait assez aujourd’hui, on rentre » lance un mineur. Les syndicats attendent l’ouverture de négociations aux Charbonnages de France. Si aucune réponse n’est apportée pour sortir de ce conflit, ils envisagent de repasser à l’action. Un déplacement à la mairie de Saint Dié, dont le maire n’est autre que Christian Pierret, ministre de l’Industrie. Ces affrontements ont fait cinq blessés légers.
 

Accord entériné

Le 3 décembre l’intersyndicale des mineurs des Houillères a accepté les propositions salariales avancées la veille par Charbonnages de France, mettant ainsi un terme au conflit. Les propositions faites par Charbonnages de France, si elles restent insuffisantes au regard du mécontentement exprimé, sont néanmoins de nature à régler le contentieux salarial de 1999.

« L’unité et la mobilisation ont payé » concluent les syndicats. La direction de Charbonnages de France avait proposé une augmentation de 41, 66 F brut par mois à partir du 1er janvier 2000, soit une augmentation de 580 F brut par an. Charbonnages de France a également proposé « au titre de l’année 1999 », le versement d’un rappel de 700 F brut payé en décembre 1999.
Pour l’année 2000, l’augmentation de 0,5 % reste acquise au 1er janvier 2000. Une négociation salariale aura lieu fin du 1er semestre 2000 ont souligné les syndicats.


Sur l’intervention des organisations syndicales des Houillères du Bassin de Lorraine, les agents ayant participé au mouvement de grève ne seront pas pénalisés financièrement. Si seule la lutte est payante, le patronat ne reverse toujours que des miettes.

Pierre. — groupe de Metz