La réduction du temps de travail dans la presse

Le piège du cas par cas


Avec la mise en application de la loi Aubry sur les 35 heures, les conflits se multiplient, notamment dans la presse. Les salariés de nombreux quotidiens régionaux et de magazines se sont mobilisés pour tenter de faire peser la balance en leur faveur face aux velléités patronales.


Les employés de « Marie Claire » devaient ainsi s’opposer à des propositions qui à travers la mise en place des 35 heures entend saucissonner le personnel par une application graduée de la réduction du temps de travail. Les patrons veulent aussi faire sauter la semaine de congé au titre de l’ancienneté et appliquer à tous un régime de modération salariale en 2000, le tout sans la moindre embauche. Cependant, les aboutissements de la loi sur les 35 heures semblent contrastés, certains comme à libération ou au Monde ayant réussi à faire tourner les négociations en leur faveur avec des congés supplémentaires et des embauches à la clé.
 

La version salariale

Dans la presse parisienne des discussions ont déjà eu lieu avec le syndicat patronal sur la question de la réduction du temps de travail, révélant évidemment de nombreuses divergences. La première se fonde comme on pouvait s’y attendre, sur le fait qu’il s’agirait d’une loi sur les 35 heures et non d’une loi sur la réduction générale du temps de travail. Or, la presse parisienne effectue déjà la semaine des 35 heures. Ce à quoi peut répondre la circulaire du 24 juin accompagnant la loi du 13 juin, et qui stipule : « L’entreprise dont l’horaire de travail est déjà réduit (en application d’un accord de branche du fait du travail en continu…), peut bénéficier de l’aide à la réduction du temps de travail sous réserve que l’horaire de travail soit effectivement réduit à nouveau de 10 % ou de 15 % pour l’aide majorée ». Il est clair que cette disposition s’applique tout à fait à la presse parisienne, ou " l’horaire de travail est déjà réduit en application d’un accord de branche.
 

La version patronale

Ce n’est pas tout à fait de cette façon que l’entendent les patrons, dont les propositions concernant la presse quotidienne régionale donnent une idée des questions qui seront abordées au niveau parisien. Le « projet d’accord PQD sur la réduction du temps de travail » dispose que « l’organisation du temps de travail sous forme de modulation des horaires adaptée à l’activité des entreprises implique un calcul annualisé de ces derniers, soit une durée moyenne de 35 heures hebdomadaires (hors heures supplémentaires). Les accords antérieurs d’entreprise pouvant être modifiés en conséquence ».


De même, l’amplitude de la journée de travail, actuellement fixée dans chaque entreprise, pourra être modifiée et atteindre 12 heures par jour et 46 h par semaine sur une période de 12 semaines. Autre disposition : « Les personnes embauchées après la signature du présent accord percevront les salaires minima de base en fonction des nouveaux horaires. »


Entre les perspectives peu réjouissantes que nous réserve le patronat et la volonté réelle des salariés que les négociations aboutissent à une véritable amélioration des conditions de travail, ce sont toujours le rapport de force et la détermination des luttes en présence qui pourront faire pencher la balance en faveur des salariés. Il n’en reste pas moins que l’acceptation d’une logique du cas par cas donne globalement l’avantage aux patrons. Ceux-ci ont en effet tout à gagner dans une sectorisation des luttes qui leur permet d’imposer leur volonté dans la majeure partie des cas. Et ce ne sont certainement pas les profits réalisés par les grands groupes de presse grâce à la pub et aux précédentes restrictions salariales qui vont leur faire changer de politique.

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