Bruno Van Peteghem, stewart sur vols
long courrier, vit dans l’île depuis des années avec sa famille
et habite un bungalow sur les hauteurs de Nouméa. Tout autour, d’autres
habitations se partagent la colline. En 1994 la municipalité permet
la construction d’immeubles juste devant leur fenêtres. Ceux-ci sont
bâtis sur une zone maritime appartenant à l’État, sans
autorisation. Une association de défense se créait avec Bruno
pour président et porte plainte. Elle gagne une première
fois, une autre fois en appel et enfin une troisième. Les tribunaux
donnent tort à la municipalité. Le premier adjoint au maire,
Henri Lafleur, administrateur de la société d’économie
mixte qui gère les terrains municipaux, n’en mène pas large.
Ce Lafleur est aussi administrateur de
la Compagnie des Chargeurs Calédoniens, le promoteur. Et surtout
il est le neveu de Jacques Lafleur, le député RPCR et roitelet
républicain de la Nouvelle-Calédonie. Face à la demande
de démolition des immeubles formulée par l’association des
riverains, le pouvoir local grince des dents : il y a trop d’intérêts
en jeu, pas question de céder. Le RPR local s’active.
Le 23 novembre 1998, la voiture de Bruno
prend feu dans son garage. Court circuit des fils de la batterie ? Le 31
décembre 1998, le bungalow de Bruno s’enflamme. Dure loi des séries
? Des voisins voient un individu sortir des lieux quelques minutes avant
l’incendie. Silence radio du député Lafleur et du maire archi
catho de Nouméa, Jean Lèques. Malgré des pétitions,
manifestations et interventions auprès des cabinets de Jospin et
Chevènement, rien ne se passe. Le chef de cabinet de Jospin dira
même à Bruno : « Nous vous comprenons monsieur Van Peteghem,
c’est inadmissible ce qu’ils vous font subir, mais essayez de vous entendre
avec le député Lafleur, c’est un homme incontournable. »
Face à Bruno qui ne lâche
pas, la droite passe à l’offensive. Le député Lafleur
par le biais de son journal (le seul journal local) déverse sa bile
: « Bruno Van Peteghem, je considère que vous n’êtes
qu’un vulgaire procédurier et j’ajoute que je vous prends pour un
petit saligaud ». Les lettres anonymes avec menaces de mort se multiplient,
si bien que depuis le 14 décembre, la famille de Bruno s’est mise
à l’abri au Japon, et lui a demandé une protection rapprochée.
On ne peut douter de la détermination de Lafleur et de ses sbires
quand celui-ci déclare : « je vous rappelle que je n’accepterai
jamais les décisions des tribunaux qui m’obligeraient à détruire
les immeubles ». Souhaitons à Bruno, déjà victime
de la raison d’État, de continuer son combat sans pour autant y
laisser sa peau.