Couverture maladie universelle

La sécu à deux vitesses

Depuis une quinzaine de jours, les médias nous vendent les mérites de la CMU, « avancée sociale majeure » donnant droit à la gratuité des soins pour les 5 à 6 millions de prolétaires les plus pauvres. Dès le mois de mars dernier et les suivants (cf ML 1156 ; 1163 ; suppl. 1181), nous vous avions tenus au courant des arnaques que cachaient le projet de loi. Cette loi est une non-avancée pour les gens que la CMU est sensée couvrir et, plus grave, un véritable recul pour la grande majorité des travailleurs à travers la braderie de la sécurité sociale.
 

L’État fait des économies…

Il est bon de revenir un peu sur cette fameuse couverture. Si elle est sensée assurer une protection aux 150000 personnes qui en étaient dépourvu, elle n’apportera rien de plus aux 2,5 millions de RMIstes et autres ayant droits à l’ancienne aide médicale. Pour les autres, vu que la complémentaire gratuite est soumise à des conditions de ressources suffisamment basses, ça ne changera rien non plus. Pour la plupart, ils n’auront toujours pas d’assurances complémentaires. De plus si l’on sait que le budget de la CMU est comparable à celui de l’aide médicale (9 milliards), on est en droit de s’interroger sur les prestations qui seront réellement données vu que la CMU couvre deux fois plus de personnes. En effet, la CMU sera financée par les mutuelles, par les assurances privées et par l’État à hauteur de 1,7 milliards chacun. Le reste sera payé par la sécu à laquelle on demande pourtant à longueur d’année de se serrer la ceinture sous prétexte qu’elle est déficitaire. Au final, l’État économise quelques 7 milliards de francs.
 

…et solde la sécu

La C.M.U. n’est pas arrivée comme ça. Juppé en a élaboré la constitution dans son fameux plan qui avait, souvenons-nous, jeté des millions de grévistes dans les rues en 1995. Ce plan jamais dénié par les sociaux-démocrates vise à jeter en pâture la sécurité sociale aux investisseurs privés. Seule la partie concernant les retraites avait été repoussée par la fronde ouvrière. Au pouvoir, la gauche plurielle continue de mettre en pièce la protection sociale sans état d’âme. La C.M.U. est une formidable aubaine pour les chacals que sont les assureurs privés et les gestionnaires de la mutualité française. Elle leurs permet d’accéder à la gestion de la couverture maladie de millions de personnes. Le moment venu, ils ne manqueront pas de demander plus…
 

La sécu à deux vitesses

La CMU est en fait la mise en place d’une sécu pour pauvres. Depuis quelques années, le principe d’équité à remplacer celui d’égalité. La mise en place de conditions de ressources, du RMI… consiste à cibler les destinataires des prestations qui étaient initialement dues à tous. Cette logique d’assistance s’est mise en place sous couvert de répondre à l’urgence des situations pourtant créer sciemment par les décideurs et leurs politiques économiques. Cela a également pour conséquence de stigmatiser les bénéficiaires de ces prestations aux yeux des autres travailleurs à qui ont demande de payer toujours plus et de recevoir toujours moins. A ces principes de charité nous devons répondre par les valeurs inaliénables de l’égalité et de la solidarité.


Asphyxiées par les impayés de l’état et des patrons, la sécu a vu la qualité de ces prestations décroître au fur et à mesure de la hausse du ticket modérateur et du forfait hospitalier, du déclassement de certains médicaments… Dans ces conditions, les salariés sont poussés vers le secteur privé pour pouvoir s’assurer des soins de qualité. Si le mouvement social ne réagit pas ou s’il le fait en ordre dispersé comme il le fait actuellement dans de nombreux hôpitaux, la logique étatique ira jusqu’à son terme. La CMU assurera les soins de base aux plus démunis. La masse des travailleurs aura droit à une sécurité sociale privatisée, c’est à dire que la qualité de ses prestations sera proportionnelle à ses revenus.

Hervé. — groupe La sociale (Montpellier)