Champs, usines et ateliers ou l’industrie
combinée avec l’agriculture et le travail cérébral
avec le travail intellectuel de Pierre Kropotkine est paru chez Stock en
1910 et était aujourd’hui, comme d’innombrables textes anarchistes
anciens, introuvable.
Il faut tirer un grand coup de chapeau
à Christian Berst et à Phénix éditions d’avoir
osé la réédition de ce livre et de s’être fixé
comme objectif la mise à disposition (à raison de plusieurs
dizaines de titres par an) du lecteur d’aujourd’hui de tous les bouquins
anars épuisés depuis des lustres.
Cet objectif hier encore impensable (actuellement
on n’imprime pas un livre a moins de mille exemplaires et quand on met
plusieurs années à les vendre cela ne permet pas d’en rééditer
beaucoup) est aujourd’hui possible grâce à une machine. Cette
machine, en effet, scannérise et numérise un texte et peut,
à la demande, imprimer le nombre d’exemplaires voulu. En clair,
avec cet engin, un éditeur opérant dans la micro édition
(100 ou 200 exemplaires d’un titre vendus par an) peut désormais
imprimer en fonction des commandes qui lui sont adressées et échappe
aux pesanteurs de la gestion des stocks et d’un investissement financier
mettant trop de temps à s’amortir.
Restait néanmoins à tenter
l’aventure. C’est fait et c’est peu dire que nous nous devons de tout faire
pour qu’elle continue.
Ce livre de Kropotkine est ce qu’on appelle
un classique. Une œuvre majeure de la pensée anarchiste, si vous
préférez.
C’est un bouquin qui est, bien évidement
daté, mais dont l’architecture théorique n’a pas pris une
ride. À l’heure de la mondialisation, de la division internationale
du travail et d’une interdépendance des économies basée
sur des hiérarchies de toutes sortes (et donc sur une dépendance
accrue des plus nombreux par rapport à une minorité) on ne
se lasse pas, en effet, de lire un Kropotkine nous expliquant que l’organisation
économique du monde doit reposer sur des échanges entre égaux,
c’est-à-dire entre pays, nations, régions… bien assis sur
un maximum d’autonomie en matière agricole, industrielle ou autre.
Et que ces échanges entre égaux qui développent des
relations de complémentarité et d’entraide passent par une
éducation intégrale tordant le coup à une division-hiérarchisation
entre l’intellectuel et le manuel. Ajoutons à cela que Kroptkine
écrit simple et clair, que ce livre est d’une très belle
texture, et on aura compris que c’est véritablement bonheur que
de s’y plonger.
Évolution, révolution et
idéal anarchique (reprise de l’édition de 1898) d’Elisée
Reclus (2) et Au café suivi d’Entres paysans (reprise des éditions
de 1921 et 1911) d’Errico Malatesta (3) viennent d’être réédités
dans la foulée de Champs, usines et ateliers, et c’est du pareil
au même. Bonne lecture à vous, donc !