FAIT D'HIVER
Le sport en rouge et noir
Amélie qui rit, Martina qui en rabat,
Dugarry qui pâlit, Benarbia qui n’en fait pas un plat, Monaco qui
trône, Lyon qui traîne, Marseille qui sombre, Montferrand qui
décroche l’Europe, le rugby Oléron club qui doit annuler
son déplacement pour n’avoir pu réunir que 11 joueurs… ça
n’est pas le genre de ce journal de vous causer de ça. Chez les
zanars, en effet, comme chez les gauchos et les intellos, il est de bon
ton d’être antisport au motif que… Et c’est vrai que les motifs ne
manquent pas.
Un vedettariat éhonté, quelques
fronts bas qui gagnent surtout des sommes astronomiques, des gangs de malins
qui en gagnent encore plus sur leur dos, des mafias qui achètent,
vendent et profitent de tout, des foules fascisantes qui beuglent à
qui mieux mieux, des supporters tarés toujours prêts à
s’entre-tuer, des médias de merde qui caressent la bête dans
le sens du poil et en rajoutent toujours trois louches, le culte de la
force, du vainqueur à tout prix, de la compète… on aurait
envie de dégueuler à moins ! Mais dégueuler quoi ?
Le sport ou une conception capitaliste du sport ? Le peuple et son rapport
de toujours au physique ou des masses abruties par un système ?
Avant la révolution, au début
des années trente, mon beau père ou l’un de ses frères,
jouait au foot dans un grand club de Barcelone et, reversait les primes
qu’il touchait à la CNT Le rouge et le noir sont les couleurs de
centaines de clubs du sud-ouest et d’ailleurs parce que ces clubs de sport
ont été fondés par des associations ouvrières
tatouées à l’anarchosyndicalisme. Nos camarades sénégalais
d’AUPEJ organisent des tournois de foot alternatifs gratos qui font un
tabac et pas un rond. Mon vieux pote Babar et moi-même, parce qu’on
est des fils du peuple et que le tennis et le cheval c’était pas
de notre classe, on a tapé dans le ballon jusqu’à tard…
Mais, pourquoi j’vous cause de tout ça
?
Peut-être parce que la tempête
me prive toujours de téloche, que ça ne me traumatise pas,
que je n’ai jamais eut la révolution triste, que je crois en une
école comme en un sport populaire, c’est-à-dire fondés
sur d’autres valeurs que celles d’aujourd’hui, que je me méfie des
aristos qui s’la jouent grande dame par rapport à la sueur des manants,
et que j’ai dans l’idée, lors du prochain congrès de la F.A.
d’organiser un match de foot entre les vétérans de l’anarchisme
et les jeunes loups de ce même anarchisme, histoire, tout simplement
de gagner un combat perdu d’avance. Ils vont nous en mettre dix ou quinze.
Ils ne nous feront pas de cadeau. Il n’est pas impossible qu’ils pensent
avoir gagné !
Jean-Marc Raynaud