Paritarisme : le chantage patronal

Virons les patrons et vive l’autogestion !


Coup de bluff ou avertissement solennel ? Le MEDEF, à l’issue de son assemblée générale du 18 janvier, a annoncé qu’il quitterait l’ensemble des organismes sociaux (sécurité sociale, caisses de retraites complémentaires, assurance chômage) le 31 décembre au plus tard. Cette intention est assortie d’une condition de « remise à plat » des organismes sociaux, dans le but d’« une refondation de la protection sociale ». Le discours patronal met alors en évidence la déficience de ces organismes, qu’elle voudrait « plus efficaces et moins coûteux ». Parmi les résolutions adoptées par l’assemblée générale patronale, il y a la résolution n°6 sur l’UNEDIC qui commande de négocier une nouvelle convention en « assurant un strict respect de la maîtrise des coûts, et renforçant l’incitation à la recherche effective d’un emploi ». Dans cette même résolution les patrons rassemblés proposent aux autres partenaires sociaux de « définir les bases d’une nouvelle architecture de l’assurance maladie […] visant à en améliorer le rapport coût efficacité. » Une table ronde est convoquée le 3 février par le MEDEF et qui devrait rassembler les organisations syndicales cogérant les caisses sociales. Il ne manquera que l’État, dernier larron qui complète le tableau du paritarisme français.

Comme on pouvait s’y attendre, les centrales syndicales ont réagi vivement à ces menaces. Il est évident que le MEDEF cherche à reprendre l’initiative. Surfant sur un malaise réel, le baron Seillières tente de libéraliser la santé, les assurances chômage ou retraites sous couvert de modernité. Ces libéraux dirigent d’ailleurs leurs attaques contre l’État qu’ils accusent de « recherche constante de domination des partenaires sociaux par l’État et par la loi » et à qui ils veulent faire payer les 35 heures.
 

Le paritarisme à l’épreuve de la mondialisation

Le paritarisme est issu de l’époque de la reconstruction d’après guerre ; le capitalisme français sous la poussée populaire et désirant acheter la paix sociale dans la perspective d’une reprise économique durable, avait accepté cette cogestion des organismes sociaux. Il s’agissait là d’une forme aboutie d’un traitement de la question sociale qui s’insérait dans la gestion social-démocrate du capitalisme. Pour ne plus exacerber les clivages employeurs-salariés, le paritarisme devenait une clé de voûte du système politique français. Mais les doctrines idéologiques ont changé, l’État est honni par ces libéraux qui s’en sont servi et le font encore (primes diverses, aides à l’emploi, crédits d’impôts…). La concurrence, en se mondialisant, devient rude et l’on cherche à réduire les coûts sur les salaires, et les charges sociales. D’où les assauts répétés des patrons.

La manœuvre patronale fera-t-elle long feu ? Les tables rondes et négociations diverses qui vont débuter le 3 février seront sans doute décisives. Décisives, car elles risquent, si l’on évite le clash, de subir la pression et donc sans doute d’accentuer encore l’intolérable : nouvelles baisses et dégressivités de toutes les allocations et pensions. En fait, quitter les centres de gestion sociale reviendrait, pour le MEDEF, à renoncer au compromis social-démocrate dont il est un des acteurs essentiels. Cela reviendrait aussi à renoncer à sa représentativité et à la légitimité qu’il en tire, cette hypothèse est donc peu crédible.

Nos camarades du groupe La Sociale ont déjà dit ici qu’il était important que les usagers se réapproprient vraiment leurs caisses à vocation sociale pour ne plus les laisser aux mains des politiciens et des patrons qui n’arrêtent pas de raboter nos droits et nos conditions de vie (1). Alors, à l’occasion de la proposition du MEDEF, proposons que les patrons soient virés des organismes paritaires par les chômeurs, les travailleurs et les retraités, victimes du chantage patronal permanent consistant à faire baisser le niveau des rémunérations. Remettons en avant nos mots d’ordre d’élection et de contrôle réel (gestion directe) des mandatés aux organismes d’entraides, et d’égalité des droits sociaux pour les hommes, les femmes, les sans-papiers… de réapropriation et de distribution égalitaire des richesses. En attendant ce moment-là, s’il arrive, faisons savoir au MEDEF que s’ils veulent partir, on est d’accord ! On s’occupera de tout ! Il ne restera plus qu’à les virer des entreprises.

Daniel. — groupe du Gard

(1) Ces articles avaient été publiés quelques semaines avant le scandale des détournements effectués par des représentants syndicaux et patronaux de la caisse de retraite et révélé par Le Monde. Ce qui valide la notion de contrôle des mandatés par les usagers plutôt que par les bureaucrates.