FAIT D'HIVER

La haine

Ils crèchent, zonent, squattent, dans des banlieues, des quartiers, des cités… où c’que c’est généralement blême, morose et rarement rose. Ils en sont à la deuxième génération de rémistes, de chomdus, d’alcolos et de paumés et ils savent que… Ils s’appellent Rachid, Moussa, Pierre, Paul, Jacques et ont la galère tatouée au cœur de leur origine sociale dont il est aisé de convenir qu’elle n’est pas franchement favorisée.

Comme beaucoup de pauvres, aujourd’hui, ils sont attirés par les lumières de la ville. Ils ne pensent qu’aux thunes et comme tous les riches, ils sont prêts à tout pour en avoir et montrer qu’ils en ont. Et, donc, ils dealent, rackettent, braquent des vieilles, s’attaquent aux plus faibles d’entre eux… pour se la jouer bourge, marques, téléphone portable… au grand théâtre d’une frime qui ne trompe personne.

Par ennui, désespérance, révolte, ils s’imaginent qu’en caillassant les chauffeurs de bus, les pompiers, les flics ou en faisant régner la terreur dans une école qui n’a jamais été faits pour eux…, ils niquent cette société qui les rejette. Ils ont la haine. Et c’est peu dire qu’ils ont cent mille raisons de l’avoir.

Mais ils n’ont que la haine. Celle de l’autre comme celle d’eux-mêmes. Celle que les maîtres du monde leur ont mis dans la tête, à la manière d’une laisse, pour mieux les tenir par les couilles de l’adhésion aux valeurs de merde (le fric, la loi du plus fort, le paraître, le machisme, le chacun pour soi) qui fondent leur domination sur le plus grand nombre. Mais, tu sais tout ca !

Que c’est pas en copyrant les maîtres du monde et en mordant le facteur qu’on échappe à son « destin » ! Que c’est pas en s’attaquant aux pauvres qu’on emmerde les riches. Que c’est pas en voulant devenir riche qu’on cesse d’être pauvre. Que c’est pas en étant haïssable qu’on peut se faire aimer ! Que c’est en se battant contre les causes qu’on en réduit les effets. Que le maître n’existe que parce que l’esclave est persuadé du bien fondé de l’esclavage et s’imagine qu’il est susceptible d’en profiter… un jour !

Tu sais tout cela. Que ta haine n’est que le cache-sexe de ta lâcheté. Et que si t’en avais (du cœur), tu saurais la faire aimer.
Alors, n’es-tu capable que d’être un enfoiré comme les enfoirés que tu dis haïr et que tu ne fait que copyr, ou bien…
La réponse t’appartient ! Et tu nous lâche la grappe avec ta haine… qui est aussi la nôtre !

Jean-Marc Raynaud