Valeo « rationalise »

6 000 emplois supprimés cette année !

Valeo est une multinationale, une entreprise de sous-traitance du secteur de l’automobile. Ce groupe industriel s’est spécialisé dans la conception, la production et la commercialisation de composants électriques. Implanté dans 20 pays, Valeo possède « 113 usines, 35 centres de Recherche développement et 10 centres de distribution ». Noël Goutard, le patron de Valeo, est présenté comme un des « premiers équipementiers mondiaux ». En 1998 et 1999, le chiffre d’affaires réalisé par le groupe a plus que doublé. Les résultats pour l’année passée s’élèvent à 3,7 milliards de francs, une croissance de 117 % par rapport à 1998 ! Dans le monde, 51 700 personnes sont salariées du groupe dont 19 000 en France. Certaines coûtent cher. Le conseil d’Administration de Valeo, réuni le 31 janvier dernier, a décidé la suppression prochaine de 6 000 emplois en Europe de l’Ouest et aux États-Unis. Motif : il faut « accélérer la rationalisation du groupe » (sic). Des emplois seront créés ailleurs, là où la main-d’œuvre est moins chère : Pologne, Hongrie et Mexique…

Noël Goutard n’a pas d’état d’âme. Il assume son rôle et sa place dans l’économie de marché. Pour lui, tout se résume à une question d’argent et de profits. Aux États-Unis, en Europe de L’Ouest, en France… le coût du travail est trop élevé, « les charges et les taxes ne cessent d’augmenter. Plus la législation est rigide et coûteuse à mettre en œuvre, plus les entreprises s’affaiblissent par rapport à la concurrence internationale », précise-t-il, dans un entretien au Figaro… Dans la lignée des Michelin et consorts, c’est avec une morgue certaine qu’il explique et expose ses projets. Interview dans le Figaro le 1er février, article dans Libération le lendemain, publicité pleine page ou presque dans Le Monde, le même jour ; les médias aux ordres savent donner toute leur place à ce type d’individus sans scrupules dont le vocabulaire est à lui seul un condensé de la pensée capitaliste. Dans la pub du Monde, le président de Valeo s’auto-félicite et commentant ses décisions, il se réjouit du « fort développement » de son groupe. Les termes employés dans ce texte sont tous du même acabit : stratégie de croissance, rentabilité, ressources nécessaires, réussite, capacité, résultat, action, performances… En quelques phrases, tout est dit…

Apparemment, les futures réalisations du PDG n’ont pas bouleversé la Bourse. Malgré l’annonce des licenciements, les projets de délocalisations, la mise en place d’un nouveau plan de stock-options pour les 800 cadres de l’entreprise, la redistribution des dividendes aux actionnaires,… l’action Valeo continuait de chuter. En une journée, la semaine dernière, Valeo perdait 9,9 %… L’explication est simple. Selon les financiers, experts es-capitaux, Valeo ne fait pas le poids. Dans le monde des requins, Valeo n’est pas le plus gros. Sous-traitant de l’automobile, le groupe n’est pas maître du jeu. Si l’entreprise réalise des marges bénéficiaires, les constructeurs automobiles exigeront qu’elle baisse ses prix. En d’autres termes, plus Valeo licenciera ou délocalisera, plus Renault ou Peugeot gagnera de l’argent. À ce petit jeu du « qui gagne, perdra», au bout de la chaîne, il y aura toujours les mêmes vaincus. Cette année, ils seront 6 000. Six milles chairs à produire, un peu trop coûteuse au goût des financiers. L’horreur capitaliste !

Alain Dervin. — groupe P. Besnard