Les assureurs aiment les tempêtes

Après la tempête que nous avons essuyé en décembre dernier, ne pleurons pas sur le sort des pauvres assureurs ni sur celui de leurs amis réassureurs. La SCOR affiche après le sinistre l’espoir d’une rentabilité d’au moins 10 %. Et pour l’an 2000, une progression de 20 % de son chiffre d’affaire ! Axa, premier assureur français, ne se retrouve pas sur la paille après le sinistre du siècle : en plus des profits annexes que nous expliquerons plus tard, sa Majesté est bonne : Sire Axa est prête à rembourser les antennes, portails et autres hangars balayés par les vents et que ne sont pas couverts par les contrats d’assurance classiques.

Pourquoi tant de prodigalités me demanderez-vous ? Tout simplement parce que l’addition sera très diluée, entre de multiples acteurs du marché de l’assurance. Pour une simple collision entre deux avions, entre 500 et 1000 assureurs sont concernés. Un spécialistes des assurances au ministère explique : le surcoût des tempêtes fera peut-être trébucher les petites compagnies, mais il permettra aux plus robustes d’agrandir leur part de marché. Nous voilà rassurés, et bien réassurés !
Car il y a une astuce ! C’est beau le monde de la réassurance, c’est beau le capitalisme : l’astuce consiste à faire appel à la Caisse centrale de réassurance (CCR), faux nez de l’État, pour tout remboursement dépassant un certain montant de sinistralité. Cette caisse, et elle seule, paie l’essentiel des dégâts. Un fonctionnaire de Bercy avoue d’ailleurs que, c’est la CCR qui écope de tous les coups tordus, inondations, glissements de terrains et autres tempêtes.

Mais ce n’est pas grave (rien n’est grave d’ailleurs dans le beau monde du bon argent) : la Commission de contrôle des assurances nous rassure : les finances de l’État (les nôtres) verseront discrètement une aide dans les mois à venir à la CCR. Autrement dit, Robin de l’État vient au secours des assureurs avec les impôts des assurés (c’est-à-dire nous). Et si tout ce mic-mac ne suffit pas pour régler l’addition, il reste une solution à laquelle les assureurs pensent mais qu’ils n’ont jamais avoué : augmenter les cotisations des assurés !

Ni vu ni connu, je t’embrouille, c’est lui qui paie et c’est aussi facile à comprendre que de signer un contrat multirisque habitation et de signer là où l’on nous dit de signer, pour nous protéger. Tout au bonheur de ces messieurs, qui espèrent dynamiser de la sorte leurs courbes de profit ! Ai-je été assez clair ? Sinon, je peux vous l’expliquer plus en détail : j’ai travaillé dix ans dans une petite compagnie de réassurance qui m’a laissé sur la paille l’hiver dernier. Elle a emmené mes patrons repreneurs vivre une vie tranquille sur des côtes plus clémentes, du côté des alizés… Je pourrais donner des cours particuliers à ceux qui ignorent encore comment les gros réassureurs s’y prennent pour nous arnaquer, nous, leurs petits assurés ! Mais j’ai d’autres chats à fouetter !

Patrick. — Claaaaaash, Paris 11e