éditorial
Les émeutes racistes d’El Ejido la
semaine dernière dans le sud de l’Andalousie, ont contraint les
immigrés marocains à la fuite, seul moyen d’éviter
la folie meurtrière qui s’abattait sur eux à cause de l’assassinat
d’une espagnole par un déséquilibré marocain. Les
autorités locales par démagogie électoraliste ont
laissé se propager la violence aveugle. L’Espagne, terre d’immigration
récente (début des années 90) rentre à son
tour dans le cercle morbide de la répression anti-immigrés,
des politiques sécuritaires et du contrôle des frontières.
Elle s’inscrit en cela dans l’Europe forteresse,
produit politique d’une banalisation du racisme. La droite et les socio-démocrates
n’ont fait qu’entériner une partie du programme des partis d’extrême
droite, lesquels s’en trouvent confortés idéologiquement.
Pourtant les dirigeants de l’Europe des flics ne sont pas dupes de leur
propre politique. Loin de « l’immigration zéro » qu’ils
n’hésitent pas à prôner pour couper l’herbe sous le
pied (électoralement et provisoirement) aux fascistes, ils savent
au contraire qu’un flux d’immigration contrôlé sert l’économie
des profits. Ainsi l’Italie prévoit l’entrée de 63 000 immigrés
sur son territoire cette année, la Belgique étudie la régularisation
de 40 000 sans-papiers. En France, Juppé à reconnu que l’immigration
était nécessaire.
Alors, c’est bientôt l’ouverture des
frontières ? Loin de là ! Car s’il est évident qu’une
main-d’œuvre immigrée permet de maintenir la pression sur les salaires,
il faut pour que cette pression soit efficace, que les immigrés
se trouvent dans une situation difficile. Sans-papiers, sans formation,
sans maîtrise de la langue, sans un sou et sans soutien ils deviennent
les cibles rêvées des exploiteurs qui font ainsi l’économie
d’une délocalisation.
L’espoir d’une vie meilleure, pour laquelle
meurent chaque année des centaines de Marocains dans le détroit
de Gibraltar, n’est pas au bout du chemin. Ceux qu’on qualifie parce qu’ils
n’ont rien : les « sans », viennent peupler des banlieues où
le chômage et la désillusion mènent souvent à
des actes désespérés et aux geôles républicaines.
Seules des luttes déterminées
et solidaires ont permis à quelques-uns de franchir un pas vers
une dignité retrouvée. C’est un combat toujours à
recommencer, car pour des régularisations au compte goutte ce sont
des centaines de milliers de clandestins qui chaque année risquent
tout pour franchir les frontières de l’Europe. Mais chaque bataille
qui sera gagnée, à Saint-Ambroise ou partout en Europe donne
un espoir à ceux qui restent dans l’ombre.