Pour la liberté d’expression

Abrogation de l’article L630

« Légalisons le débat », tel est le slogan de notre dernière affiche fédérale sur les drogues : tout simplement parce que la loi interdit tout débat objectif. La valse des procès est tout simplement impressionnante et illustre un acharnement à peine imaginable. Pour évoquer cette réalité, le CIRC (Collectif d’Information de Recherche Cannabique) organise une tournée de concert : Rennes dans un premier temps le 26 Février puis au mois de Mai : Toulouse, Marseille, Montpellier, Lyon, Lille, Paris… (1)

L’article L630 condamne toute « présentation des drogues sous un jour favorable » ou « l’incitation à la consommation » alors même que « cette provocation n’a pas été suivie d’effets. » La sanction pénale peut atteindre 5 ans d’emprisonnement et 500 000F d’amende. Votée un 31 décembre 1970, la loi sur les stupéfiants a non seulement causé l’enfermement de dizaines de milliers de personnes mais elle interdit en toute impunité la liberté d’expression. En matière de drogues, inutile d’invoquer de faux prétextes type « perturbation de l’ordre public », le seul fait d’évoquer objectivement le sujet peut suffire pour s’attirer les foudres de la justice : t-shirts, pin’s… sur les marchés constituent la plus grande partie de la jurisprudence.
 

Une répression sans répit

Mais l’article L.630 s’est aussi attaqué à la presse. Dans les années 70, Libération a connu des condamnations à répétition et plus récemment c’est l’Éléphant rose et Fais nétour qui ont dû arrêter leur publication suite a de lourdes amendes et toujours au nom du L.630. Et au-delà de la presse, depuis 5 ans c’est l’ensemble du milieu anti-prohibitionniste qui est dans le collimateur de la justice. C’est le CIRC qui été poursuivi pour la 1re fois en 1995 suite au rassemblement du « 18 Joint ». Cette date sonne le début d’une série impressionnante : des rassemblements à Nantes, au Mans, à Tours, Toulouse, Lyon, Paris (5 fois), Lille seront interdits… Le tract « les 10 choses à savoir sur le cannabis », le fanzine BZH du CIRC Bretagne… tomberont aussi au nom du L.630. D’autres associations connaîtront aussi le sens du L.630 : de ASUD (Association d’usagers et ex-usagers…) à Act Up. Les groupes musicaux connaissent aussi la musique : la dernière poursuite concerne Matmatah pour son titre « Apologie »… Tous les mois connaissent leurs lots de procès, de procédures, d’enquêtes, de perquisitions…

Dernièrement, c’est Yves Martin du CIRC de Toulouse qui passait devant le tribunal de Toulouse pour un rassemblement qui finalement ne s’est pas tenu parce qu’interdit la veille par les autorité préfectorales. Il faut dire que malgré l’interdit et l’absence officielle du CIRC, 2000 personnes avaient fait le déplacement. De même après 3 années d’instruction, pour la première fois le L.630 s’attaque à un livre : des poursuites sont engagées contre les Editions du Lézard pour le livre « Les très riches heures du cannabis » par le tribunal de Béthume. La date n’est pas encore connue…
 

Les raisons de la colère

Mais à y regarder de plus près, l’article L.630 et la loi sur les stupéfiants est un des éléments d’une structure plus globale. Votées en 1970, en même temps que les lois anti-jeunes et anti-casseurs, ces lois arrivent juste après Mai 68. Or la société capitaliste a besoin pour exister, survivre d’une cohésion sociale. Lorsque les contradictions de classes, culturelles, sont trop importantes, on fait intervenir la morale. La religion, la famille, l’Église, l’immigration, les drogues ont toujours eu ce rôle d’unification idéologique. « L’imposition d’un ordre moral par un groupe dominant n’est pas un but en soi. Ce n’est qu’un moyen utilisé pour asseoir son pouvoir. Aussi, le rôle joué par la morale sera plus ou moins suivant les modalités de la domination… » (2) L’objectif de la loi sur les stupéfiants est donc clair : accentué le contrôle social des individu-e-s, en passant du contrôle des corps pour finalement maîtriser les consciences. C’est pour cette raison (afin d’élargir le débat) que nous serons présent-e-s lors de cette tournée organisée par le CIRC et que le groupe FA de Nantes vient de sortir un numéro spécial des « Raisons de la colère » avec 12 pages sur le sujet (3).

Régis. — groupe F.A. de Nantes


(1) Nombreux groupes (Zagohaï, Lab, Grandelire, Zenzile…) à partir de 18h00 le 26 février 2000 à Rennes. Salle de la Cité. 100F sur place et 80F sur réservation : 02.23.42.40.32
(2) Brochure ordre moral, Ed du Monde Libertaire
(3) Pour commander le n°2 des « Raisons de la colère » sur les drogues : contre 7F (timbres) écrire à FA c/o ACLN, BP 60221, 44002 Nantes Cedex1.