CLERMONT-FERRAND

Interview d’un militant de SUD-éducation

Mercredi 16 février, s’est déroulé à Clermont-Ferrand une manifestation regroupant environ 700 personnes. À l’appel de cette manifestation des syndicats de l’Éducation nationale aussi divers que FAEN, FEN, SGEN-CFDT, SUD Éducation, URSEN-CGT, FCPE (parents d’élèves) et les mots d’ordre « Contre le gel de l’emploi public. Contre le développement de la précarité. » À cette occasion, nous avons rencontré un militant de SUD-Education qui ont accepté de faire le point sur la situation pour le Monde libertaire.

ML : Pouvez-vous nous expliquer le contexte de cette manifestation ?
Didier : Cette manifestation était a l’appel de l’ensemble des fédérations de l’éducation. Ce qui est intéressant, c’est son caractère intercatégoriel : profs, mais aussi agents ouvriers, techniques, administratifs. Les profs des lycées professionnels sont sous le coup d’une réforme (Charte des lycées professionnels) qui consiste en l’annualisation du temps de travail et la flexibilité. Pour nous, c’est un laboratoire pour la suite des réformes, cela risque de s’étendre. Il est aussi frappant de constater que le SNETAA, majoritaire dans les lycées professionnels (FSU) ne participe pas au mouvement de protestation. 700 personnes, c’est plutôt une bonne manifestation. Le Puy de Dôme est considéré, au moins par le ministère, comme un département surdoté. Résultat, on colmate les brèches avec des postes « piqués » au Puy de Dôme. Dans le primaire, on va perdre 35 postes alors que l’effectif des élèves sera le même.

À SUD-Education, nous sommes d’accord sur les axes contre le gel de l’emploi public, contre le développement de la précarité. Cependant, ce qui nous importe est de contester l’ensemble des réformes, qui sont l’instauration de toujours plus de précarité. Sur cette question de la précarité, il y a une véritable prise de conscience de tout un chacun, ce qui pousse les syndicats a prendre en compte ce problème. À la rentrée des vacances d’hiver, nous appelons à la grève jeudi 16 mars. Nous voulons nous inscrire dans des formes de luttes qui situent clairement l’école dans le mouvement social, comme en Seine-Saint-Denis il y a deux ans, dans le Gard, l’Hérault, le Doubs qui sont en grève et où les parents d’élèves sont complètement partis prenante. Cependant, nous pensons que les directions syndicales n’ont ni les moyens ni la volonté d’impulser un tel mouvement. Elles sont ou seront poussées par la base… Toutes les réponses du ministère aux problèmes de l’Éducation nationale se font en termes de précarité : le plan anti-violence, c’est l’introduction de flics et d’emplois-jeunes à l’école. La nouveauté est, au niveau du personnel IATOSS, la prévision d’introduction d’emplois-jeunes.
Le deuxième volet des réformes est la déréglementation des statuts des titulaires avec l’annualisation du temps de travail. C’est une gestion du public sur le modèle du privé, l’État cherche a accroître la rentabilité de la force de travail.

ML : Que pensez-vous du fait que les problèmes de l’école soient systématiquement médiatisés par le prisme de la violence ?
Didier : C’est une mauvaise manière d’aborder le problème. La réalité sociale c’est une paupérisation accrue, de véritables zones d’exclusion… La violence dont on parle est une violence réactive. Les profs, ne sont évidemment pas la meilleure cible mais les mômes subissent une violence de l’éducation, qui les confinent sur des voies des garages. L’État ne donne pas de réponses en termes sociaux mais répressifs. Pire, le ministre laisse la situation se dégrader, même sur ces zones des postes sont retirés.

ML : La situation que vous me décrivez est commune à l’ensemble des services publics.
Didier : Effectivement, c’est une logique de gestion de l’ensemble des services publics. La lutte pourrait s’étendre bien au-delà du seul service public d’Éducation sur des questions telles que l’annualisation, la casse des statuts avec le recrutement de non-titulaires… Mais il y a aussi des similarités avec le privé. Effectivement, l’État ne peut se permettre de dégraisser comme Michelin, il doit mettre des formes. À la rentrée prochaine, il y aura des licenciements de vacataires, contractuels et maîtres auxiliaires. Après la lutte des maîtres auxiliaires, le recrutement de MA a cessé et on les a remplacé par des contractuels (CDD), recrutés au niveau académique et qui dans le meilleur des cas durent 9 mois, ce qui permet de ne pas payer les congés. Cela représente environ 6 000 personnes. Les vacataires sont employés par chaque établissement, pour 200 heures/an et payé à l’heure et ils n’ont pas de congés payés (vacances ou maladies). Ce sont les journaliers de l’Éducation.

Propos recueillis par Maryla. — groupe Spartacus (Clermont-Ferrand)