Lettre ouverte des détenus de Poissy
Le Collectif des détenus de la Centrale
de Poissy a transmis une lettre ouverte à Ras-les-murs. Nous l’avons
lue à l’antenne et souhaitons lui donner la plus large audience.
Il est des vérités oubliées par le débat médiatique.
Ras-les-Murs (Radio libertaire)
Dans une période où déjà
beaucoup ont du mal à accepter l’exclusion dont certains ont été
victimes, à l’occasion des grâces de l’an 2000, voilà
l’atmosphère qui règne à la Centrale de Poissy.
Depuis les révélations du médecin-chef
de la Santé, une partie des surveillants et des brigadiers, pour
la plupart affiliés au syndicat U.F.A.P et poussés par celui-ci,
utilisent tous les moyens pour créer des tensions. Toutes les méthodes
pour provoquer sont utilisées. Dernièrement, deux détenus
se sont retrouvés au mitard pour avoir réclamé de
prendre une douche avant d’aller au parloir. La direction et le personnel
d’encadrement ont conscience de la situation mais sont dans l’incapacité
de réagir comme ils le souhaiteraient, étant donnée
la puissance du syndicat.
La Centrale vit au rythme des exigences de
l’équipe n°1 (et des ses émules) qui fait pression sur
le reste du personnel. A chaque fois qu’une revendication est adressée
au directeur, celui-ci, au lieu de la traiter, agit de façon expéditive
en transférant disciplinairement celui ou ceux qui auront pris la
parole pour l’occasion, créant une psychose du transfert au sein
de la population carcérale. Malgré les améliorations
que nous sommes en droit d’espérer, nous n’osons plus nous manifester.
Par exemple, pour 250 détenus, nous
ne disposons que d’une seule cabine téléphonique ; il est
facile d’imaginer l’encombrement le week-end, le mercredi et aux heures
de pointe.
En ce qui concerne le parloir dont on
ne cesse de nous répéter que bientôt des unités
de vie familiale seront mises en place, mais dont les travaux n’ont toujours
pas commencé alors que l’emplacement est prévu il n’est
pas conforme au règlement et ne permet aucune intimité avec
nos familles. En effet, il ne devrait pas y avoir de vis-à-vis et
ils devraient être équipés de cloisons sur 3 côtés,
ce qui n’est pas le cas, sans parler des caméras qui nous épient
en permanence.
Pour une Centrale (qui détient une
quarantaine de condamnés à perpétuité et une
majorité de longues peines), nous ne possédons aucun local
pour faire notre cuisine (four, friteuse, etc.) et aucune cantine alimentaire
extérieure, comme c’est le cas dans tous les autres établissements
similaires. Enfin, depuis trois ans, aucun détenu n’a bénéficié
d’une libération conditionnelle.
On ne vit plus dans l’espoir. C’est dramatique
dans la mesure où les peines ont considérablement augmenté
et que les grâces ne concernent pas toute la population. Dans ces
conditions, pas étonnant que la France détienne le triste
record des suicides. Poissy n’en est pas épargnée. En décembre,
un gitan s’est donné la mort de façon bien mystérieuse.
La conclusion de l’administration n’étant pas celle des détenus.
Samedi 12 février, vers 21 heures,
un détenu qui était à quelques mois de sa libération,
après avoir déjà purgé plus de 12 ans, se serait
pendu. Il aurait été retrouvé pendu au support de
télévision situé à 1,80 m du sol… au-dessus
de la cuvette des w.c. Bizarre ! Encore plus bizarre que le brigadier de
service n’ait ouvert sa porte qu’une demi-heure après avoir été
avisé du drame. On peut logiquement supposer qu’en étant
intervenus plus tôt, les secours seraient parvenus à le ranimer.
Ce détenu demandait son transfert depuis belle lurette, on lui répondait
toujours favorablement, mais rien n’arrivait. Est-ce ce qui l’aurait poussé
à ce geste fatal ? Ce n’est, une fois de plus, pas l’avis de la
population qui ne veut pas croire au suicide. Tout ceci n’étant
pas fait pour apaiser les tensions, nous osons espérer que la situation
ne va pas se dégrader dans les jours à venir, mais ne pouvons
le garantir.
Nous espérons que vous pourrez
faire évoluer les choses dans le bon sens et vous en remercions
d’avance.
Collectif des détenus de la Centrale
de Poissy