éditorial
L’annonce par Guigou, ministre de l’injustice,
de la construction de trois nouvelles prisons devrait inquiéter
toutes celles et ceux qui ont à cœur de rejeter l’ordre économique
et social que nous propose la bourgeoisie mondialisée. Ce n’est
pas pour améliorer le confort des locataires actuels des centres
pénitentiaires que ces crédits ont été débloqués.
Ce n’est pas non plus pour préparer et mettre en œuvre un ambitieux
programme de réinsertion sociale pour les dizaines de milliers de
taulards. Ceux-ci n’ont bien souvent que le seul tord d’être nés
pauvres et basanés et se font piégés par le mirage
de la richesse facile suggérée par des idoles sportives et
autres dealers de drogues.
Le calcul étatique est plus brutal
et machiavélique. La statistique judiciaire dit simplement que les
tribunaux condamnent plus souvent, plus lourdement et avec plus de haine.
Mathématiquement il s’ensuit une hausse du nombre de prisonnières
et prisonniers. Il leur faut donc prévoir beaucoup de cages de verre.
Informatique et électronique oblige. Leur modernité se résume
à la suppression des cages de fer, pour le pire.
Il n’y a pas si longtemps un autre ministre,
de droite celui-là, avait lancé la construction du programme
4 000 nouvelles cellules, géré par le secteur privé.
Bouygues et quelques autres ne négligent aucun petit profit. Créer
plus de places c’était vouloir enfermer plus de gens. Ce qui n’a
pas manqué de se produire. Il en sera de même cette fois-ci
et le « progrès » apporté par une conception
prétendument nouvelle de l’organisation de l’espace taule n’y changera
rien. Nous prendraient-ils pour des benêts ?
Nous savons que les luttes sociales actuelles
se déroulent de plus en plus souvent sous des formes radicales du
fait du durcissement du patronat, de la nécessité de forcer
les bureaucraties syndicales à relayer les initiatives, de la révolte
des salariés « inorganisés » qui ne peuvent que
vouloir tout casser lorsqu’on les jette à la rue comme des bouches
inutiles à nourrir. Il s’ensuit qu’occupations, séquestrations,
actions directes dites illégales et manifestations dites violentes
se multiplient. Patrons, État, flics et, fait nouveau, une confédération
syndicale (CFDT), n’hésitent pas à porter plainte et enclenchent
une criminalisation des révoltes sociales. Nous ne tarderons pas
à voir des militantes et militants en détention pas simplement
provisoire. Assise sur son tas d’or la bourgeoisie a peur et planifie la
répression de la contestation. La multiplication des prisons annonce
toujours le rétrécissement de notre liberté. Qu’on
se le dise !