Les limites de la politique de communication
de Jospin
La gauche plurielle face à la rue
Lorsque vous lirez ces lignes Lionel Jospin
aura remanier son gouvernement. L’échec de sa politique libérale,
mal maquillée de rose, éclate à la vue de tous et
la houle de ceux qui ont exigé la démission des ministres
les plus en vue, Claude Allègre, Christian Sautter ou Emile Zuccarelli,
risque bien se transformer en déferlante. Les mouvements sociaux
agitent le pays sans discontinuer. Comme le dit la droite, pour une fois
avec justesse « la politique de communication de Jospin est arrivée
à son terme ». Fini donc d’endormir et d’embrouiller les français
avec une politique faussement sociale et authentiquement capitaliste. Les
35 heures, la réforme des retraites, les réformes Sautter
ou Allègre, se rejoignent sur un objectif simple : faire travailler
plus les classes défavorisées, gagner moins, afin que le
capitalisme du XXIe siècle continue à la bourse son petit
monstre de chemin.
Le problème le plus inquiétant
à terme est probablement celui des retraites. En effet cela devrait
être l’occasion du démentellement des conditions de travail.
En valeur absolue, les dizaines de milliards de déficit qui fleurissent
au gré des rapports et documents divers ont de quoi effrayer. Mais
jamais le véritable problème n’est véritablement abordé
: où donc s’évapore la richesse produite par les travailleurs
et pourquoi ne sert elle pas à payer leurs retraites ?
Qui profite des richesses produites ?
Le soi-disant problème du financement
se résume au passage, d’ici à 2040, d’un prélèvement
sur le PIB de 12 % à 16 % , nécessaire au financement de
nos retraites. Ce pourcentage de 12 % qui ne devrait pas être dépassé
résulte-t-il d'une loi physique ? Il y a cinq ans, ce prélèvement
était inférieur à 7 %. Entre temps, non seulement
le ciel ne nous est pas tombé sur la tête mais les riches
ont engraissé leurs patrimoines de manière obscène.
Pour atteindre 16 % en 2040, il suffit d'un prélèvement supplémentaire
de 0,08 % sur les richesses produites chaque année . Or la croissance
du PIB est comprise entre 3 et 5% l’an.

Les véritables questions sont donc
: où part le reste ? Qui vole l’argent des travailleurs ? Comment
allons nous nous y prendre pour le récupérer ? La solution
est simple, il faut utiliser l’argent de la croissance c’est-à-dire
la plus value du travail, tout l’argent, pour payer et augmenter les retraites.
Toutes les autres options ne peuvent conduire qu'à la diminution
du niveau des retraites à venir. Que ce soit la révision
à la baisse des rendements, ou l'allongement de la durée
de cotisations (en continuant à faire partir les salariés
à moins de 60 ans, on les obligera à liquider leurs retraites
avec des coefficients d'abattement) ou encore la mise en place de fonds
de pension qui n'auraient pour objet que de compenser la baisse des retraites,
que l'on aurait organisée par ailleurs. Il n’y a donc pas de problème
des retraites. Le seul problème se nomme capitalisme. Pour autant
le lavage de cerveau idéologique entrepris par l’ensemble des «
partenaires sociaux » et des médias, finit par convaincre
les français qu’il va de nouveau falloir se serrer la ceinture.
La lutte sociale est d’actualité
L’augmentation des années de cotisation
à la retraite à 40 ans pour les fonctionnaires puis à
42,5 ans pour tous (le MEDEF demande 45 ans), les fonds de capitalisation
réservés aux plus riches (ils existent déjà
dans la fonction publique sous le doux nom de Préfond Retraite),
le cumul emploi de merde et retraite de misère sont déjà
visible à l’horizon. La seule vrai différence avec la droite
consiste dans la méthode à adopter pour faire passer la potion
amère. La gauche a l’avantage. En effet, la préoccupation
principale du bon « peuple de gauche » consiste à se
demander comment se voiler la face pour continuer à glisser son
petit bulletin Jospin dans l’urne en 2002. Une telle attitude de déni
de la réalité ne facilite pas la lutte bien sûr.
Et pourtant… La lutte sociale est bien là.
Elle ne touche pour le moment que les catégories les mieux protégées,
les mieux organisées et donc les plus à même de se
défendre , mais les méthodes commencent à se durcir.
La grève de l’éducation nationale est une grève de
la base, là ou elle est dure. Elle s’organise dans la durée
et le rapport de force, loin des magouilles des principaux syndicats, souvent
même contre eux. Des grèves de plusieurs semaines, on ne connaissait
pas cela dans une profession sans aucune culture de la lutte. Il a fallu
la grève de 3 semaines en Seine Saint Denis il y a deux ans pour
que les choses commencent à bouger, un peu.
Aujourd’hui, le ras le bol est souvent
plus présent dans les manifestations ou les occupations d’écoles
que les mots d’ordres de syndicats qui tentent d’allumer des contres feux
de peur qu’un véritable combat ne remette en cause leur cogestion
du système, et donc du désastre. Aux finances, la grève
a payé. Projet retiré et ministre sur un siège éjectable.
Il va falloir maintenant garder la main pour que ce qui est parti par la
porte ne revienne pas par la fenêtre. Les fonctionnaires des impôts
et du trésor ont donné l’exemple de la méthode, à
la suite des postiers, il serait juste qu’ils retirent les fruits d’une
victoire globale dans la fonction publique.
Le gouvernement qui navigue sous pavillon
de complaisance « capitalisme Island» est pris dans la tempête.
Il faut espérer que cette fois, aucun syndicat ne viendra le remorquer
pour qu’il puisse s’abriter au port en attendant de reprendre sa route.
La cargaison de réformes peut bien
couler, ce type de pollution n’est pas à craindre. Si l’équipage
regagne la côte on lui trouvera bien une place dans une HLM de banlieue.
Frank Gombaud