CRISE DE FOI

Pour une éducation sans curé ni État

L’Alsace-Moselle n’est pas régie par la loi de séparation de l’Église et de l’État de 1905, mais par un concordat qui donne à l’Église catholique un pouvoir énorme. En matière d’éducation notamment. Ainsi en juin 1999, Patricia Ravenet demande une dispense d’enseignement religieux pour sa fille. Laetitia commence sa quatrième au collège public Paul Langevin d’Hagondange et sa mère ne voit pas l’intérêt des cours de religion. Cependant, à la rentrée scolaire, l’élève est toujours inscrite sur la liste des catéchumènes. Madame Ravenet n’aurait pas rempli le bon formulaire… Résultat des courses, Laetitia est obligée de suivre le cours d’enseignement religieux contre son gré. Furieuse, la mère refuse d’y contraindre sa fille. La sanction tombe vite, le 24 janvier, l’inspection académique réclame la suspension des allocations de madame Ravenet. Motif ? « Manquement à l’obligation scolaire ». Pourtant Laetitia suit tous les cours sauf un, celui de religion.

L’inspection ne badine pas. En cas de récidive, elle menace de porter plainte contre la mère auprès du procureur. Quant à la Caisse d’allocations familiales de Moselle, elle annonce la suspension pour mars des allocations. On voit bien ici l’alliance de l’alliance de l’Église et de l’État. L’affaire s’ébruite et sous la pression de la FSU, de la LDH et de la FCPE, le rectorat rectifie le tir : le « dossier de madame Ravenet s’était égaré », et tout rentrait dans l’ordre le 9 février.

S’ensuit une confrontation entre l’Église et les syndicats de parents d’élèves et d’enseignants. Ainsi l’évêque de Metz, Mgr Pierre Raffin part en croisade en déclarant que « l’enseignement religieux à l’école est placé sous le signe de la liberté (vu ce qui s’est passé dans cette histoire, comment en douter ?). Je ne peux être d’accord quand on parle d’atteinte à la laïcité. En Alsace-Moselle, terre concordataire, la situation de l’éducation religieuse est celle de tous les pays d’Europe. Seule la France fait exception, car la laïcité à la française reste, pour beaucoup, teintée d’un anticléricalisme dont l’empreinte résiste au temps ». À l’heure où l’on parle d’harmonisation européenne, ces propos ont de quoi inquiéter. On comprend mieux aussi l’attachement de l’Église au projet européen tel qu’il se dessine.

Rien ni personne n’interdit à quelqu’un de vivre sa foi. L’Église, malgré ce qu’elle dit, n’est pas persécutée en France par l’État et ses lois laïques. En revanche, nous combattons le retour en arrière voulu par le pape : un État religieux ennemi de toutes les libertés de pensée et de choix de vie.

Régis Boussières. — groupe Kronstadt (Lyon)