Sortir du nucléaire, c’est possible
!
Le choix du « tout nucléaire
» fait par la France il y a 40 ans environ est un choix qui se révèle
catastrophique. Ce choix est une prise de risque sur la santé publique
en cas d’accident. Tchernobyl, dans son type de centrale, n’a fait que
rajouter à l’évidence que l’erreur était humaine et
parfois non mesurable en conséquence.
Ce choix a été un pari, qui
est à ce jour perdu, de la capacité des chercheurs de l’atome
à trouver la solution au recyclage des déchets radioactifs.
Le sort de Creys-Malville montre une des impasses. L’efficacité
des usines de retraitement du type La Hague se révèle insuffisante
à produire des déchets sans danger.
Ce choix se révèle de plus
en plus coûteux économiquement. Les évaluations de
rentabilité des centrales n’ont jamais pris en compte les coûts
de neutralisation et de démolition de la centrale au terme de sa
vie, échéance toujours repoussée plus loin pour ne
pas aggraver le peu de rentabilité de cette technologie.
Si 80 % de la production française
d’électricité est d’origine nucléaire, ce n’est que
15 % de l’énergie utilisée par les consommateurs qui vient
de cette même source. C’est 72 % de la consommation d’électricité,
le reste de la production étant exporté. Le nucléaire
a drainé toutes les subventions de recherche sur les autres sources
d’énergie, laissant la recherche et le développement français
à la traîne dans ce domaine. Des recherches et des avancées
importantes ont eu lieu ces dernières années sur les sources
« alternatives » d’énergie.
Qu’attend la France pour sortir du nucléaire
?
La Grande Bretagne a gelé tout développement
de programme.
La Belgique ferme ses réacteurs
nucléaires au fur et à mesure de leur vieillissement.
En Irlande, malgré une décision
de construction en 1974, aucune centrale n’a vu le jour.
En Suisse, le Conseil Fédéral
a décidé en 1998 d’abandonner progressivement le nucléaire.
Au Portugal, les plans prévus dès
1971 furent définitivement abandonnés en 1975.
En Espagne, aucune centrale en construction
ou en projet depuis 1981.
En Italie, après Tchernobyl, les
4 réacteurs en fonction furent fermés. L’abandon définitif
du nucléaire fut prononcé en 1988 après référendum.
En Grèce, les différents
plans de construction prévus n’ont jamais été menés.
En 1982, le gouvernement a décidé qu’aucun réacteur
nucléaire ne serait construit.
Le Luxembourg n’a pas de réacteurs
nucléaires.
L’Allemagne ferme 19 centrales d’après
les prévisions du contrat de gouvernement SPD-Grünen.
Au Danemark, les 5 réacteurs nucléaires
prévus en 1976 n’ont jamais vu le jour. En 1985, le gouvernement
a pris définitivement position contre l’énergie nucléaire.
La Suède, qui comptait 12 réacteurs
nucléaires, a décidé en 1997 la fermeture progressive
de l’ensemble de ceux-ci.
En Norvège, les plans de construction
prévus furent définitivement abandonnés en 1986.
L’Autriche abandonne le nucléaire
après référendum en 1978. La seule centrale du pays,
construite, n’a jamais fonctionné.
Au Pays-Bas, le dernier réacteur
nucléaire en activité devrait être arrêté
d’ici 2003.
Et aux Etats-Unis, aucune centrale nucléaire
n’a été commandée depuis 26 ans. Les canadiens ont
décidé en 1997, suite à différents incidents,
la fermeture de 7 centrales.
Ces pays ne se lancent pas dans l’exportation
d’électricité, ni ne fonctionnent en surcapacité.
Ils ont construit immédiatement des centrales thermiques peu polluantes
et économes ; ceux qui ont fait le choix d’une sortie très
rapide du nucléaire ont fait fonctionner au maximum les installations
thermiques existantes. Ils ont développé les économies
d’énergie avec toujours le souci de l’efficacité énergétique.
Ils développent toujours et encore les énergies renouvelables.
Développement des énergies alternatives
au nucléaire !
Le souci de l’efficacité énergétique
passe par la cogénération qui consiste dans la récupération
des énergies perdues pour la production même et lors du transport
de l’énergie. Le champ des énergies renouvelables est riche
de possibilités. Et ce d’autant que d’autres pays ont largement
fait évoluer les technologies.
L’énergie hydraulique représente
à ce jour 13 % de la production d’électricité en France.
90 % des disponibilités françaises sont utilisés,
mais c’est seulement 1/6e au niveau mondial.
L’énergie éolienne se révèle
un gisement supérieur à la consommation électrique.
Les technologies d’avenir seront développées avec des éoliennes
off-shore. Le coût du KWh éolien est maintenant équivalent,
voire inférieur, au coût du KWh nucléaire si tous les
coûts étaient pris en compte. Fin 1998, en puissance installée,
la France produisait 15 MW, alors que l’Espagne était à 555
MW, le Danemark à 1 200 MW et l’Allemagne à 3 000 MW.
Le solaire thermique consiste dans la
production d’eau chaude et de chauffage pour les besoins de la maison.
Le solaire photovoltaïque consiste
dans la transformation de la lumière en électricité
grâce à des capteurs solaires. Ces technologies nécessitent
de passer à une phase d’industrialisation pour arriver à
des coûts acceptables par tous.
Le bois pour le chauffage est une solution
en complément, à condition de respecter les rythmes de reproduction
de la ressource, c’est-à-dire la forêt.
Le Biogaz, c’est la production de méthane
par toute matière organique soumise à la fermentation en
vase clos, à l’abri de l’air. En France, pourraient être installés
50 à 100 000 sites de fermentation qui produiraient en moyenne 10
m3/h soit 50 Wh. A ce jour il existe moins de 10 installations. Des recherches
sont aussi à continuer du côté des bio-carburants.
Les syndicats d’EDF doivent sortir du nucléaire
!
On le voit, nous avons la possibilité
de ne pas être enfermés dans le tunnel du nucléaire.
Choix que nous impose EDF et les divers gouvernements qui se sont succédés,
gauche plurielle incluse. Nous devrons nous poser la question de savoir
si EDF joue vraiment son rôle de service public. Nous devons ici
interpeller les travailleurs d’EDF, au nom des risques qu’ils prennent
eux-mêmes et de ceux qu’EDF nous fait prendre, pour qu’ils s’associent
aux différents mouvements qui réclament toutes les informations.
Ils devraient mettre leurs compétences au service d’une réflexion
la plus large sur les alternatives au nucléaire. Nous ne pouvons
que constater sur ce sujet combien l’attitude des organisations syndicales,
au moins les majoritaires, consiste à aligner leur discours énergétique
sur les choix et les discours de l’entreprise. Ce n’est pas comme cela
que l’on défend le service public, on ne le défend pas contre
le public. Nous avons la responsabilité d’orienter la politique
énergétique dans le choix de la diversification et des énergies
renouvelables.
Philippe Arnaud. — groupe Emma Goldman (Bordeaux)