Religions : Les mystères de la «
Nuit de l’énigme »
Nombreuses sont les opérations humanitaires
qui se déroulent tout au long de l’année. Parce qu’elles
s’appuient sur un a priori favorable largement partagé, elles ne
soulèvent pas de curiosités. Pourtant, on serait bien naïf
d’imaginer que le vocable « humanitaire » ne cache pas parfois
des procédés et des objectifs pour le moins discutables.
Depuis 1998, « La nuit de l’énigme
» a lieu dans plusieurs villes (1). Il s’agit d’un jeu dont le principe
repose sur la résolution d’une énigme en une soirée,
cette année le 13 mai. La participation se fait par équipes,
qui concourent simultanément avec d’autres candidats de différentes
villes. Les participants devront s’acquitter d’un droit d’inscription de
40 à 50 F. Les prix gagnés proviendront d’entreprises qui
seront partenaires de l’opération. Et pour démarcher ces
« sponsors », un dossier de presse a été réalisé.
Fausse transparence…
Ce dossier de presse nous apprend donc que
l’objet de cette « Nuit de l’énigme » est de financer
un projet humanitaire, en l’occurrence l’aménagement d’un orphelinat
en Roumanie, à Ottelul Rossu. Le dossier nous apprend qu’«
une institution privée, soutenue par plusieurs associations »
a permis la création d’un orphelinat. Suite à quoi, l’administration
régionale aurait sollicité cette fondation, dont on ignore
le nom et l’objet, pour lui confier la gestion d’un autre orphelinat de
la ville. Celui-là même qui fait l’objet de l’attention des
bénévoles humanitaires de la « Nuit de l’énigme
» 2000.
Dans ce dossier, rien n’est laissé
au hasard. On y trouve même la précision suivante : «
la nuit de l’énigme n’est pas une association humanitaire à
proprement parler. Elle ne réalise pas le projet pour lequel elle
a été sollicitée. Elle se charge de collecter […]
pour la réalisation du projet par l’association humanitaire partenaire.
» Laquelle ? Là aussi, mystère…
… et vraie opacité
À y regarder de plus près, en
effet, on se dit que certaines choses devraient être signalées
dans ce dossier de presse adressé aux sponsors et aux futurs candidats,
sans doute laissés aussi dans une certaine ignorance. Car il faut
se reporter aux trois coupures de presse présentées à
la fin du dossier pour apprendre que le « Secours adventiste »
est à l’origine de l’association « F.F.S. » qui organise
l’opération humanitaire. « F.F.S. », un sigle bien mystérieux
qui signifie en fait « Fédération France sud »,
l’un des trois sièges régionaux de « l’Église
adventiste du septième jour », basé à Clapiers,
dans l’Hérault.
Dans le dossier de presse consulté,
l’adresse indiquée sur l’autorisation de permis de stationnement
(2) délivrée par la mairie de Nîmes (le stand de l’opération
sera tenu sur une place publique dans cette ville) ne décline qu’un
simple nom de particulier comme bénéficiaire du permis d’utiliser
la voie publique le 13 mai au soir.
Vérification faite, lorsque l’on se
rend à cette adresse, on trouve bien la boîte à lettres
de la personne citée. Mais le domicile de ce particulier se trouve
sur la même parcelle qu’un lieu de culte adventiste, le siège
de l’association humanitaire « Élan », du secours adventiste,
de l’« Association médico-sociale adventiste de langue française
». Le doute n’est plus permis.
Que cache l’Église adventiste ?
Cette « petite église »,
d’origine protestante et américaine, s’est fondée sur les
visions des fondateurs que furent William Miller (mort en 1849), qui avait
calculé le retour du Christ pour 1843, puis 1844, et Mrs Ellen White
(morte en 1915). Selon eux, la Bible est la règle fondamentale de
la foi et de la morale. Les justes ressusciteront avec le retour du Christ.
Ils préconisent l’interdiction de l’alcool et du tabac tandis que
le thé, le café et les « aliments impurs » de
la Bible sont déconseillés.
Un ouvrage (3) les signalent comme millénaristes
et fondant des œuvres de bienfaisance ou de lutte contre le tabac, comme
« Le plan en cinq jours » de la Ligue Vie et santé qui
a pignon sur rue et bénéficie d’une large soutien promotionnel
: affichage dans les lieux publics, pharmacies, etc., par ignorance des
options religieuses de cette association sans doute.
Cette Église, comme tous les mouvements
religieux, est probablement intéressée par la multiplication
de ses adeptes. Il est dès lors permis de s’interroger sur la véritable
vocation de l’opération humanitaire « la nuit de l’énigme
». Pourquoi l’appartenance adventiste de l’association «
F.F.S. » n’est-elle pas clairement déclinée dans le
dossier de presse ou sur le récépissé de la ville
de Nîmes ? L’est-elle seulement aux futurs candidats ? Les fonds
recueillis ainsi sont-ils gérés en Roumanie par une association
elle aussi adventiste ? Quelle est cette association ?
L’école d’infirmières (4) et
l’orphelinat sont-ils des institutions gérées selon les règles
adventistes ? N’y a-t-il pas là mise en place du financement d’une
implantation de mouvement religieux dans des pays où la terrible
situation sanitaire et sociale facilite le recrutement d’ouailles sensibles
à des attentions toujours bienveillantes puisqu’« humanitaires
» ?
Quoi qu’il en soit, cet exemple permet de
rappeler deux choses. La première, c’est que le vocable «
humanitaire » doit aussi faire l’objet d’un regard critique et lucide
sur ses inspirateurs et ses buts. La deuxième, c’est que les religions
n’ont de cesse de se propager partout, et par des moyens innombrables.
Qui donc a dit que la lutte de la raison contre les religions, toujours
prosélytes et prêtes à imposer des modes de vie «
inspirés », n’étaient plus d’actualité ?
Roger noir. — groupe Gard-Vaucluse de la F.A.
(1) Cette année : Aix-en-Provence,
Avignon, Grenoble, Haguenau, Lyon, Montpellier, Nîmes, Périgueux.
(2) Dont la copie est jointe au dossier
de presse, comme pour valoriser le projet avec l’accréditation d’une
installation au-dessus de tous soupçons.
(3) « Les nouvelles sectes »
de Alain Woodrow (Point, Seuil). À signaler que l’Église
adventiste du septième jour n’est pas répertoriée
dans le rapport Vivien sur les sectes.
(4) Qui a reçu des aides après
l’édition 98 de la « Nuit de l’énigme ».