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Lettre aux lecteurs ou… propositions pour un dialogue

septembre 1965.

Nous voici donc de nouveau en contact avec vous après la regrettable et coutumière interruption estivale que nous imposent nos difficultés matérielles.

Certes, nous connaissons des solutions « réalistes » pour surmonter ces difficultés. Il n’y a d’ailleurs qu’à jeter un coup d’œil sur l’Humanité-dimanche par exemple, pour dénicher ces solutions par dizaines, quelques tuyaux pour le tiercé, de nombreuses pages publicitaires, etc., et nous verrions s’additionner nos lecteurs, se multiplier nos revenus, bref, nous verrions la face tourmentée de notre administrateur reprendre les couleurs d’une douce sérénité. Malheureusement pour lui, nous ne sommes pas mûrs pour faire des compromissions, pour collaborer, pour consolider d’une main ce que nous combattons de l’autre.

Refusant d’acquitter la rançon d’une audience étendue mais factice, nous vous présentons un journal pas tout à fait comme les autres, nous faisons cela parce que, en revanche, nous pensons pouvoir compter sur des lecteurs qui, eux aussi, ne soient pas « tout à fait comme les autres ».

Nous nous adressons ici à ceux qui, avec plus ou moins de sympathie, suivent régulièrement ou épisodiquement notre combat, en pensant que malgré nos défauts, nous avons quelque chose à dire et qu’il faut que nous le disions. Nous n’insisterons pas aujourd’hui sur l’aide matérielle qui, à travers la souscription se révèle indispensable, mais sur un problème qui, à un tout autre niveau, est encore plus important.

Un de nos objectifs essentiels consiste à réveiller, à susciter, à développer un esprit critique, une volonté d’initiative, un dynamisme à la fois de contestation et de création dans des masses qu’un conditionnement social efficace rend trop enclines à se laisser diriger et manœuvrer. Nous nous refusons donc à entériner la passivité, à la consolider, comme le font et le système et les organisations qu’elles soient de gauche ou de droite ; c’est pourquoi nous nous refusons à déverser une prose, plus ou moins sensée, que nos lecteurs devraient se contenter d’ingurgiter et parfois d’assimiler.

Contre la conception dominante d’un lecteur passif, uniquement « récepteur », notre désir serait de promouvoir une génération de lecteurs-participants, de lecteurs-actifs, formant un public vivant, en dialogue permanent avec nous. Si nous y arrivions ce serait déjà réaliser en partie ce pourquoi nous luttons. Sommes-nous des utopistes ? L’avenir, nous le dira, mais pour notre part nous sommes décidés à tout mettre en œuvre pour structurer les vecteurs d’une communication qui ne soit plus à sens unique.

Le journal, nous l’avons dit, a des défauts, nous sommes conscients de certains d’entre eux, d’autres nous échappent ; certains sont insurmontables pour l’instant (tel le prix que nous aimerions voir réduit de moitié), d’autres peuvent être dépassés avec votre aide. Cette aide peut se concrétiser de mille manières, par l’envoi de suggestions, par la formulation de critiques dans tous les domaines, par l’envoi d’informations sociales, internationales que vous jugerez intéressantes, en diffusant le journal si ce n’est fait, en nous expédiant les adresses de personnes susceptibles d’âtre intéressées, à qui nous enverrons un abonnement d’essais, etc. Nous ne connaissons pas toutes les formes que pourrait prendre votre aide… à vous de les trouver.

La rédaction