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Suppression d’un jour férié

Une Attaque tout azimuts !

Le jeudi 13 novembre 2003.

Une attaque contre les clubs de loisirs : comme l’a dénoncé la fédération des clubs de footballeurs amateurs, ce long week-end leur permettait d’organiser des tournois interclubs qui leur rapportaient une partie de leur budget annuel. Sa suppression va entraîner des difficultés diverses pour ces activités.

Une attaque contre les vieux : qui peut croire que ceux et celles qui vivent dans la solitude vont avoir plus de visites si on supprime un temps de repos aux membres de leur famille ? Ceux-ci sont peut-être trop éloignés pour pouvoir leur rendre visite autrement que sur un grand week-end. Qui peut croire que les personnes hébergées en maisons de retraite vont être mieux traitées par la suppression d’un jour férié aux salarié.e.s qui les soignent ?

Une attaque contre les pauvres : en effet, les vieux riches souffrent moins de solitude que les pauvres, dans la mesure où ils peuvent payer quelqu’un pour leur tenir compagnie, où leur famille, même éloignée géographiquement, peut plus facilement se payer un moyen de transport rapide (comme l’avion) pour leur rendre visite. Et s’ils embauchent une personne, cela ne leur coûte pas très cher grâce aux réductions d’impôts dont ils bénéficient !

Une attaque contre les salarié.e.s du secteur sanitaire : ces salariés mal payés, aux conditions de travail éprouvantes vont eux aussi devoir donner un jour de travail pour les personnes dont ils et elles s’occupent déjà toute l’année ! Qui peut croire que les sommes soi-disant collectées par la suppression d’un jour férié va servir à créer des postes qualifiés ?

Une attaque contre tous les salarié.e.s qui sont les seuls à être taxés et qui doivent une fois de plus payer pour l’ensemble de la société : professions libérales, agriculteurs, employeurs n’ont-ils pas eux aussi dans leur entourage des personnes âgées ou handicapées ou malades qui auraient besoin de services sanitaires et sociaux de qualité, en plus d’une solidarité familiale, au lieu de compter sur une solidarité nationale qui ne repose que sur l’amputation des droits des salarié.e.s ?

Une attaque contre les femmes : en effet, les études sexuées sur les temps libres respectifs des hommes et des femmes adultes montrent que ce sont elles qui consacrent le plus de temps aux soins destinés à leurs proches (éducation et prise en charge des enfants, soins aux personnes âgées ou handicapées, ménage de la famille) : leur enlever un jour de repos, c’est accroître leur charge de travail, enlever un jour de repos à leurs compagnons, c’est ôter une occasion à ceux-ci de participer de façon égalitaire au partage des tâches ménagères et éducatives.

Une solution mascarade : la division des salarié.e.s du secteur public et du secteur privé va avoir pour conséquence que tous ne seront pas autant perdants par cette mesure. Là où le rapport de force existe, des formes de compensation seront accordées. La mise en place d’une telle mesure va coûter presque autant en temps de travail que le bénéfice escompté : temps de négociations dans les entreprises et les administrations, informations des personnes concernées, versement de la nouvelle taxe et contrôles divers…

Si on veut vraiment que le drame de l’été 2003 ne se renouvelle pas, arrêtons de culpabiliser ceux qui ne s’occupent pas ou pas assez de leurs proches et cherchons les moyens qui leur permettront de le faire tranquillement ! Arrêtons de délocaliser les entreprises et d’imposer aux salariés de suivre leur emploi : par exemple, combien de familles ont-elles éclaté du fait du départ de la sidérurgie de la Lorraine vers Fos-sur-Mer dans les années soixante-dix, et de bien d’autres entreprises ? Ce n’est pas la suppression d’un jour férié qu’il faut envisager, c’est l’augmentation des jours fériés qui permettra aux membres d’une famille d’entourer ceux qui en ont besoin !

Ainsi que le déplorait une directrice d’une maison de retraite, c’est le manque de formation des personnels qui doit être dénoncé et auquel il faut remédier pour qu’ils sachent reconnaître les symptômes de la déshydratation chez les personnes dont ils ont la charge. C’est l’augmentation des effectifs dans les hôpitaux et les maisons de retraite et l’amélioration de leurs qualifications qui permettra une meilleure prise en charge de nos proches !

Alors, attaquons Raffarin et les idéologues du patronat qui n’ont de cesse de nous attaquer : revendiquons plus de congés pour toutes et tous et plus de personnels compétents dans les services publics destinés à la population !

Élisabeth Claude