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Recul des acquis sociaux, ou Avancée des désirs capitalistes

Le jeudi 4 décembre 2003.

La réforme du dialogue social présentée au conseil des ministres du 19 novembre, qui n’est rien par rapport à ce que le gouvernement prépare, est déjà une attaque sans précédent contre les droits sociaux acquis. Il s’agit bien sûr de faire passer aux oubliettes de l’histoire toute la législation du travail, raisonnée et élaborée sous l’Occupation puis mise en place à la Libération. L’accord majoritaire — son premier volet — n’est là que pour masquer l’essentiel. D’une part, nous avons le gel de la représentation syndicale définie en 1966 qui nie l’existence et la reconnaissance des nouvelles fédérations et organisations, et d’autre part, la remise en cause de la hiérarchie des textes, c’est-à-dire qu’un accord d’entreprise pourra être en « retrait » par rapport à la convention de branche. François Fillon, notre « gaulliste social », annonce la musique, sans faux fuyant : « Il faut que l’État se mêle un peu moins de réglementer la vie sociale et la vie économique et qu’il laisse aux partenaires sociaux le soin de le faire ». L’avertissement est clair. Les accords de branche ne seront plus qu’indicatifs et le code du travail est à terme menacé. C’est la déréglementation qui est aux postes de commande. François Fillon a tout de même réussi à mobiliser l’ensemble contre lui et sa politique de famine toutes les organisations syndicales, même les plus jaunes. Jacques Voisin, leader de la CFTC, s’inquiète : « je ne vois pas comment on va faire dans les petites entreprises et les entreprises en difficultés, où il n’y aura pas de discussions possibles ». La CFE-CGC ne reste pas les bras croisés, s’engageant à « faire du lobbying auprès des parlementaires pour leur faire comprendre ce qui se passera si ce projet de loi passe ».

Cette loi scélérate ne leur suffit pas : la création du RMA (Revenu Minimum d’Activité) qui va très vitre se substituer au RMI est une trahison et une remise en cause du principe même du SMIC. Les « bénéficiaires » sont vivement incités à accepter n’importe quel travail pour une durée de 20 heures par semaine. C’est un encouragement à la précarité, la transformation du travailleur en marchandise et une bonne aubaine pour les patrons et les entreprises qui pourront recruter des locataires qui ne leur coûteront que le tiers du SMIC. C’est le retour au XIXe siècle ! À quant l’esclavage ?

Le transfert de l’État vers le département de cette responsabilité a permis et lui permet de se dégager d’une dépense relativement importante vers une collectivité territoriale sans contre partie. Ce qui entraînera par ailleurs à une inégalité de traitement en fonction des capacités et de la politique de chaque conseil général. C’est ici une dégradation des conditions de travail et une remise en cause du code du travail et des conventions collectives puisque ces salariés « spécifiques » auront un traitement particulier en dérogation avec le cadre conventionnel. C’est donc là aussi une trahison, une attaque massive contre les travailleurs qui risque d’accélérer leur paupérisation. C’est ainsi qu’une personne élevant seule un enfant de plus de trois ans, ne recevant plus l’API (Allocation parent isolé) — elle qui vit déjà difficilement avec un RMI tellement bas qu’elle a du mal à joindre les deux bouts — sera contrainte de travailler dans le cadre d’un RMA de même « hauteur » avec toutes les conséquences prévisibles. En particulier la difficulté et souvent même l’impossibilité de faire face aux coûts d’une garde d’enfant. En effet, les accueils du matin et du soir ne sont pas généralisés dans les écoles. Ce qui fait que l’école, dont d’ailleurs ce n’est pas la fonction, ne peut pas remplir une mission de garde.

Contre cet offensive de la droite gouvernementale à la botte du MEDEF, contre la perte progressive de nos acquis sociaux, travailleuses et travailleurs mobilisons nous !

Michel Sahuc, FA, Collectif anarcho-syndicaliste La Sociale