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Turin

Fermer les centres de séjour temporaire, ouvrir les frontières !

Le jeudi 29 janvier 2004.

Le 31 janvier, à l’occasion de la journée européenne contre les centres de rétention, la Fédération anarchiste turinoise (FAI) organise un rassemblement devant le CPT (Centre de séjour temporaire) pour enfants de Turin, situé à l’angle de la rue Priocca et de la rue Porporati, à 10 heures du matin.

Dans notre ville, depuis maintenant un an, fonctionne une structure, travestie en communauté, dans laquelle sont enfermés des mineurs immigrés en attente d’expulsion, essentiellement marocains et roumains. Grâce à la trouvaille de l’adjoint aux services sociaux Lepri, on renvoie au Maroc et en Roumanie, sous prétexte de retour dans les familles (presque toujours inexistantes), des enfants auxquels l’actuelle loi raciste devrait en théorie garantir le droit d’asile et le droit à l’instruction.

Cette même loi Bossi-Fini qui, concernant les mineurs, interdit l’expulsion et impose l’insertion dans des parcours de formation, est habilement contournée. Selon les lois en vigueur, les mineurs de moins de 14 ans devraient bénéficier d’une tutelle humanitaire pour laquelle le juge enverrait les enfants interpellé dans des foyers-communautés pour avoir accès à des parcours d’insertion sociale et professionnelle, avec un titre de séjour permettant d’étudier et de travailler. Le rapatriement d’un mineur ne peut intervenir que suite à une requête précise et documentée des parents dans le pays d’origine.

Le nouveau modèle de communauté pour mineurs dont la prison de la rue Priocca est le premier exemple en Italie est caractérisé par des caméras, des barreaux, une rigueur carcérale et des conditions durables d’isolement social et légal, comme pour les étrangers majeurs détenus dans les camps de concentration d’État sans avoir commis d’autre délit que celui d’exister.

Sur la base des accords entre l’Italie et la Roumanie ou le Maroc, une demande formelle et documentée émanant des parents n’est plus nécessaire pour exécuter le rapatriement du mineur vers son pays d’origine : la bonne volonté du consulat suffira.

La commune et le préfet de Turin ont réussi à faire d’une pierre deux coups en répondant à la fois aux exigences répressives de la droite, et en recouvrant de ce vernis « humanitaire » dont aiment se parer les institutionnels de gauche et les associations catholiques. Le renvoi vers

les « familles » et la prétention que la communauté-prison soit une forme de protection vont dans ce sens. Mais le plus souvent, les enfants d’Europe de l’Est ou du Maghreb sont vendus précisément par leurs proches à des marchands d’êtres humains pour le compte d’organisations criminelles, et il est légitime de supposer qu’il est peu probable que ces familles demandent le rapatriement de leurs enfants. Et nous savons bien avec quelle facilité les autorités du pays d’origine sont disposées à favoriser le rapatriement, contre de généreuses récompenses à des bureaucrates d’État corrompus.

Des expériences similaires se diffusent sur tout le territoire italien, et le potentiel discriminatoire qu’elles expriment est alarmant. Pour la municipalité de centre-gauche au pouvoir dans notre ville, aucun avenir n’est réservé aux enfants qui vivent aux marges de notre ville. Il ne restera d’autre choix aux petits Roumains qu’à retourner dans les souterrains du métro en bandes du désespoir, alors que les jeunes Maghrébins paieront éternellement l’exclusion sociale due à l’échec du renvoi au pays.

Le commerce international de chair humaine, l’exploitation sexuelle, l’utilisation de cette main d’œuvre dans des conditions d’esclavage et comme enfants-soldats sont seulement les facettes les plus visibles de la persécution que les systèmes sociaux et les institutions occidentales exercent sur les mineurs des pays pauvres, avec la complicité de leurs pays d’origine. À cela s’ajoute la honte d’une prison pour enfants pauvres en attente d’expulsion. Il faut mettre fin à cette honte !

Le CPT se situe dans une zone densément habitée par des immigrés : vous y trouverez de la musique, des performances, des infos contre toutes les galères, contre toutes les frontières. Sans État ni frontière, personne n’est clandestin !

Fédération anarchiste turinoise, Fédération anarchiste italienne