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C’est quoi les pédagogies nouvelles ?

Le jeudi 17 juin 2004.

Contrairement aux modèles pédagogiques basés sur des conceptions transmissives du savoir, où la tâche de l’élève relève de l’application d’un savoir transmis par l’enseignant, les pédagogies actives (Freinet, Institutionnelle, GFEN) permettent non plus de s’approprier les savoirs d’un autre mais de construire ses propres connaissances. Alors, en quoi et comment une réflexion sur les différentes pratiques et théories en matière d’éducation peut aboutir à une gestion de classe différente ?



Un peu d’histoire

Fin XIXe siècle, Jules Ferry inscrit l’école obligatoire, laïque et gratuite. L’image qui en reste est aussi celle du patriotisme après la défaite de 1870. En 1899, le Bureau international des écoles nouvelles est créé à Genève afin « d’établir des rapports d’entraide scientifique entre les différentes écoles nouvelles ».

Déjà, à cette époque, des pédagogues et le mouvement ouvrier naissant se lèvent contre l’emprise de l’Église et de l’État (cf. Francisco Ferrer, Paul Robin et Sébastien Faure). Les syndicats organisent aussi des cours du soir, des universités populaires, des causerie… Puis vient la Première Guerre mondiale qui sonne le glas du mouvement ouvrier et de l’internationalisme. Il faut attendre l’après-guerre pour voir resurgir un mouvement pédagogique d’Éducation nouvelle.

Groupe français d’Éducation nouvelle

En 1921, c’est la Ligue internationale pour l’Éducation nouvelle qui est créée. En son sein, les sections de différents pays se retrouvent afin de :

  • Préparer l’enfant à vouloir et à réaliser dans sa vie la suprématie de l’esprit,
  • Respecter l’individualité de l’enfant,
  • Donner libre cours aux intérêts innés de l’enfant,
  • Renforcer le sentiment des responsabilités individuelles et sociales,
  • Faire disparaître la compétition égoïste et être remplacée par la coopération,
  • Pratiquer la coéducation des sexes,
  • Préparer le futur citoyen […] mais aussi l’être humain conscient de sa dignité d’homme.

En 1929, la section française prend le nom de GFEN et agit pour diffuser les idées de l’Éducation nouvelle et préparer les congrès internationaux.

Au sein du GFEN se développent les coopératives scolaires grâce notamment à l’action de Roger Cousinet et Célestin Freinet. Le GFEN participe à de nombreuses commissions de travail et interpelle le Front populaire. Les activités cessent pendant la guerre.

Les combats politiques

Les années 30 sont des années de fortes tensions sociales avec, d’un côté, la montée des fascismes et, de l’autre, des espoirs de gouvernement populaire avec le Front populaire de 1936 et la Révolution espagnole. La défaite des démocraties et l’entrée en guerre va mettre un coup d’arrêt à ces mouvements émancipateurs. Il faut attendre 1945 pour voir ces idées reprendre le devant de la scène et trouver des applications concrètes nées du travail au sein des comités de résistance. Mais la situation est loin d’être idéale et des groupes œuvrent toujours pour améliorer la société en améliorant l’individu, en construisant des rapports nouveaux.

La pédagogie Freinet

Célestin Freinet (1896-1966) en est l’un des pionniers. En 1920, il est instituteur à Bar-sur-Loup et commence à expérimenter de nouvelles techniques pour ses enfants (travail de groupes, promenades découvertes, etc.).

La vraie révolution apparaît avec l’imprimerie à l’école. à l’aide de ce support, toute la pédagogie Freinet va découler. Le travail coopératif est nécessaire à l’utilisation de la machine. Le choix des textes à imprimer, la répartition des tâches incombent aux réunions de la coopérative. L’écriture des textes se fait en ateliers d’écriture libre. La lecture et le choix des textes se font collectivement. La diffusion et l’envoi des journaux imprimés nécessitent la mise en place d’autres ateliers, la correspondance scolaire se structure, il faut faire des sorties enquêtes pour répondre aux questions des correspondants.

Pour Freinet, il s’agit de mettre en place une pédagogie du travail. Son engagement politique témoigne de sa volonté d’être avec les enfants du peuple.

En 1948, à Dijon, est fondé l’institut coopératif de l’école moderne qui existe toujours et vise à la diffusion des techniques Freinet. Ces techniques, que nous venons de citer, s’appuient sur un ensemble de principes :

  • L’expression, la communication et la création que ce soit au niveau des textes libres, de la correspondance scolaire, des conférences organisées par les enfants, de l’utilisation des techniques radiophoniques, cinématographiques…
  • L’autonomie, la responsabilisation et la coopération tant au niveau de la vie de classe que de la répartition des tâches, de l’emploi du temps que des réalisations.
  • Des apprentissages personnalisés au moyen des fichiers autocorrectifs, des brevets de connaissances, des livrets et autres documents que la classe se crée pour sa bibliothèque du travail.
  • Le tâtonnement expérimental en matière scientifique, en technologie. L’enfant construit ses savoirs, s’exerce.
  • La méthode naturelle et les sorties nature qui partent du vécu des enfants pour ensuite travailler dessus afin d’acquérir de nouvelles connaissances.

Durant cette période, les idées d’éducation nouvelle ou moderne reprennent de l’ampleur avec la création du groupe français d’éducation nouvelle dont nous reparlerons plus tard.

La Pédagogie institutionnelle

Dans les années 60-70, face à l’école caserne des villes, une scission apparaît au sein du mouvement Freinet jugé trop lié à l’école de village. C’est ainsi que naît la Pédagogie institutionnelle de la rencontre de Fernand Oury et d’Aïda Vasquez. La Pédagogie institutionnelle se réclame de la pédagogie Freinet (correspondance et journal scolaire, coopérative, conseil) en y associant un travail sur la psychologie des petits groupes, la sociologie, la psychanalyse et le développement de la personnalité.

Les éducateurs de la Pédagogie institutionnelle ont recours à l’analyse de pratiques et de comportements (les monographies) et s’appuient sur un trépied conceptuel :

  • Les techniques empruntées à Freinet.
  • La dynamique des groupes et les apports de la psychologie sociale.
  • La psychanalyse et les travaux de Lacan, Dolto, Freud, etc.

La Pédagogie institutionnelle se différencie de la pédagogie Freinet sur quelques modes organisationnels :

  • L’utilisation des ceintures qui représentent le passage à des niveaux de connaissance et de comportement social.
  • Le rôle des conseils d’enfants qui gèrent tous les problèmes de la vie collective, les conflits.
  • Le rôle de l’enseignant qui garde un droit de veto face aux décisions du conseil.
  • Les temps de parole qui permettent un retour du groupe sur lui-même (causettes du matin, bilans de fin de journée).
  • L’institutionnalisation de métiers (ou services) gérés par les enfants.

L’institutionnel est une structure élaborée par la collectivité, tendant à se maintenir existence en assurant le fonctionnement d’un échange de quelque nature que ce soit. Au sein de la Pédagogie institutionnelle, survient une autre scission entre ceux qui restent très liés à la psychologie et à la psychanalyse, en tant que soin, et donc essentiellement tournés vers l’enseignement spécialisé ; et ceux qui défendent une pratique autogestionnaire.

Le GFEN aujourd’hui

C’est dans les années 60-70 que se redéfinit son champ d’action. En partant de l’expérience d’un groupe d’écoles du 20e arrondissement de Paris, puis grâce aux travaux du couple Bassis, le GFEN se définit comme auto-socio-constructiviste.

L’enfant bâtit ses savoirs dans la confrontation à autrui. Il vit des démarches qui lui font intégrer le sens même de ce qu’il apprend. Le déroulement des séances d’apprentissages est souvent organisé par une phase de questionnement collectif, une phase de recherche individuelle, puis une mise en commun (confrontation des idées). Il peut y avoir un retour au travail en groupe ou individuel, puis un accord commun. C’est bien la démarche qui est importante.

Le GFEN résume son programme et son pari sous le mot d’ordre : tous capables, tous chercheurs, tous créateurs. Les praticiens qui se réclament du GFEN s’appuient sur une méthodologie qui comprend :

  • Les démarches d’auto-socio-construction dans toutes les matières.
  • Les projets d’élèves qui mobilisent les efforts et donnent du sens aux apprentissages.
  • Les conseils d’élèves qui gèrent la vie collective, établissent les règles de vie.

Pour élargir le débat

Points communs et différences : les trois courants s’appuient sur des institutions, au sens de la Pédagogie institutionnelle : boîte ou cahier de râlage, conseil, projets, lieux de parole, affichage de l’emploi du temps, des règles de vie, des décisions prises, organisation coopérative, travail de groupe et individuel, débats, recherche et tâtonnement, droit à l’erreur, respect de tous, et se nourrissent des travaux en pédagogie, sociologie et psychologie. Des différences existent cependant entre tous ces mouvements au niveau de leur histoire, de leur définition (école active, moderne ou nouvelle ; centre d’intérêts ; projets) et de leur priorité.

Le contexte historique

Si nous avons cité rapidement le contexte historique dans lequel œuvrent ces mouvements, c’est pour ne pas perdre de vue que l’influence et le poids que les pédagogies peuvent avoir sont aussi dépendants d’un environnement politique et social. L’alternative scolaire se construit aussi dans un mouvement plus général d’émancipation (cf. P. Freire, La Pédagogie des opprimés).

Tous les groupes d’Éducation nouvelle font référence à la citoyenneté, aux implications sociales que portent leurs revendications, aux espoirs nourris. Pour cela, nous aurions pu citer tous les mouvements qui agissent aussi dans le sens de la coopération et de l’éducation populaire tels que l’OCCE, les CEMEA, les Francas, toutes les associations et réseaux citoyens, les universités populaires, les écoles expérimentales, les alternatives.

Nous avons voulu nous limiter à une présentation des trois courants les plus importants, sachant qu’ils ne naissent pas du néant et sont redevables de toute une histoire, jalonnée de pédagogues illustres, d’anonymes artisans, de mouvements sociaux et d’acteurs de la vie sociale.



Les partis pris


L’éducation nouvelle développe ses pratiques en lien avec ses partis pris, ses représentations de l’éducation, de son rôle et de son fonctionnement.

Une personne en construction

L’enfant n’arrive pas à l’école sans rien, il est imprégné par tout ce qu’il a vécu avant l’école et par tout ce qu’il vit en dehors du temps scolaire, cela suppose donc que le maître le considère réellement comme un être en devenir qui se construit tous les jours de façon différente.

Les méthodes que le maître va choisir pour aider l’enfant à se construire sont donc importantes, pour que plus tard il ait confiance en lui et qu’il soit capable de s’investir pleinement dans les tâches qui lui sont demandées sans avoir peur d’échouer.

« L’école doit être un milieu protégé où les enfants construisent des relations de qualité avec d’autres enfants et d’autres adultes. Parce qu’ils s’y sentent reconnus, parce qu’il ont conscience qu’ils deviennent grands et qu’ils apprennent, les enfants prennent confiance en eux et éprouvent du plaisir à venir à l’école. » (Texte Instructions officielles, 1995, p. 16.)

Cela suppose qu’il y ait dans la classe et/ou dans l’école des adultes responsables et qui souhaitent vraiment former « des individus capables d’innover au lieu d’emboîter le pas aux générations précédentes, des individus à l’esprit inventif et créateur, des découvreurs ». (Extrait du rapport du conseil de l’Europe sur l’innovation dans le primaire.)

En référence aux différentes chartes (charte de l’école moderne, charte de l’OCCE, chartes de l’ANEN, charte des écoles Freinet, etc.), on retrouve quelques principes de base : reconnaître l’enfant comme une personne ; donner à chaque enfant la place et la reconnaissance dont il a besoin pour se développer ; permettre à l’enfant d’être responsable et acteur de sa vie autour de la communauté éducative.

Donc, dans la classe, il doit y avoir un esprit qui permet aux enfants de se construire en ayant leur propre cheminement personnel, dans la mesure où chaque individu évolue de manière différente selon le stade dans lequel il se trouve (cf. Piaget). L’enfant doit avoir la possibilité d’apprendre à apprendre, pour que la construction de l’enfant et du savoir se fasse en même temps. C’est-à-dire que le maître doit adapter régulièrement les savoirs qu’il veut que l’enfant construise au moment où l’enfant se situe dans sa construction et son développement individuel.

Tous les enfants sont capables

Il s’agit avant tout de faire un pari sur l’avenir et la capacité des enfants. Tout le monde sait, depuis les travaux de Pierre Bourdieu, que les inégalités sociales sont aussi facteurs d’inégalités scolaires : les classes populaires réussissent moins bien que les classes favorisées qui possèdent les outils conceptuels et culturels propres à l’école. L’école se bâtit sur une violence symbolique et culturelle face aux enfants issus de ces catégories sociales. Prenant acte de cette situation, l’Éducation nouvelle se place dans une logique de la réussite pour tous.

Qu’est-ce que réussir ?

Il ne s’agit pas de juger les enfants d’après une norme unique mais de prendre en compte leur cheminement, leur évolution. Si le critère de réussite est la maîtrise de la culture bourgeoise, alors certains enfants (la majorité) partent avec un handicap. Si la réussite est de savoir se positionner en tant qu’individu dans la collectivité, sachant défendre ses idées en s’appuyant sur sa propre culture, alors tout est à redéfinir. D’autre part, nous avons dit que la dimension temporelle, évolutive, est importante. Nous prenons en compte l’évolution de l’enfant. Certains enfants acquièrent certaines notions moins rapidement que d’autres, mais cela n’a pas d’importance. D’ailleurs, n’est-ce pas le sens du découpage de la scolarité en cycles de trois ans ? C’est sur cette période que les connaissances doivent être acquises.

Les intérêts des enfants

Deuxièmement, il faut partir du vécu des enfants, de leur culture d’origine, qu’elle soit étrangère, paysanne ou prolétarienne. Partir des centres d’intérêts des enfants, valoriser les éléments que l’on juge intéressants dans la culture des parents, les associer à la vie de la classe en les invitant régulièrement, voilà des pratiques qui intègrent l’enfant dans toute sa dimension sociale et affective et ne le place pas en conflit avec l’institution scolaire. Il est faux de penser que les enfants n’ont aucun intérêt, ou alors la situation est grave. Il s’agit donc de les faire émerger et de s’en servir.

Un pari pascalien ?

Enfin, il faut vraiment faire le pari sur la capacité de tous à s’améliorer et se donner les moyens qu’elle éclose, tant le regard que l’on porte sur les enfants est incluant de pratiques différentes. Toujours regarder l’enfant comme capable.

Ne pas le rejeter ou le catégoriser comme quelqu’un pour lequel il n’y a rien à faire. L’utilisation de contrats de travail individuels, des brevets, des projets individuels ou collectifs, permet de mettre l’enfant dans une démarche de progression et de réussite. Pour l’un, ce sera de ne pas bousculer ses camarades ; pour un autre, comprendre la multiplication à deux chiffres, pour un troisième enfin, ce sera s’exprimer plus régulièrement en conseil. Chacun a des objectifs en fonction de là où il en est. Bien sûr, les leçons collectives servent aussi à avancer tous ensemble. Des remédiations pourront être mises en place ainsi que les groupes d’entraide ou des groupes de niveaux. Rien n’est donné une fois pour toute !

L’enfant se construit avec les autres

L’enfant comme l’adulte a besoin d’autrui pour exister, c’est grâce à l’image que me renvoie l’autre que je peux me construire, m’identifier comme un individu à part entière, l’homme est un être social.

Il existe plusieurs moyens pour apprendre à utiliser l’autre pour se construire, à l’école cela passe par le groupe classe. C’est en vivant avec l’autre que l’enfant comprend la nécessité de règles collectives pour régir le groupe. L’enfant apprend petit à petit par la coopération à se confronter avec l’autre donc à affirmer sa personne mais il apprend aussi à travailler en commun pour s’enrichir. Le groupe permet en effet d’apprendre à parler, à exprimer ses idées, à donner son avis, argumenter, ou montrer son désaccord. C’est grâce à la présence de l’autre que l’enfant s’exerce à la citoyenneté, il apprend à utiliser sa parole.

Le rôle de l’enseignant

L’enseignant est celui qui institue sa classe, les règles, le fonctionnement général dont les formes sont définies par les élèves au sein des institutions de la classe : conseils, ateliers, bilans, causettes, en fonction de leurs besoins. Il reste le garant d’un espace privilégié de rencontre, de confrontation, d’échanges. Au niveau légal, il est responsable de tout ce qui a trait à la sécurité et à l’acquisition des connaissances définies par les programmes. Il ne se déresponsabilise pas mais place son pouvoir dans la collectivité d’individus. Et en tant qu’individu, il a son mot à dire, à faire valoir. Seulement, il ne faut pas être dupe du poids de sa parole par rapport à celle des enfants.

Les démarches

L’enseignant met en place des démarches de construction du savoir (voir GFEN). Il a toute une préparation à mettre en place. Une bonne fiche de préparation ne suffit pas : sa conduite est capitale. Il doit créer les conditions pour que chacun puisse se confronter avec la problématique en cause, ses réalités et ses contradictions.

L’ambiance de travail, l’organisation de l’espace et des temps sont de son domaine et l’on ne dira jamais combien la maîtrise du temps et de l’espace est un véritable pouvoir en ce qu’ils induisent comme relations sociales.

Donner du sens

L’enseignant joue donc un rôle dans l’ambiance de classe. En cassant les relations de compétition, en instaurant des relations coopératives, en faisant émerger les problèmes, les non-dits, en les plaçant au centre du débat public, l’enseignant met ses élèves dans une dynamique de citoyenneté et de respect à autrui. Les enfants ne sont pas mis à l’index de façon arbitraire. Ils sont partie intégrante des projets de classe. Ils apprennent d’une autre façon, en voyant l’utilité de ce qu’ils apprennent, en l’appliquant à leur vie réelle, en comprenant le sens des savoirs acquis. L’enseignant a un vrai rôle à jouer au niveau de la conception du savoir. Il doit mettre l’enfant dans une dynamique de construction active (apprendre pour de vrai, pour soi, et non pas pour faire plaisir aux autres ou par obligation).

L’enseignant évalue, cependant, avec l’élève le travail accompli et les difficultés rencontrées. Ils envisagent alors les suites à donner. Dans ce travail, l’enseignant a un rôle fondamental, celui d’ouvrir des pistes alors inconnues de l’enfant.

Transmettre des valeurs

L’enseignant est porteur de valeurs et, même lorsqu’il laisse le choix aux élèves, il doit faire valoir son point de vue s’il juge que les discussions tournent vers des solutions injustes d’exclusion ou de punitions outrancières. Si l’enseignant met en place des pratiques différentes, c’est qu’il a d’autres conceptions de l’individu et de sa place dans la société. Il n’entend donc pas que les enfants reproduisent ce qu’il condamne. Si l’enseignant veut faire évoluer les choses, il cherche dans les réunions pédagogiques, dans ses lecteurs, dans des groupes d’opinion, des éléments de réflexion et des pratiques à partager avec ses élèves.

Il doit donc être sans cesse en quête de nouveaux éléments et oser les tester. Bien sûr, il est plus aisé de se réfugier derrière des pratiques assurées de « réussite ». L’expérimentation est déstabilisante et c’est en cela qu’elle est porteuse d’enseignements. Elle remet en cause les a priori. Et donc, forcément, il faut du temps pour que les innovations s’institutionnalisent et trouvent leurs règles de fonctionnement. L’enseignant tient la barre malgré les difficultés et les échecs éventuels. Attention, on ne peut pas être en innovation permanente.

L’enseignant doit bousculer les croyances établies mais ne pas insécuriser ses élèves.

Il apporte, au moment opportun, des outils que les élèves peuvent saisir ou pas.

Construire les savoirs

Dans la construction du savoir, l’enseignant a une place centrale, non pas que tout tourne autour de lui, mais dans sa disponibilité et dans l’aide qu’il peut apporter.

On n’apprend rien parce qu’on l’a dit et répété. Il faut tester, se poser des questions, entrer dans une recherche individuelle ou collective pour que les éléments nouveaux puissent être intégrés à notre conception du monde — et ils seront modifiés par cette conception.

L’enseignant n’a donc pas la solution à donner mais il aide à la problématisation et fournit les outils conceptuels et matériels de sa résolution.

« Apprendre, c’est inventer. »

Il ne s’agit pas de transmettre directement la bonne réponse, mais de favoriser les investigations, les échanges verbaux et procéduraux, d’aider les élèves à émettre des hypothèses, à les tester, à observer, à expliquer en argumentant, à faire des recherches documentaires.

« Je cherche donc j’apprends. »

Fred est militant du groupe Proudhon de la A à Besançon.