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C’est bien, c’est bon, c’est Bush

Le jeudi 10 juin 2004.

« C’est pas vraiment c’qu’on voulait au départ. J’crois bien qu’on s’est fait baiser quelque part. »
Michel Buhler


Lourdés avec perte et fracas il y a plusieurs mois, les anciens salariés de Moulinex savent désormais pourquoi on les a mis au chômage. Leur ancienne usine de Bayeux a servi de base pour abriter une brigade britannique quelconque, venue en France pour la célébration du D Day (marque déposée).

Voilà au moins une bonne nouvelle. Toute cette légion de feignasses (je veux parler des soldats britanniques) va occuper une usine anciennement pourvoyeuse de jolis cadeaux pour la Fête des Mères. La colonisation économique entamée il y a soixante ans trouve là un bien curieux symbole et un bien sérieux débouché.

Au départ pourtant les choses étaient simples. L’occupation insupportable des trois quarts de l’Europe par les nazis devait bien faire réagir un moment donné. Les États-Unis avaient besoin de débouchés économiques significatifs et s’entendre avec l’Allemagne c’était un peu le baiser de la mort. Il y avait d’une part le bien, le monde libre et civilisé et d’autre part la barbarie. Bien rares furent les pacifistes pour distribuer des tracts antimilitaristes sur les plages du débarquement.

Les célébrations de ce qu’il faut bien appeler la Libération, car c’était bien de ça qu’il s’agissait, nous donnent malgré tout l’occasion de considérer que l’hégémonie étasunienne est directement issue de cet événement historique. Non seulement les nazis furent balayés militairement, mais ce fut l’occasion de créer des débouchés pour la croissance de cette jeune puissance et d’asseoir son pouvoir sur le monde. Ces mêmes causes produisent leurs effets près de 60 ans plus tard. Représentés par leur sinistre pantin G.W. Bush, les industriels américains n’en peuvent plus d’inonder la planète. Leurs usines dégueulent, l’ordre moral se renforce à grands coups de dollars, le marché potenciel du monde arabe alliée à un soucis de revanche après le 11 septembre, l’élimination du concurrent soviétique, tout concourt désormais à ce que l’émergence des États-Unis prenne pleinement ses effets. C’est que la mondialisation faut qu’ça s’organise.

C’est tout ça qu’incarnent les Bush brothers and fathers. Un peu comme les frères Sarkozy chez nous. Sauf que les Sarkozy c’est quelques pointures en dessous.

Si Bush n’est pas fâché avec nous (nous c’est la France) c’est simplement parce qu’il n’a pas d’intérêts à la bouderie. Sinon… La colonisation s’opère en Europe dans le feutré. Les dirigeants occidentaux, par Union Européenne interposée, condescendent à leur situation de vassaux économiques même si en surface quelques grognements politiques se font entendre. Jamais le primat de l’économique sur le politique n’a été aussi patent. Cela vaut bien que notre empereur se déplace. Après avoir léché le cul du pape (bon courage !), et serré la main de Berlusconi le maffieux, c’est chez nous, au pays du calvados et du fromage qui pue, que Bush est venu se souvenir que quelques dizaines de milliers de ses boys sont morts pour que le modèle américain puisse exporter ses vraies valeurs économique et politique : Mac Donald et miss T. Shirt mouillé. Et ça c’est quand même du bol.

Jipé